Vente finalisée Paris Match passe d'un milliardaire à l'autre

ATS

1.10.2024 - 10:58

Le poids des mots, le choc des photos et une vente à 120 millions d'euros: le célèbre magazine français Paris Match passe mardi des mains du magnat conservateur Vincent Bolloré à celles du milliardaire Bernard Arnault, propriétaire du groupe de luxe LVMH.

A 75 ans, ce titre emblématique du photojournalisme, dont le slogan a longtemps été «le poids des mots, le choc des photos», mêle grands reportages de guerre et immersion dans l'intimité des stars et des politiques.
A 75 ans, ce titre emblématique du photojournalisme, dont le slogan a longtemps été «le poids des mots, le choc des photos», mêle grands reportages de guerre et immersion dans l'intimité des stars et des politiques.
imago images/Manfred Segerer

Ce 1er octobre marque la finalisation de cette vente, annoncée à la surprise générale au mois de février par le groupe Lagardère.

Ce dernier a été avalé fin 2023 par Vivendi (propriétaire de Canal+, Prisma Media, Gameloft, Havas), le groupe de Vincent Bolloré, un dirigeant accusé d'ingérences dans la ligne éditoriale de l'hebdomadaire à plusieurs reprises ces dernières années.

La vente de Match est «un peu un crève-coeur», mais «c'est une offre qui ne peut pas ne pas se regarder», avait commenté en avril Arnaud Lagardère, PDG de l'entreprise qui porte son nom.

A 75 ans, ce titre emblématique du photojournalisme, dont le slogan a longtemps été «le poids des mots, le choc des photos», mêle grands reportages de guerre et immersion dans l'intimité des stars et des politiques. Il s'écoule toujours à plus de 440'000 exemplaires chaque semaine.

Sa cession participe à la stratégie de désendettement de Lagardère, tout en scellant l'entente entre Vincent Bolloré et Bernard Arnault, qui le convoitait de longue date.

«Une libération»

Sollicité par l'AFP, LVMH (Guerlain, Dior, Chaumet, Berluti, Moët et Hennessy...), déjà propriétaire de deux quotidiens, le Parisien et le journal économique Les Échos, ne souhaite pas détailler ses projets pour le magazine dans l'immédiat.

«Paris Match sera géré à part du groupe Les Échos-Le Parisien», a seulement indiqué le PDG de ce dernier, Pierre Louette, en septembre au quotidien conservateur le Figaro. Il «bénéficiera d'une entité juridique différente et d'une véritable autonomie, tout en bénéficiant du soutien de notre régie et de la diffusion».

Il y a une «envie de refaire le Paris Match de la grande époque» et «donc de réembaucher» après les nombreux départs survenus ces dernières années, rapporte à l'AFP un journaliste de l'hebdomadaire souhaitant rester anonyme.

Mais «on n'a pas encore de stratégie éditoriale énoncée très clairement». La rédaction a d'ailleurs été conviée à une réunion mardi.

Dirigée par Jérôme Béglé et située au siège parisien de Lagardère News comme celle du Journal du Dimanche (JDD) ou de la radio Europe 1, la rédaction de Paris Match déménagera en 2025 «dans de nouveaux locaux dans Paris», selon un message interne consulté par l'AFP.

Selon un journaliste interrogé par l'AFP, «c'est plutôt une libération pour la rédaction» de quitter la sphère des médias Bolloré, régulièrement accusés par la gauche de promouvoir des idées d'extrême droite.

Et de citer la multiplication ces «trois-quatre derniers mois» de Unes consacrées à la religion catholique chère au milliardaire, en dehors de «l'ADN de Paris Match».

L'édition du 19 septembre était ainsi dédiée à une communauté de soeurs porteuses d'une trisomie et celle du 14 août à la Vierge Marie.

Liste noire

Paroxysme des secousses traversées par le magazine, sa société des journalistes (SDJ), garante du respect des règles déontologiques, s'est sabordée en début d'année.

A l'été 2022, elle s'était indignée d'une «une» consacrée au cardinal ultra-conservateur Robert Sarah, puis du licenciement du rédacteur en chef politique et économie de Paris Match Bruno Jeudy, remplacé par la figure de la chaîne CNews Laurence Ferrari.

Cette dernière préside désormais les marques JDD et JDNews, un nouvel hebdomadaire d'actualité lancé en septembre.

Moins redouté que Vincent Bolloré, Bernard Arnault fait aussi l'objet de critiques concernant son rapport à la liberté de la presse. Selon la publication spécialisée La Lettre, le milliardaire a notamment formulé aux cadres de LVMH une «interdiction absolue de parler» à sept médias, une liste noire contre laquelle ont protesté lundi une quarantaine de rédactions.