Yvan Perrin ne s'est pas rendu coupable de discrimination raciale en maintenant sur son compte Facebook des commentaires litigieux de tiers. Le Tribunal de police de Neuchâtel n'a pas suivi mercredi le Ministère public et a acquitté l'ex-conseiller national UDC.
Entre le 4 et le 6 avril 2019, Yvan Perrin a publié sur son compte Facebook des commentaires à propos notamment du Musée des civilisations islamiques de La Chaux-de-Fonds. Il mettait ses publications en lien avec les Frères musulmans.
Lors de son audition devant le Tribunal de police du Littoral et du Val-de-Travers, Yvan Perrin a déclaré que ses commentaires visaient cette mouvance spécifique, considérée par certains comme une organisation terroriste, et pas les musulmans en général ou l'islam.
Pour le Ministère public, absent à l'audience, des débordements de langage étaient à prévoir compte tenu du sujet abordé. Il reprochait à l'ancien élu d'avoir maintenu sur son mur virtuel des commentaires de tiers appelant à la haine.
«On ne peut pas attribuer des propos de tiers à Monsieur Perrin», a estimé le juge Bastien Sandoz. Le magistrat estime que le prévenu n'a pas eu un comportement actif pour propager ces messages problématiques en les maintenant.
Pour le juge, il est délicat de prononcer une condamnation en l'état actuel de la législation pour n'avoir pas effacé des commentaires. «L'infraction par omission n'est pas retenue». Six auteurs de ces commentaires litigieux ont en revanche été eux condamnés par ordonnance pénale, a précisé Bastien Sandoz.
Commentaires litigieux
«J'assume totalement ce que j'écris mais la façon dont les gens peuvent le comprendre m'échappe», a déclaré le prévenu. L'ancien conseiller national a affirmé ne pas avoir sciemment maintenu des propos discutables pour les propager.
«Lorsque vous publiez une communication qui fait beaucoup réagir, vous n'arrivez pas à tout suivre. Je n'exclus donc pas que certains commentaires litigieux aient échappé à ma vigilance», a déclaré Yvan Perrin. Le citoyen de la Côte-aux-fées assure avoir effacé les «posts» problématiques qu'il a pu lire sur son compte.
Selon l'acte d'accusation, Yvan Perrin a également commenté l'existence d'une école musulmane près de Lyon avec ces mots: «l'infection s'étend». Ces propos faisaient allusion à un article du magazine français Marianne qui relatait l'influence sous laquelle se trouvait cette école.
Le juge relève qu'il n'y a pas dans ce cas précis de discrimination raciale, estimant que cette expression s'inscrit dans le cadre d'un débat politique et qu'elle ne vise pas à rabaisser un groupe de personnes ou une religion.
La défense fustige le procureur général
Dans sa plaidoirie, Jean-Luc Addor n'a pas mâché ses mots à l'égard du procureur général Pierre Aubert qui a renoncé à comparaître à l'audience. «Il n'y a pas de contradicteur», a affirmé le conseiller national (UDC/VS) qualifiant d'affront l'absence du magistrat et dénonçant un procès d'intention.
Sur le fond du dossier, Jean-Luc Addor estime que l'accusé qu'il a qualifié de «lanceur d'alerte» n'a pas commis d'atteinte à la paix publique. «Yvan Perrin est essentiellement accusé pour d'autres, pour des propos qui ne sont pas les siens», a ajouté l'avocat, réclamant l'acquittement de son client.
Le procureur général Pierre Aubert avait requis une peine de 90 jours-amende à 30 francs, soit 2700 francs, avec sursis pendant deux ans. Dans l'acte d'accusation, il affirme que l'accusé a propagé une «idéologie visant à dénigrer de façon systématique les musulmans en raison de leur appartenance religieuse».