0,5% ? Comptes d'épargne : il faudra prendre son mal en patience

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17.11.2022 - 11:05

Les détenteurs de comptes d'épargne devront encore prendre leur mal en patience. Malgré les récentes hausses du taux directeur par la Banque nationale suisse (BNS), une augmentation de la rémunération des carnets d'épargne n'interviendra pas avant l'année prochaine. Et elle risque d'être réduite à peau de chagrin par l'inflation.

Bundles of bank notes of 1000 Swiss Francs at the bank vault of the "Zuercher Kantonalbank" bank, pictured on August 9, 2011 in Zurich, Switzerland. (KEYSTONE/Martin Ruetschi)
Bundles of bank notes of 1000 Swiss Francs at the bank vault of the "Zuercher Kantonalbank" bank, pictured on August 9, 2011 in Zurich, Switzerland. (KEYSTONE/Martin Ruetschi)
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Au début des années 1990, les épargnants suisses profitaient encore d'un taux d'intérêt supérieur à 5%. Mais depuis cette date, la rémunération de leurs avoirs n'a cessé de reculer, selon les statistiques de la BNS. En 2003, elle était tombée pour la première fois sous la barre de 1% et en 2015 sous 0,1% pour naviguer ces dernières années en moyenne autour de zéro.

Banques : 4 exceptions

Après une longue période de politique monétaire expansionniste et une inflation négative, l'institut d'émission a relevé pour la première fois en juin son taux directeur pour lutter contre l'envolée des prix. Ce dernier est passé en septembre à 0,5%, mettant un terme à environ sept ans de taux négatifs.

Jusqu'à présent, les banques ont dans l'ensemble mis fin aux taux négatifs qu'elles appliquaient aux dépôts des grandes fortunes et investisseurs institutionnels, mais très peu ont relevé les taux des comptes d'épargne.

Parmi les rares exceptions figurent la Banque Migros, qui a relevé son taux de 0,01% à 0,2% sur les comptes d'épargne. D'autres banques ont suivi, parmi lesquelles la néo-banque Yuh et Valiant, ainsi que les banques cantonales d'Obwald et de Zoug.

Le plus grand établissement cantonal de Suisse, la Banque cantonale de Zurich (ZKB), avait récemment déclaré attendre les prochaines décisions de la BNS en décembre.

La situation en Romandie

Côté romand, la Banque cantonale de Genève (BCGE) propose des taux d'épargne entre 0,01% et jusqu'à 2%, sous condition. L'établissement «procède à des révisions permanentes de ses conditions d'intérêt», a indiqué un porte-parole à l'agence AWP, sans plus de précision.

A la Banque cantonale vaudoise (BCV), ce taux oscille entre 0% et 0,5% pour les jeunes et dans une certaine limite. «Ces rémunérations sont susceptibles d'être adaptées en fonction de l'évolution des taux d'intérêts et de la situation sur le marché», selon la banque.

La situation est similaire pour les géants du secteur, UBS et Credit Suisse, dont les taux d'intérêt sur les comptes d'épargne classiques évoluent autour de 0%. Alors que le premier ne commente pas la situation à l'avenir, un porte-parole de la banque aux deux voiles a indiqué suivre «en permanence l'évolution du marché et des ajustements à court terme des conditions d'intérêts sont toujours possibles».

Pas d'effet direct

Pour l'heure, la situation semble figée. A la BNS, le nouveau vice-président Martin Schlegel avait récemment indiqué au journal Finanz und Wirtschaft que «la fixation des taux et des prix est l'affaire des banques», renvoyant à la concurrence entre établissements et à la réaction des clients. «Ce processus prend du temps», avait-il averti.

«Il faut un certain temps pour que la hausse des taux directeurs se répercute sur les comptes d'épargne», a précisé à AWP Alexis Körber, économiste à l'institut BAK Economics. Selon ce dernier, «les banques vont suivre avec les taux, mais cela ne se fera pas directement».

Dans une récente étude, les spécialistes d'UBS ont rappelé que lors des deux derniers cycles de resserrement monétaire, une hausse des taux directeurs de 2,5% s'est traduite par un relèvement de seulement 0,5 point de pourcentage des taux sur les comptes d'épargne.

Une augmentation à 0,5% des taux, «mais en nominal»

«Les banques essaient actuellement de retarder une augmentation» de la rémunération de ces comptes, a complété Tobias Straumann. Le professeur d'histoire et d'économie moderne à l'université de Zurich s'attend à une hausse l'année prochaine, mais entretemps l'inflation devrait encore accélérer, réduisant à néant d'éventuels ajustements.

Selon M. Straumann, «les taux nominaux (non ajustés de l'inflation) vont progresser, mais rester négatifs au niveau réel (hausse des prix incluse)».

Alexis Körber s'attend pour sa part à ce que la BNS augmente son taux d'ici la fin du premier trimestre 2023 pour ensuite marquer une pause. Mais parallèlement, l'inflation devrait atteindre environ 3% fin 2022, avant de ralentir à 1,7% d'ici la fin de l'année suivante.

L'économiste de BAK Economics table ainsi sur une augmentation à 0,5% des taux sur les comptes d'épargne courant 2023, «mais en nominal». En termes réels, les taux vont rester négatifs, ont averti MM. Körber et Straumann.