France Amiante: le préjudice d'anxiété étendu

ATS

5.4.2019 - 18:41

L'amiante, interdite en 1997, pourrait encore tuer entre 68'000 et 100'000 personnes en France entre 2009 et 2050 (photo symbolique).
L'amiante, interdite en 1997, pourrait encore tuer entre 68'000 et 100'000 personnes en France entre 2009 et 2050 (photo symbolique).
Source: KEYSTONE/CHRISTIAN BRUN

La Cour de cassation française a ouvert vendredi la voie à l'indemnisation du préjudice d'anxiété pour tous les travailleurs exposés à l'amiante, sous certaines conditions. Celles-ci laissent présager des débats complexes devant les tribunaux.

L'assemblée plénière, la formation la plus solennelle de la haute juridiction, abandonne ainsi une jurisprudence que les syndicats et associations de victimes de l'amiante dénonçaient comme étant «injuste» et «discriminatoire». Le «préjudice d'anxiété», consacré en 2010 par cette Cour, permet l'indemnisation de personnes qui ne sont pas malades, mais qui s'inquiètent de pouvoir le devenir à tout moment.

S'agissant de l'amiante, la Cour de cassation restreignait jusqu'ici ce mécanisme aux seuls salariés dont l'établissement est inscrit sur des listes ouvrant droit à la «préretraite amiante» : les travailleurs de la transformation de l'amiante ou de la construction et de la réparation navale.

Dans son arrêt rendu vendredi, la Cour de cassation reconnaît que «le salarié qui justifie d'une exposition à l'amiante, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, peut agir contre son employeur, pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité, quand bien même il n'aurait pas travaillé dans l'un des établissements» listés.

L'angoisse de devenir malade

«De nombreux salariés» dont l'angoisse de devenir malade ne pouvait être indemnisée jusqu'ici «ont pu être exposés à l'inhalation de poussières d'amiante dans des conditions de nature à compromettre gravement leur santé», a reconnu la haute juridiction. Lors de l'audience, le 22 mars, l'avocat général avait préconisé un tel revirement de jurisprudence.

La Cour était saisie du cas d'un ancien salarié d'une centrale thermique d'EDF, qui demandait réparation pour avoir inhalé des fibres d'amiante entre 1973 et 1988. En mars 2018, la cour d'appel de Paris avait résisté à la jurisprudence qui avait cours en accordant 10'000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice d'anxiété à ce salarié d'EDF, qui ne figure pas sur les listes «préretraite amiante», et 107 de ses collègues. EDF s'était pourvu en cassation.

La Cour de cassation a posé des conditions: le travailleur voulant être indemnisé devra justifier de son exposition à l'amiante, et l'employeur pourra s'exonérer s'il justifie avoir pris «toutes» les mesures de sécurité et de protection de la santé prévues par la réglementation.

Retour à la page d'accueil