30 ans de la prise d'otages de Gladbeck: Prise d'otages de Gladbeck: quand les ravisseurs deviennent des stars

DPA

17.8.2018

Des scènes dignes d'un épisode de série policière: mais ici, les otages étaient bien réels et les pistolets des gangsters bien chargés. La prise d'otages de Gladbeck, survenue il y a 30 ans, a tenu l'Allemagne entière en haleine pendant 54 heures et a coûté la vie à trois personnes.

Il y a 30 ans, là où Brigitte Gräber vend aujourd'hui des roses au sein de sa boutique de fleurs «Grüne Oase», débutait un des crimes les plus spectaculaires de l'Allemagne d'après-guerre: la prise d'otage de Gladbeck. Le matin du 16 août 1988, la ville allemande de Gladbeck, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, ne savait pas encore qu'elle allait vivre 54 heures de désespoir, de sensationnalisme et de défaillances médiatiques et policières.

Armés de pistolets mitrailleurs, Hans-Jürgen Rösner (31 ans à l'époque) et Dieter Degowski (32 ans à l'époque) viennent d'attaquer une agence de la Deutsche Bank située dans le quartier de Rentfort-Nord et ont pris deux employés en otages. Peu de temps après, la police encercle l'agence et les gangsters donnent leur première interview téléphonique.

La boutique «Grüne Oase», dans laquelle se trouvait autrefois l'agence bancaire, se situe au coin d'une galerie marchande délabrée du «Geschäftszentrum Nord». Avant, il y avait de nombreux magasins sur place, mais la plupart sont vides aujourd'hui. L'agence bancaire a fermé ses portes juste après les faits.

Un policier en caleçon

«Il s'agit toujours du sol de l'époque», explique Brigitte Gräber (61 ans), conduisant le journaliste jusqu'à de petits clapets. «C'est ici que les câbles du terminal informatique passaient dans le sol.» Même les éléments du plafond et la double porte d'entrée datent encore de l'époque de la banque.

En face s'élève un grand immeuble de 13 étages entièrement vide, relié à la boutique par une cour intérieure — une immense ruine qui devrait bientôt être rasée. Une employée du magasin de fleurs raconte d'un ton hésitant qu'il y a 30 ans, elle vivait dans ce bâtiment.

De la fenêtre de son salon, cette dame, aujourd'hui âgée de 64 ans, pouvait voir la cour intérieure. «Nous avons entendu des voix fortes et nous sommes levés pour regarder.» Elle a vu de ses propres yeux un policier en caleçon placer la rançon demandée devant la porte d'entrée.

Ils ont pris la fuite en direction du nord

Bodo Wölk entre dans la boutique et achète une rose. L'homme de 67 ans habitait lui aussi dans le coin à l'époque. Il a suivi le drame à la télévision, «tout était retransmis en direct», raconte-t-il. «Nous vivions dans un appartement situé au bout de la rue, à côté du centre commercial, et avons suivi les événements depuis le balcon avec nos voisins.»

Lorsque dans la soirée, les deux gangsters ont pris la fuite avec leurs otages, «nous étions dehors et les avons vu passer. C'était dangereux. Ils étaient armés, après tout.» D'ailleurs, il connaissait les employés enlevés. «J'étais moi-même client de la banque.»

Toujours à Gladbeck, les gangsters embarquent leur complice Marion Löblich. Ils prennent la fuite en direction du nord, les journalistes et les policiers à leurs trousses. Les gangsters changeront à plusieurs reprises de véhicule avant de se poster à un arrêt de bus de Brême-Huckelriede et de détourner un bus de ligne avec 32 passagers à son bord. Cinq otages seront finalement relâchés dans la soirée.

Conversation avec des journalistes en pleine rue

Quelques heures plus tard, les employés de la banque finiront eux aussi par être libérés sur l'aire de repos de Grundbergsee. Alors que la police parvient à neutraliser et retient temporairement Marion Löblich, Dieter Degowski abat l'Italien Emanuele de Giorgi d'une balle dans la tête. En se rendant sur les lieux, une voiture de police est victime d'un accident. Le policier Ingo Hagen, 31 ans, trouve la mort et un de ses collègues est gravement blessé.

Tôt dans la matinée du jeudi, le bus traverse la frontière néerlandaise à hauteur de Bad Bentheim et s'arrête environ cinq kilomètres plus loin. Alors que les gangsters changent une nouvelle fois de véhicule, ils relâchent presque la totalité des otages. Seules deux jeunes femmes sont contraintes de poursuivre leur route avec le trio.

Les malfrats finiront par atteindre Cologne dans la matinée. Dans le cadre d'une conversation avec des journalistes en pleine rue, au beau milieu d'une zone piétonne, ils déclarent «être prêts à tout». À midi, ils quittent Cologne en direction de Francfort. L'un des journalistes fera même un petit bout de chemin avec eux. Le cauchemar prendra fin sur l'autoroute A3, à hauteur de Bad Honnef: peu avant 14 heures, la police parvient à emboutir leur véhicule.

Mémorial dédié à Silke Bischoff

S'ensuivra un échange de tirs. Au cours de la fusillade, la jeune Silke Bischoff, 18 ans, est abattue par Hans-Jürgen Rösner. Un site commémoratif dédié à la jeune femme a aujourd'hui été aménagé derrière la glissière de l'autoroute. À Brême, on prévoit également d'ouvrir un lieu de commémoration de la prise d'otages à la gare des bus d'Huckelriede.

Retransmises en direct, les interviews radio et télévisées des trois malfrats, qui étaient alors accompagnés de leurs otages, ont permis à la nation entière de suivre le drame. Avant cette prise d'otages, il y avait déjà eu en Allemagne un débat particulièrement animé sur les limites du devoir d'information des journalistes.

Par la suite, le Conseil de la presse décrétera l'interdiction d'interviewer les malfrats durant les événements. Ce qu'on reprochera surtout à la police, c'est de ne pas avoir mis un terme à la prise d'otages beaucoup plus tôt. Depuis, les autorités policières ont entièrement revu leur tactique d'intervention.

Un jeune homme de 15 ans «pas assez obéissant»

Le juge Rudolf Esders se souvient très bien de ce drame. C'est lui qui a présidé le procès pénal contre Hans-Jürgen Rösner, Dieter Degowski et Marion Löblich au tribunal régional d'Essen. Le juriste, aujourd'hui âgé de 78 ans, parle de ce procès, débuté en août 1989, comme s'il s'était clôturé il y a peu et non en mars 1991.

Il revient par exemple sur la mort d'Emanuele de Giorgi, qui, dans le bus, n'avait pas hésité à se placer devant sa sœur pour la protéger. «Dieter Degowski l'avait dans le collimateur, car il n'était pas assez obéissant.» Dieter Degowski a toujours dit qu'il avait agi par mégarde. Rudolf Esders ne l'a jamais cru: le coup de feu a été tiré à dix centimètres de distance. «Quand on a une arme en main, on se sent puissant et on a envie d'exprimer cette puissance. Le pouvoir a quelque chose d'attrayant.»

Affaire D.B. Cooper: l'identité de l'auteur enfin révélée?

Affaire Roswell: En 1947 un «OVNI» atterrissait aux États-Unis

Retour à la page d'accueil