Politique monétaireLa Fed baisse les taux d'intérêt de 0,25%
ATS
31.7.2019 - 23:37
La Banque centrale américaine, sous la pression constante de Donald Trump pour stimuler l'économie, a réduit ses taux d'intérêt pour la première fois en 11 ans mercredi. Mais elle a eu du mal à justifier cette décision alors que l'économie américaine se porte bien.
Le patron de l'institut d'émission, Jerome Powell, a expliqué que la banque prenait une «assurance» sur l'avenir face aux «incertitudes» pesant sur l'économie mondiale mais aussi la faiblesse «persistante de l'inflation». La Fed a réduit les taux directeurs d'un quart de point de pourcentage pour les fixer dans la fourchette de 2% à 2,25%.
Donald Trump, qui mardi encore avait réclamé une baisse des taux «forte», a très vite réagi dans un tweet à la décision de la Fed qu'il ne trouve pas satisfaisante. «Powell nous a encore déçus comme d'habitude», a affirmé M. Trump mercredi. «Ce que les marchés voulaient entendre de Jay Powell (...) était que c'était le début d'un long cycle agressif de baisses des taux pour pouvoir rivaliser avec la Chine et l'Europe (...)«, a-t-il ajouté.
Pour sa part, M. Powell s'est défendu lors d'une conférence de presse d'avoir cédé à la pression de la Maison Blanche. «Nous ne prenons jamais en compte les considérations politiques. Nous ne menons pas une politique monétaire en vue de prouver notre indépendance», a-t-il déclaré. Le Comité monétaire a laissé la porte ouverte à un nouveau geste affirmant qu'il agirait de «manière appropriée pour soutenir la croissance».
Confusion
Mais sur ce point, M. Powell a semé un peu la confusion en affirmant à la fois que la Fed n'abordait pas «un long cycle» de baisses et en soulignant ensuite que d'autres réductions n'étaient pas exclues. A Wall Street, le Dow Jones a perdu jusqu'à près de 500 points en séance, les investisseurs affichant leur déception quant à des baisses ultérieures.
D'une façon générale, la bourse apprécie les baisses des taux d'intérêt car les actions deviennent plus rémunératrices que les obligations. La Fed avait resserré le loyer de l'argent quatre fois l'année dernière mais elle considère maintenant que la faiblesse de la croissance mondiale et que l'inflation résolument basse exigent une politique monétaire plus accommodante.
Si la politique monétaire a changé, la perception qu'a le Comité monétaire de la conjoncture américaine et mondiale a peu évolué par rapport à la dernière réunion il y a six semaines, si l'on compare les deux communiqués publiés à l'issue de ces réunions.
M. Powell a même décrit une économie «proche de ce que l'on souhaite». «Les perspectives sont aussi bonnes», a-t-il assuré suscitant alors plusieurs questions de journalistes sur les raisons qui ont poussé la Fed à baisser les taux, une mesure destinée en général à juguler un ralentissement économique.
Comité monétaire divisé
La Réserve fédérale a aussi décidé d'arrêter, deux mois plus tôt que prévu, la réduction de son bilan et le délestage des bons du Trésor qu'elle détient. Cette diminution de ses investissements dans les obligations d'Etat avait pour effet implicite de tirer légèrement les taux d'intérêt à la hausse, ce qui irritait notamment le président Donald Trump, prompt à se plaindre du renchérissement du coût du crédit.
Tout en défendant son indépendance, la Fed agit finalement dans le sens de ce que n'a cessé de réclamer le président Trump. Le locataire de la Maison Blanche, qui brigue un deuxième mandat, veut des taux bas qui favorisent le consommateur, diminuent le coût de la dette et dopent le Dow Jones à Wall Street.
La décision de la Fed n'a pas fait l'unanimité au sein du Comité monétaire. Deux membres de la Fed se sont prononcés contre la décision, Esther George de la Fed de Kansas City et Eric Rosengren de celle de Boston. Ils auraient préféré maintenir les taux en l'état. C'est la première fois, depuis que Jerome Powell est à la tête de l'institution depuis début 2018, que le Comité monétaire est si divisé.
Croissance solide
Si l'inflation est stagnante à 1,4%, la croissance de l'économie américaine est encore solide à 2,1% au 2e trimestre et le taux de chômage est proche de son plus bas niveau depuis cinquante ans (3,7%). Onze ans après la crise financière, la Banque centrale américaine rejoint ainsi les autres grandes banques centrales du monde dans leur politique accommodante.
La Banque centrale européenne, qui a maintenu les taux à zéro, a ouvert la voie la semaine dernière à une série de remèdes anti-crise, allant d'une ou plusieurs baisses de ses taux à une possible reprise de ses rachats de dette, en brossant un tableau sombre des perspectives économiques en zone euro.
Wall Street a terminé en fort recul (-1,23%) après que M. Powell eut écarté l'idée d'un cycle régulier de baisses après celle de mercredi. Le dollar a grimpé, l'euro tombant sous le seuil symbolique de 1,11 dollar pour la première fois depuis 2017.
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