BlanchimentLa mafia bulgare a «soigneusement sélectionné» Credit suisse
aula, ats
23.2.2022 - 11:34
Le Ministère public a débuté mercredi son réquisitoire dans le procès de Credit suisse et quatre coaccusés pour blanchiment devant le Tribunal pénal fédéral. Il a souligné que le réseau de trafiquants de cocaïne bulgares avait «soigneusement sélectionné» la banque.
aula, ats
23.02.2022, 11:34
23.02.2022, 11:38
ATS
Le procureur fédéral Luc Leimgruber a ouvert les feux par une violente charge contre Credit suisse. En 2004, lorsque la banque a noué des relations avec le réseau, son boss Evelin Banev trainait déjà une réputation sulfureuse. «Entre 2005 et 2006 uniquement, 18,8 tonnes de cocaïne ont été saisies, pour un profit de 30 millions de dollars par tonne. Or le cas grave est réalisé en Suisse dès 18 grammes.»
L'enquête menée par la justice bulgare a établi que le réseau avait «sélectionné soigneusement» Credit suisse et une banque autrichienne, a précisé le procureur. Ces établissements comptaient des Bulgares parmi leurs collaborateurs et avaient la réputation de ne pas contrôler l'origine des fonds.
«Au-dessus des lois»
«Credit suisse, comme le montrent encore des affaires récentes, semble se sentir au-dessus des lois de notre pays», a lancé Luc Leimgruber. La facilité avec laquelle des comptes ont été ouverts et une société créée pour blanchir et transférer les fonds des Bulgares à l'étranger est «déconcertante».
L'accusateur a passé ensuite en revue les activités du réseau dans les différents pays, Bulgarie, Espagne, Italie, Roumanie, et les condamnations prononcées. Le Ministère public de la Confédération (MPC) ne s'est pas basé uniquement sur ces procédures, mais aussi sur les investigations menées en Suisse et les informations obtenues à l'étranger par le biais de l'entraide judiciaire.
La valise de billets
En 1989, lors de l'adoption de l'article du Code pénal réprimant le blanchiment, l'image du messager arrivant en Suisse avec une valise de billets a été présentée comme caricaturale, a souligné Alice de Chambrier en prenant le relais de l'accusation. Or Credit suisse s'est accommodé encore de cette pratique 25 ans plus tard, y ajoutant la technique «back-to-back» (restitution de bénéfices acquis légalement).
Pour la procureure, la banque et son ex-employée, également accusée, ont non seulement pratiqué le blanchiment mais elles ont aussi entravé l'action de la justice. «Aujourd'hui, elles nient l'évidence et n'expriment aucun remords.»
«Nous ne sommes pas des policiers et nous devons faire confiance à nos clients.» La magistrate a rappelé cette déclaration de cette femme et l'a présentée comme révélatrice de son état d'esprit dans son activité au sein de la banque.
Le procès de Credit suisse s'est ouvert il y a deux semaines et demie devant la Cour des affaires pénales. Deux Bulgares et un banquier suisse comparaissent aux côtés de la banque et de son ex-collaboratrice. Tous les accusés répondent de blanchiment aggravé et certains de participation ou soutien à une organisation criminelle.
Le Tribunal pénal fédéral doit siéger jusqu'à fin février.