La Banque centrale turque a relevé jeudi son taux directeur pour le sixième mois consécutif, à 40%, au plus haut depuis l'arrivée au pouvoir de Recep Tayyip Erdogan.
Keystone-SDA, afp
23.11.2023, 12:25
23.11.2023, 13:25
ATS
La Banque a relevé son taux de cinq points comparé au mois dernier et explique, dans un communiqué, que le niveau du resserrement monétaire est «très proche du niveau requis pour établir le cap de la désinflation. En conséquence, le rythme du resserrement monétaire ralentira et le cycle de resserrement s'achèvera dans un court laps de temps».
«Le resserrement monétaire sera maintenu aussi longtemps que nécessaire pour garantir une stabilité durable des prix», ajoute la Banque centrale.
Depuis les élections de mai et la reconduction au pouvoir du président Erdogan, la nouvelle équipe à la tête de la Banque centrale et du ministère de l'Economie a fait remonter le taux directeur de 8,5 à 40% afin de tenter de réduire l'inflation qui a atteint le mois dernier 61,36%, selon les statistiques officielles.
Les économistes s'attendent à ce que les taux restent élevés au moins jusqu'à la fin du premier semestre l'année prochaine.
La nécessité de relever les taux au plus haut niveau depuis l'arrivée au pouvoir de Recep Tayyip Erdogan en 2002 indique, selon les économistes, la profondeur de la crise dans laquelle le pays est plongé à la suite des politiques menées par le chef de l'Etat turc.
M. Erdogan a longtemps défendu, à contre-courant des théories orthodoxes, que les taux d'intérêt élevés étaient à l'origine de l'inflation.
Crise profonde
Le président turc a été réélu en mai dernier en s'engageant durant sa campagne à ne jamais autoriser la Banque centrale à relever son taux directeur tant qu'il serait au pouvoir.
Il a cependant changé de cap, en nommant une nouvelle équipe d'économistes respectés, formés à Wall Street et dans le privé, chargés de sortir la Turquie de la crise qui altère gravement le quotidien des Turcs.
Le taux d'inflation annuel officiel de la Turquie a culminé à 85 pour cent en octobre dernier puis, après une nette réduction durant la campagne, a de nouveau bondi à 61% en octobre.
La Turquie s'est enfoncée dans la crise il y a deux ans, quand le président a ordonné à la Banque centrale, théoriquement indépendante, de réduire son taux directeur, suscitant une flambée de l'inflation.
La livre turque s'est rapidement effondrée quand les Turcs, pour tenter de sauver leurs économies, ont commencé à acheter des dollars et de l'or afin de se prémunir contre de nouveaux chocs économiques.
La Banque centrale aurait, selon les estimations, dépensé plus de 200 milliards de dollars pour tenter de soutenir la livre turque au cours des deux dernières années.
«Cercle vertueux»
Les nouveaux responsables de l'économie, le ministre des Finances, Mehmet Simsek, et le gouverneur de la Banque centrale, Hafize Gaye Erkan, ont tenté de rééquilibrer l'économie avec des solutions conventionnelles visant à atténuer la crise du coût de la vie et à mobiliser le soutien des investisseurs étrangers.
Le chef de l'Etat a déclaré cette semaine que l'économie turque pourrait bientôt «entrer dans un cercle vertueux» de désinflation, permettant à la livre turque de gagner de la valeur.
«Il y a une forte probabilité que la livre turque prenne de la valeur en termes réels», a-t-il affirmé.
«Nous gagnerons la confiance des investisseurs grâce à nos politiques judicieuses et à nos réformes structurelles.»