Facebook va devoir verser une amende record de 5 milliards de dollars. Elle est infligée par un régulateur américain pour les manquements du premier réseau social au monde en matière de protection des données personnelles, affirment plusieurs médias vendredi.
L'accord à l'amiable, dont aucun détail n'a filtré, devrait aussi comporter des restrictions sur la façon dont Facebook utilise les données personnelles, indique le Wall Street Journal, qui a le premier fait état de la décision du régulateur.
Le ministère de la Justice doit encore donner son feu vert à cet accord, adopté par les commissaires de l'agence de régulation fédérale (FTC) par 3 voix contre 2, indique le quotidien des affaires, citant une source proche du dossier.
Signal positif
La Bourse a applaudi des deux mains: l'action a atteint son plus haut de l'année pour finir à près de 205 dollars. Les investisseurs estiment sans doute que les restrictions ne seront pas trop sévères, comme semble l'indiquer l'opposition de deux commissaires démocrates à la décision alors que les trois républicains ont voté pour.
C'est en tout cas l'interprétation de l'association de défense des consommateurs Public Knowledge. «Nous ne connaissons pas encore les aspects essentiels du règlement à l'amiable: est-ce que Facebook doit procéder à des changements dans son 'business model' ou dans sa façon de faire des affaires?«, a souligné Charlotte Slaiman, chargée de la concurrence au sein de l'association.
Le ton était plus positif au Center for Democracy and Technology: «Cette amende record montre l'importance de la régulation des données à l'ère du numérique. La FTC a ainsi averti toutes les entreprises qu'elles devaient protéger l'information privée», a souligné Nuala O'Connor, présidente de cette ONG de défense des libertés en ligne.
Bien précieux
Les données personnelles de ses plus de 2,7 milliards d'utilisateurs actifs mensuels sont le bien le plus précieux de Facebook, qui les collecte et les exploite pour en tirer d'immenses revenus publicitaires grâce à un ciblage très affiné.
Mais c'est à cause de la façon dont ces données sont utilisées que le réseau social se trouve depuis deux ans dans la tourmente et fait face à une grave crise de confiance.
L'enquête de la FTC visait à déterminer si Facebook avait enfreint un accord à l'amiable de 2011 dans lequel il s'engageait déjà au respect des données personnelles et à la transparence concernant leur utilisation. Elle a été ouverte après l'éclatement en mars 2018 du scandale des fuites de données vers la firme britannique Cambridge Analytica.
Facebook s'attendait à une amende de cet ordre et avait annoncé fin avril avoir fait des provisions de 3 milliards de dollars, tout en précisant qu'il pourrait devoir payer jusqu'à 5 milliards de dollars.
Cette amende égratignera à peine la santé financière de l'entreprise co-fondée par Mark Zuckerberg. Pour son exercice 2018, Facebook a affiché une santé de fer avec 22 milliards de dollars de bénéfice pour un chiffre d'affaires de 55 milliards. Et, même amputé des provisions, le bénéfice net a atteint 2,43 milliards de dollars au premier trimestre.
Démanteler
Mais l'accord avec la FTC ne devrait donner qu'un bref répit à Facebook. Elus ou régulateurs tirent à boulets rouges sur le groupe qui fait l'objet de poursuites et d'enquêtes tous azimuts dans plusieurs pays.
Face à ces assauts, le groupe tente de reprendre l'initiative. Son responsable de la communication Nick Clegg a appelé le 24 juin les gouvernements à faire davantage en matière de régulation des géants du numérique, dont les pratiques sont souvent mises en cause notamment sur la protection des données ou la diffusion de fausses informations.
«Ce n'est pas aux sociétés privées, qu'elles soient grandes ou petites, de proposer ces règles. C'est aux responsables politiques élus démocratiquement dans le monde démocratique de le faire», a affirmé M. Clegg.
Mais les voix appelant au démantèlement de ces géants devenus surpuissants se multiplient. Chris Hughes, l'un des cofondateurs de Facebook avec Mark Zuckerberg il y a quinze ans dans un dortoir de l'université de Harvard, s'en est même fait le porte-voix.
«Il est temps de démanteler Facebook» en séparant le réseau social, son activité originelle, des applications Instagram et WhatsApp, a-t-il écrit tout de go dans le New York Times début mai, accusant M. Zuckerberg d'avoir sacrifié la protection de la vie privée des utilisateurs au profit du «clic» et d'avoir éliminé la concurrence sans état d'âme.
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