Procès en Valais Alkopharma: prison avec sursis requise

ATS

27.9.2018 - 16:06

Le procès en appel s'est tenu jeudi matin au Tribunal cantonal du Valais à Sion (archives).
Le procès en appel s'est tenu jeudi matin au Tribunal cantonal du Valais à Sion (archives).
Source: KEYSTONE/CHRISTIAN MERZ

Les deux responsables de la société Alkopharma, qui comparaissaient jeudi devant le Tribunal cantonal du Valais pour avoir écoulé des médicaments périmés, risquent une peine privative de liberté avec sursis. La défense a dénoncé une affaire "disproportionnée".

La mise en danger de la santé des patients était au centre du procès en appel. Swissmedic affirme que la société Alkopharma s'en est rendu coupable en commercialisant des médicaments périmés entre 2007 et 2011, et a demandé une peine privative de liberté de 18 mois avec sursis de trois ans pour les deux prévenus, un Français de 65 ans et sa compatriote de 51 ans.

La teneur en principe actif d'un médicament peut être modifiée si ce dernier n'est pas conservé de manière adéquate. En l'occurrence, elle était réduite dans le Thiotepa périmé, utilisé dans le traitement de certains cancers.

"Il n'est pas nécessaire d'être oncologue pour savoir que si le dosage du médicament est réduit, l'efficacité l'est aussi. Les patients n'ont pas pu bénéficier d'un traitement tel que prévu par le médecin, et en cela, il y a eu mise en danger concrète", a affirmé l'autorité de surveillance du marché des médicaments.

Pas d'autorisation

Swissmedic reproche aussi au tribunal de Martigny de n'avoir retenu que trois lots de médicaments commercialisés avec des dates de péremption falsifiées alors que selon elle, il faut en retenir dix, dont trois prescrits. De plus, "le Thiotepa ne bénéficiait pas d'une autorisation de mise en marché en Suisse".

Pour Swissmedic, la peine infligée au directeur d'Alkopharma en première instance - une contravention pour négligence - n'est pas assez sévère. "Il avait une position de garant. Il a su, voulu et soutenu les agissements de sa collaboratrice. Il faut donc écarter la négligence pour retenir l'intention", a estimé Swissmedic.

Quant à la collaboratrice, responsable de la logistique d'Alkopharma, elle a, selon Swissmedic, fait tout ce qu'il fallait pour que personne ne découvre le pot aux roses. Swissmedic estime que les deux prévenus ont exercé leur activité coupable à la manière d'une profession et que le tribunal doit donc retenir l'action par métier, une circonstance aggravante.

"Personne n'a porté plainte"

Les avocats des deux prévenus ont dénoncé "le comportement disproportionné de Swissmedic dans cette affaire". Ils ont réfuté la mise en danger, rappelant que l'expertise française produite en première instance indique que le médicament Thiotepa "ne présentait pas de dégradation malgré le prolongement de la date de péremption" et que "la perte de principe actif n'avait pas modifié les effets thérapeutiques escomptés".

En Suisse, quelque 2000 doses non conformes ont été vendues, notamment à quatre établissements hospitaliers. Mais "où sont les victimes dans cette affaire, où sont les plaignants? Où sont les hôpitaux qui ont utilisé des lots périmés? Personne n'a porté plainte", a lancé la défense.

"Je présente mes excuses"

"Swissmedic s'est acharnée sur mon client qui a même été mis en détention provisoire. Tout ça pour aboutir à une contravention par négligence en première instance. Un camouflet pour l'autorité de surveillance!", a estimé l'avocat du directeur d'Alkopharma.

"Si l'affaire avait été traitée par un procureur et non par des fonctionnaires, il n'y aurait pas eu tout ce pataquès. Swissmedic essaie de sauver son honneur mais est de mauvaise foi et à un comportement déloyal ", a renchéri le défenseur de la prévenue.

Les avocats ont demandé au Tribunal cantonal (TC) de rejeter l'appel et de confirmer le jugement de première instance: Une amende de 5000 francs pour le directeur et une amende de 6500 francs et une peine pécuniaire de 50 jours-amende avec sursis de trois ans pour sa collaboratrice.

Des peines que Swissmedic veut alourdir si la mise en danger n'est pas retenue, soit respectivement 7200 francs d'amende et 180 jours-amende avec sursis et 6500 francs d'amende et 180 jours-amendes avec sursis.

Interrogée par le président du tribunal en début d'audience, la prévenue a dit regretter tous les jours les faits qui lui sont reprochés. "Ma vie et celle de ma fille sont foutues", a-t-elle dit en pleurs. "Je présente mes excuses à tout le monde". Le verdict devrait tomber dans une dizaine de jours.

Retour à la page d'accueil

ATS