Fin de Mühleberg Arrêt définitif de Mühleberg 

ATS

20.12.2019 - 21:02

Mühleberg a vécu. A 12h30, un collaborateur du groupe BKW a appuyé simultanément sur deux boutons, mettant ainsi hors service l'une des plus anciennes centrales nucléaires du monde.
Mühleberg a vécu. A 12h30, un collaborateur du groupe BKW a appuyé simultanément sur deux boutons, mettant ainsi hors service l'une des plus anciennes centrales nucléaires du monde.
Source: KEYSTONE/PK

Une page de l'énergie nucléaire s'est tournée vendredi en Suisse avec l'arrêt définitif de la centrale nucléaire de Mühleberg (BE) après 47 ans d'activité. Les travaux de démantèlement vont durer 15 ans. Cette opération est une première en Suisse.

Un technicien du groupe BKW a appuyé à 12h30 simultanément sur deux boutons dans la salle des commandes. La réaction en chaîne nucléaire s'est arrêtée après environ 3 secondes, entraînant la désactivation du réacteur. L'une des plus veilles centrales nucléaires au monde est désormais hors service.

La première des deux turbines a été déconnectée du réseau dans la nuit de jeudi à vendredi. La seconde turbine a été débranchée peu après midi. Le fonctionnement de puissance a été définitivement arrêté lorsque la dernière barre de commande a été déplacée entre les éléments combustibles à 12h30.

Centrale nucléaire de Mühleberg : Trois, deux, un ... éteint !

«Travail de pionnier»

«L'arrêt de Mühleberg est un travail de pionnier pour l'exploitant, l'administration et les autorités», a souligné la directrice générale de BKW Suzanne Thoma en évoquant une journée particulière. «Nous avions prévu cet événement depuis six ans», a ajouté le président du conseil d'administration du groupe bernois Urs Gasche.

Le conseil d'administration avait annoncé en 2013 la fermeture de la centrale de Mühleberg. L'exploitant bernois jugeait trop élevé le coût des investissements nécessaires pour répondre aux exigences de l'Inspection fédérale de la sécurité nucléaire (IFSN) pour continuer d'exploiter Mühleberg.

Début des travaux

Les travaux de désaffectation de la centrale vont durer 15 ans. «Une ère s'achève mais une nouvelle page s'ouvre le 6 janvier» a indiqué Stefan Klute, chef du projet de désaffectation de la centrale. Au total, le démantèlement de l'installation nucléaire des bords de l'Aar va générer quelque 200'000 tonnes de déchets.

Une fois le réacteur éteint, les barres d'uranium seront stockés dans un bassin de désaffectation. L'eau permettra de refroidir les combustibles qui continueront d'émettre de la chaleur. Ces éléments nucléaires seront retirés du site en 2024 pour être entreposés au dépôt intermédiaire du Zwilag.

La radioactivité sera éliminée en 2031. Une éventuelle réaffectation du site n'est pas prévue avant 2034. Ce terrain, propriété du groupe BKW, pourrait accueillir des activités industrielles. Mais pour le moment aucune décision n'a été prise.

Coût de 3 milliards

Le groupe énergétique bernois réalisera l'essentiel des travaux avec son propre personnel. Pour des tâches hautement spécialisées, BKW fera appel à des experts au bénéfice d'une expérience dans le domaine du démantèlement de centrales à l'échelon international.

Le financement de la désaffectation, de l'évacuation ainsi que de la gestion des déchets radioactifs est assuré. BKW assumera la totalité des coûts, soit 3 milliards de francs, dont 80% sont déjà couverts. Les 20% restants le seront par d'autres contributions aux fonds de désaffectation et de gestion des déchets radioactifs de la Confédération et par le revenu des investissements.

Approvisionnement assuré

Malgré l'arrêt de Mühleberg, la Suisse ne craint pas une rupture de l'approvisionnement de courant. La centrale représentait le quart de la production d'électricité de BKW mais seulement 5% du besoin national d'électricité.

A court terme, ces 5% manquants sont compensés par des importations d'électricité de l'étranger ou par une hausse de production des centrales électriques. A plus long terme, il faudra augmenter la capacité des lignes à très haute tension entre Bassecourt (JU) et Mühleberg.

Satisfaction des antinucléaires

Mise en service en novembre 1972, Mühleberg a toujours été dans le collimateur des mouvements antinucléaires. Greenpeace a dénoncé régulièrement les incidents survenus à la centrale, les risques en cas de séisme ou d'inondation majeure. L'ONG écologiste a aussi mené des actions pacifiques et soutenu des procédures judiciaires.

Greenpeace a qualifié de succès historique l'arrêt de Mühleberg. «Le démantèlement de la centrale nucléaire va rendre la Suisse un peu plus sûre», a commenté Florian Kasser, expert de l'ONG pour les questions liées au nucléaire. Mais il rappelle que la question du stockage des éléments radioactifs n'est pas résolue.

L'organisation écologiste appelle le pouvoir politique à exiger une planification de l'arrêt des quatre autres installations nucléaires. A Berne, des élus fédéraux Verts ont brandi des pancartes avec l'inscription «Après Mühleberg, Ciao Beznau».

Une centaine de militants écologistes et antinucléaires s'étaient rassemblés devant le siège des BKW à Berne pour célébrer cet évènement. En soirée, une grande fête a eu lieu au centre autonome de la Reithalle.

Dans le camp opposé, Swissnuclear estime que la déconnexion de Mühleberg constitue une perte majeure pour l'approvisionnement électrique en Suisse. L'association professionnelle des exploitants des centrales nucléaires suisses relève que la dépendance de la Suisse vis-à-vis des importations de l'étranger augmentera.

Quatre centrales en activité

Quatre autres centrales nucléaires continuent de fonctionner en Suisse: Beznau 1, Beznau 2 et Leibstadt dans le canton d'Argovie, et Gösgen dans le canton de Soleure. Beznau 1, mise en service en 1969, est la plus ancienne centrale nucléaire au monde.

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