Festival de Locarno«Apenas el sol», un film pour raconter l'histoire du peuple Ayoreo
sifo, ats
11.8.2021 - 10:38
«Apenas el sol» (Rien que le soleil) de la réalisatrice paraguayenne Arami Ullón raconte l'histoire du peuple Ayoreo en suivant un indigène, qui rencontre les habitants d'une des communautés de la région du Chaco au Paraguay. Entretien avec la réalisatrice.
sifo, ats
11.08.2021, 10:38
11.08.2021, 10:47
ATS
La première mondiale d'«Apenas el sol» s'est tenue au Festival international du film documentaire (IDFA) d'Amsterdam en novembre dernier. Mais c'est au Festival du film de Locarno qu'une délégation du film a enfin pu le présenter mardi au public en première suisse.
Arami Ullón est une réalisatrice paraguayenne qui vit entre le Paraguay et la Suisse. Le film est en fait une coproduction entre les deux pays: le producteur bâlois Pascal Trächslin avait déjà travaillé avec la réalisatrice sur le documentaire «El tiempo nublado» (Cloudy Times, 2014), sélectionné par le Paraguay pour l'Oscar du meilleur film en langue étrangère en 2016.
Sauver témoignages et traditions
Le documentaire suit Mateo Sobode Chiqueno, un indigène qui a commencé à enregistrer des chansons et des histoires dans les années 1970 pour préserver les traditions de son peuple, les Ayoreo. Ces chasseurs-cueilleurs amérindiens vivaient à l'origine de manière nomade dans les régions centrales d'Amérique du Sud.
Au cours du film, Mateo rencontre d'autres Ayoreo qui ont été chassés de leurs territoires dans la forêt paraguayenne par des colons blancs mennonites, dès les années 1950, puis convertis par deux vagues de missionnaires évangéliques dans les années 70 et 80. Il les interroge sur leur culture et leurs terres ancestrales.
«Cette population indigène est toujours menacée», explique Arami Ullón à Keystone-ATS. Environ 4000 Ayureo vivent aujourd'hui dans des communautés établies par les Blancs. Seules quelques tribus, qui comptent environ 200 personnes, vivent encore dans les forêts de ce petit pays au centre de l'Amérique du Sud, sans contact avec le monde extérieur.
Rejet de leur propre culture
Certains Ayoreo témoignent dans le film qu'ils ne croient plus à leurs traditions ancestrales comme le chamanisme et qu'ils se sont adaptés aux coutumes et au christianisme des Blancs. Ce n'est pas le cas de Mateo, qui a voulu enregistrer les voix de son peuple pour faire revivre ses traditions perdues.
«La principale raison pour laquelle ils rejettent leur propre culture est qu'en agissant ainsi, ils peuvent être mieux acceptés dans le monde des Blancs», explique la réalisatrice. «Les missionnaires, qui les ont chassés de leurs terres et leur ont imposé une nouvelle culture, sont aussi ceux qui peuvent leur offrir du travail.»
Une campagne pour soutenir les Ayoreo
Arami Ullón espère que les autorités paraguayennes soutiendront le documentaire, malgré l'incapacité du gouvernement actuel à reconnaître la diversité culturelle des peuples indigènes. Mais s'ils censurent le film, «nous le rendrons public», avertit-elle.
L'espoir est que le gouvernement agisse en faveur des peuples indigènes, dit-elle, en annonçant le lancement d'une campagne en novembre, intitulée «Fonds de défense juridique». Le but est de collecter des fonds dans le monde entier afin de donner les moyens aux Ayoreo de défendre leurs terres et de les récupérer.
La campagne est organisée par la réalisatrice elle-même et le producteur suisse Pascal Trächslin. La Constitution paraguayenne «soutient les droits des populations autochtones à récupérer leurs terres», rappelle-t-elle encore.
Mme Ullón possède une société de production au Paraguay, Arami Ullón Ciné, où elle ne produit pour l'instant que ses propres films: l'objectif est d'en faire de même à l'avenir avec des films paraguayens.
La réalisatrice travaille également comme consultante pour des producteurs suisses, en particulier pendant le processus de montage et de structuration de l'histoire: «Je suis obsédée par la narration et passionnée par la recherche de moyens qui permettent d'améliorer la façon de raconter des histoires.»