Aide au développementL'orientation de l'aide fait débat
ATS
23.8.2019 - 17:33
Lien entre aide au développement et migration, montants des fonds alloués, retrait d'Amérique latine: tels sont quelques-uns des points d'achoppement qui ressortent vendredi de la consultation sur l'orientation de l'aide internationale pour les années à venir.
C'était la première fois que le projet qui trace les grandes lignes de la coopération internationale pour une période de quatre ans était soumis à une procédure de consultation facultative.
Le projet prévoit que dorénavant la coopération et l'aide au développement tiendront mieux compte des intérêts de la Suisse, notamment en matière de politique migratoire. Pour le PLR, il est positif qu'un plus grand poids soit enfin accordé à la migration.
Il attend désormais que cela se traduise par des actes sur le terrain. Outre le renforcement du dialogue et des partenariats migratoires, il convient de s'efforcer de conclure de nouveaux accords de réadmission, ajoute-t-il.
Pas plus de deux milliards par an
L'UDC soutient l'orientation générale du projet, et son redimensionnement géographique et thématique. Mais la droite dure exige le plafonnement de l'aide au développement à deux milliards de francs par an. Les moyens libérés doivent selon elle servir à assainir l'AVS.
La contribution apportée aux ONG, de 8 millions par an, doit elle être abaissée à 4 millions. Fondamentalement, l'aide au développement doit être alignée de façon plus conséquente sur les intérêts de la Suisse, considère l'UDC.
Pour le PDC, une plus forte prise en compte de la question migratoire paraît pertinente. Plus généralement, la stratégie présentée, qui contient des demandes énoncées depuis longtemps par le parti, va pour lui dans le bon sens.
Pas de conditionnalité stricte
Le PS et Caritas se réjouissent que le lien entre aide et politique migratoire ne soit pas soumis à une conditionnalité stricte. Ce dernier note toutefois que le rapport réduit l'interaction complexe entre migration et aide au développement au seul but de réduire la pression migratoire.
«La Suisse doit mettre ses dispositifs d'aide humanitaire et de coopération au développement au service de la réduction de la pauvreté, et non pas de la politique migratoire», insiste pour sa part la Croix-Rouge Suisse.
Moyens insuffisants
Pour la période 2021 à 2024, le projet prévoit un budget de 11,37 milliards, une somme insuffisante pour les organisations actives dans le développement et le PS. Cela correspond à 0,45% du revenu national brut (RNB) de la Suisse. Or le Parlement a fixé comme objectif d'y consacrer 0,5% du RNB et le Conseil fédéral s'est engagé à relever cette part à 0,7%, comme prévu par l'Agenda 2030, rappelle notamment Swissaid.
Le PLR indique pour sa part qu'il se prononcera sur la part d'aide au développement ultérieurement, lorsque le message sera établi. Il souligne toutefois que, plus qu'un objectif rigide, c'est l'efficacité avec laquelle les moyens sont utilisés qui est déterminante.
Mieux définir les objectifs
Plusieurs autres acteurs consultés estiment que les objectifs de l'aide au développement sont formulés de façon trop vague. La création d'une croissance économique endogène doit être la principale priorité, avance le PLR.
Pour l'Union syndicale suisse, Alliance sud, Swissaid, le PS, la Croix-rouge suisse mais aussi l'Académie des sciences naturelles, les objectifs de la coopération suisse devraient être alignés sur ceux de l'Agenda 2030 de l'ONU, ce qui implique avant tout la réduction de la pauvreté.
Pour atteindre ces objectifs, il ne suffit pas de se reposer sur la coopération internationale. La politique suisse doit améliorer sa cohérence tous départements confondus. Cela concerne en particulier sa politique commerciale, fiscale et financière. Cette exigence doit être explicitement mentionnée, demandent notamment Alliance sud, le PS et l'USS.
Désengagement d'Amérique latine
Le projet prévoit un recentrage de l'aide internationale helvétique sur quatre régions et 34 pays prioritaires au lieu de respectivement six et 46 actuellement. En conséquence, la Suisse se désengagera progressivement d'Amérique latine d'ici 2024.
La concentration est nécessaire. La politique de développement doit être réaliste et pour qu'elle ait un effet, les fonds doivent être utilisés de manière ciblée, écrit le PLR. Pour le PDC, une pesée d'intérêts s'impose encore avant une décision définitive.
Swissaid estime pour sa part qu'au vu des difficultés politiques sur le sous-continent, un départ pur et simple de l'aide suisse «aurait des répercussions désastreuses pour les populations locales».
Si elle juge «compréhensible» le retrait de la coopération bilatérale dans la mesure où les pays concernés sont à revenu moyen, Caritas se montre en revanche préoccupée par le sort d'Haïti. Ce pays «devrait être considéré comme un cas à part».
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