Communautés de L'Arche Mort de Jean Vanier

ATS

7.5.2019 - 12:52

Jean Vanier avait reçu en 2015 le prix Templeton à Londres (archives).
Jean Vanier avait reçu en 2015 le prix Templeton à Londres (archives).
Source: KEYSTONE/AP/ALASTAIR GRANT

Le Canadien Jean Vanier est mort en France dans la nuit de lundi à mardi. Cet ex-officier de marine avait tout quitté en 1964 pour vivre avec deux handicapés mentaux. Depuis il a fait essaimer ses communautés de L'Arche et leur message d'inclusion à travers le monde.

Jean Vanier avait 90 ans. «Affaibli par un cancer, il était hospitalisé depuis plusieurs semaines à la Maison médicale Jeanne Garnier à Paris», a annoncé L'Arche dans un communiqué.

Né le 10 septembre 1928 à Genève, ce cadet de la Royal Navy – engagé à 13 ans, en pleine guerre – aurait pu choisir la carrière diplomatique ou militaire sur les pas de son père, qui deviendra gouverneur général du Canada. Il optera pour des études de philosophie et théologie, jusqu'au professorat.

Fuir des institutions épouvantables

«Notre société ne veut surtout pas de la liberté des fous; quand je dis 'fous', c'est avec respect bien sûr», déplorait ce philosophe qui a progressivement été reconnu dans l'Eglise catholique comme une grande figure sociale et spirituelle.

Comment ce spécialiste du bonheur chez Aristote en est-il venu à s'installer, à l'été 1964, dans une petite maison sans commodités avec deux personnes intellectuellement déficientes, en lisière de la forêt de Compiègne ? «That's the question...«, répétait avec flegme ce colosse à la poignée de main aussi ferme que son sourire était doux.

«J'avais visité près de Paris une institution psychiatrique épouvantable, où régnaient la violence, l'enfermement. La seule chose que j'aie faite, c'est d'en sortir deux résidents qui n'avaient pas de famille. On a commencé à vivre ensemble, sans plan. J'accepte l'idée que c'était fou», confiait en 2014 celui qui avait quitté la Marine sans but précis, sinon celui de «suivre Jésus».

Vie en commun

Autour de la première communauté, la solidarité locale s'organise même si, dans un premier temps, Trosly-Breuil, au nord de Paris, craint de devenir «le village des fous».

L'Arche grandit dans la dynamique des retraites spirituelles que son fondateur prêche, des ouvrages qu'il publie, des conférences qu'il multiplie à travers le monde. Des communautés mêlant personnes handicapées mentales et «aidants» ouvrent en Inde en 1970, en Côte-d'Ivoire en 1974, en Haïti l'année suivante...

Chaque foyer comprend une demi-douzaine de personnes avec un handicap mental et presque autant d'«assistants» valides. Tous vivent, parfois travaillent et surtout prennent leurs repas en commun.

«A L'Arche, on commence par vouloir faire du bien, et on finit par se dire que ce sont les personnes avec un handicap qui vous changent, qui vous apportent une autre vision de la vie, de l'humanité», soulignait Jean Vanier.

Aujourd'hui, l'ONG compte plus de 150 foyers sur les cinq continents. En Suisse, elle compte trois communautés, à Versoix (GE), Fribourg et Dornach (SO).

«Humanisme universel»

Le Canadien a aussi cofondé en 1971 le réseau chrétien Foi et Lumière, qui revendique près de 1500 «communautés de rencontre» organisant des temps de prière, de pèlerinage et de fête dans quelque 80 pays.

Son message, Jean Vanier a voulu l'inscrire dans un «humanisme universel», davantage que dans une stricte dimension catholique. Les relations avec Rome de ce catholique plutôt en avance dans le dialogue interreligieux n'ont d'ailleurs pas été immédiatement chaleureuses.

Mais la situation a changé: Jean Vanier a été accueilli à bras ouverts par les papes Jean Paul II et François, et encouragé par Benoît XVI. En 2015, il avait reçu à Londres le prix Templeton, décerné avant lui à Mère Teresa, au dalaï-lama ou encore à Desmond Tutu.

Dans un tweet, la secrétaire d'Etat française chargée des Personnes handicapées Sophie Cluzel a exprimé son «immense reconnaissance». «Je garde le souvenir de son humanisme et de son action résolue pour donner toute leur place aux plus vulnérables au coeur de la cité», a-t-elle dit.

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