Politique monétaire La BNS devrait encore serrer la vis avant de marquer une pause

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15.9.2023 - 10:50

La Banque nationale suisse (BNS) devrait encore augmenter son taux directeur lors de sa prochaine réunion, avant de marquer une pause dans sa phase de resserrement monétaire. Mais si l'inflation semble pour l'heure maîtrisée grâce aux interventions de la banque centrale, elle risque de repartir à la hausse en fin d'année en raison de l'accélération des loyers et des prix de l'énergie.

La plupart des économistes s'attendent à ce que l'institut d'émission helvétique, dirigé par Thomas Jordan, augmente le 21 septembre son taux directeur de 25 points de base pour le porter à 2,0%.
La plupart des économistes s'attendent à ce que l'institut d'émission helvétique, dirigé par Thomas Jordan, augmente le 21 septembre son taux directeur de 25 points de base pour le porter à 2,0%.
KEYSTONE/ANTHONY ANEX

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La plupart des économistes s'attendent à ce que l'institut d'émission helvétique, dirigé par Thomas Jordan, augmente le 21 septembre son taux directeur de 25 points de base pour le porter à 2,0%. Il s'agirait du sixième resserrement monétaire depuis juin 2022. La BNS avait alors mis fin à plus de sept ans de statu quo en relevant le taux à -0,25%.

A l'instar des autres banques centrales, la BNS a engagé une lutte contre l'envolée de l'inflation. Avec succès, puisque qu'après avoir culminé à 3,5% en août 2022, le renchérissement des prix est descendu un an plus tard à 1,6%, il est vrai aidé par la force du franc qui réduit le coût des produits importés.

Fin juin, Thomas Jordan avait déjà averti à la télévision alémanique SRF que le resserrement monétaire effectué ce même mois n'était «très probablement pas encore suffisant». Réagissant aux critiques estimant que la hausse du taux directeur faisait augmenter les loyers par le biais du taux hypothécaire de référence, le banquier central avait rappelé que «faute d'un resserrement de notre politique monétaire, l'inflation risquerait de perdurer, rendant inévitables des relèvements de taux bien plus importants par la suite».

Face à cette situation, Maxime Botteron de Credit Suisse anticipe que la BNS va augmenter son taux directeur jeudi prochain, avant de marquer une pause. Un relâchement monétaire n'est pas en vue avant le second semestre 2024.

Alessandro Bee d'UBS penche dans la même direction, estimant par contre que la Réserve fédérale (Fed) devrait avoir terminé son cycle de resserrement monétaire. La banque centrale américaine doit dévoiler mercredi prochain ses décisions en la matière, alors que l'inflation CPI a augmenté en août à 3,7% sur un an, contre 3,2% en juillet.

Inflation bien plus faible en Suisse

La Banque centrale européenne (BCE) a quant à elle décidé jeudi dernier de relever son taux de référence de 0,25 point à 4,5%, au plus haut niveau de son histoire, face à une inflation stable en août à 5,3% sur un an dans la zone euro.

En Suisse, l'indice des prix à la consommation est bien plus bas, à 1,6% en août sur un an, «mais la moitié des baux locatifs connaîtront des hausses» d'ici fin 2023, a averti Arthur Jurus. Selon le responsable des investissements d'Oddo BHF Suisse, «l'inflation renouera avec les 2% d'ici la fin d'année», raison pour laquelle la BNS devrait serrer jeudi prochain la vis monétaire.

«Le plafond du taux de la BNS sera probablement de 2%. Pour cet outil, la fin du durcissement monétaire est donc proche», a ajouté M. Jurus, estimant que de nouvelles hausses du taux de référence hypothécaire ne doivent pas être exclues en décembre ou début 2024. Ce qui fera repartir l'inflation. «Les loyers représentent 18% des dépenses moyennes d'un ménage suisse. Nous anticipons 3% à 8% de hausse des loyers pour la moitié des baux locatifs, ce qui représente une contribution additionnelle à l'inflation entre 0,3 et 0,7 point d'inflation en 2024», a-t-il calculé.

Karsten Junius de J. Safra Sarasin est quant à lui plus prudent. L'économiste en chef de la banque privée ne s'attend pas à un relèvement monétaire de la part de la BNS. Cette dernière «a accompli ce que de nombreuses banques centrales souhaitent faire», c'est-à-dire de juguler l'inflation, même si elle a été soutenue par la force du franc et la faible progression des salaires, a-t-il estimé.

La partie n'est cependant pas gagnée. En août, le taux d'inflation s'est certes inscrit dans la fourchette visée par la BNS, soit entre 0% et 2%, mais cela ne devrait pas durer en raison de la pression induite par la hausse des loyers et les prix de l'énergie, a prévenu M. Junius.