PrévoyanceFaciliter l'accès à la prévoyance privée
ATS
11.4.2019 - 09:30
Un accès facilité au 3e pilier pourrait permettre de mieux combler les «trous de cotisations» dus aux aléas de la vie et de bénéficier d'une vieillesse plus confortable, suggère une étude de Credit Suisse. Les femmes notamment auraient plus de marge de manoeuvre.
Environ 55% des salariés suisses cotisent régulièrement au 3e pilier (prévoyance privée 3a), une épargne déductible des impôts qui complète, de façon facultative, le 1er pilier (AVS) et la prévoyance professionnelle obligatoire (2e pilier), selon les chiffres officiels de 2015 mis en lumière jeudi par Credit Suisse.
Les femmes (51% de cotisantes régulières) sont sous-représentées par rapport aux hommes (58%). Mais à conditions comparables (niveau de revenu, situation familiale), elles sont davantage enclines à cotiser.
«La probabilité qu'une femme, à situation égale, cotise régulièrement au 3e pilier est 14% plus élevée que pour les hommes», note Credit Suisse. Mais souvent elles y renoncent, pour des raisons financières. L'enquête suisse sur la population active (ESPA) de l'Office fédéral de la statistique a montré par exemple qu'en 2015, le revenu brut annuel médian des femmes interrogées sur leurs habitudes de prévoyance privée était 35% plus bas que celui des hommes (51'600 francs contre 79'730).
Une partie de la différence, note Credit Suisse, s'explique par un taux d'occupation nettement plus faible: 59% des femmes travaillent à temps partiel, contre 17,5% des hommes (chiffres 2017). A cela s'ajoutent des interruptions de revenus plus fréquentes, dues par exemple à la mise au monde et à l'éducation des enfants.
Romands moins prévoyants
De nettes différences de comportement apparaissent par ailleurs en fonction de la culture et de la géographie. Romands et Tessinois sont nettement moins portés sur la prévoyance privée que les Alémaniques. La différence va parfois quasiment du simple au double.
Ainsi, parmi les couples mariés disposant d'un double revenu et avec enfants, le versement annuel moyen par personne salariée au 3e pilier se situait à 1721 francs à Genève et 1886 francs à Bellinzone en 2015, contre 3314 francs à Stans (Nidwald) ou 3291 francs à Soleure.
En moyenne suisse, il atteignait 2870 francs. Cela reste loin du montant maximal déductible des impôts, fixé à environ 6800 francs. Un potentiel important «de progression» existe donc du côté des familles, mais aussi chez les jeunes célibataires ou parmi les mères divorcées.
Ces deux catégories, pour des raisons qui diffèrent – liées souvent à un manque de moyens chez les mères seules et plutôt à une forme d'«insouciance» chez les jeunes – sont relativement peu attirées par la prévoyance privée.
D'une façon générale, des revenus élevés ont tendance à accroître l'épargne au 3e pilier. Mais il reviendrait aussi, tant que faire se peut, aux salariés modestes ou/et faisant face à des «trous de cotisations» dans l'épargne obligatoire d'être prévoyantes, suggère l'étude. Les interruptions dans la carrière professionnelle peuvent avoir de lourdes conséquences sur les rentes du 1er et du 2e pilier. En outre, la tendance à la baisse du taux de conversion dans la partie surobligatoire du 2e pilier peut précariser les retraités.
Le 3e pilier a «gagné en importance de façon significative» ces 20 dernières années, observe l'étude. Fin 2017, les fonds déposés totalisaient 117 milliards de francs (près de 3% de plus qu'en 2016).
Credit Suisse brosse trois scénarios pour renforcer le 3e pilier: augmenter le montant annuel maximal déductible des impôts (actuellement de 6826 francs pour les salariés, 34'128 francs pour les indépendants), autoriser l'accès au 3e pilier aux personnes non actives et la possibilité d'effectuer des versements rétroactifs. Ceux-ci pourraient par exemple être faits en période de «prospérité financière» pour «rattraper» les cotisations qui n'auraient pas pu être versées plus tôt.
Un tel modèle rétroactif pourrait être souhaitable pour les personnes ayant suivi une formation continue – donc interrompu leur carrière – ou les femmes, par exemple, note l'étude. Le manque à gagner fiscal pour l'Etat serait à mettre en balance avec l'amélioration de la situation financière des retraités concernés.
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