Assassinat d'une étudiante japonaise Ouverture du procès devant la cour d'assises du Doubs

ATS

29.3.2022 - 10:29

Le Chilien Nicolas Zepeda, accusé d'avoir assassiné son ex-petite amie japonaise, Narumi Kurosaki, disparue sans laisser de trace en décembre 2016, est arrivé mardi matin au tribunal judiciaire de Besançon, peu avant l'ouverture de son procès devant la cour d'assises du Doubs.

France voisine
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Keystone-SDA

Un fourgon de l'administration pénitentiaire aux vitres opaques transportant le jeune homme de 31 ans est arrivé, précédé de motards, au tribunal vers 08h00, ont constaté des journalistes de l'AFP. Son arrivée a été confirmée par une source proche du dossier.

Détenu depuis l'été 2020 après avoir été extradé du Chili, l'accusé encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Il clame son innocence.

Arrivée au bras de son avocate tête baissée et masquée, la mère de Narumi Kurosaki, visiblement très émue, a pris place sur le banc des parties civiles, accompagnée de la plus jeune soeur de la victime. Les deux femmes, silencieuses, se tenaient par les mains.

Aucun des avocats de la défense ou des parties civiles, n'a fait de déclaration à la presse avant l'ouverture de ce procès, prévue à 10h00. Les audiences se prolongeront jusqu'au 12 avril.

Traduction en japonais et espagnol

Venus de Santiago du Chili, les parents de Nicolas Zepeda sont également arrivés ensemble au tribunal, marchant d'un pas décidé devant les nombreux journalistes présents, le visage fermé.

Dans la salle d'audience, les décalages horaires avec Tokyo et Santiago du Chili ont été affichés sous un grand écran prévu pour les témoignages retransmis en visioconférence depuis l'étranger. Ce procès hors normes fera l'objet d'une traduction simultanée en japonais et espagnol.

Après la journée de mardi qui visera principalement à cerner la personnalité de l'accusé, les témoins seront entendus à compter de mercredi avant que l'accusé ne soit interrogé le lendemain sur les faits proprement dits, selon le planning prévu.

«Un château de cartes»

«Il n'y a pas de preuve de décès, ni de lieu, ni de modalités précises, pas de scénario clair de ce qui est arrivé. (...) Ce dossier est un peu un château de cartes», a soutenu, en amont du procès, la défense de Nicolas Zepeda.

Nicolas Zepeda affirme avoir passé la nuit du 4 au 5 décembre et la journée suivante avec son ex-petite amie. Il l'aurait quittée vivante le 6 décembre vers 04h30 du matin et poursuivi ensuite son périple européen comme prévu.

«Ni leur relation, ni son parcours, ni sa personnalité ne donnent aucun élément qui viendrait expliquer ou annoncer un tel passage à l'acte», insiste la défense.

«Aucun doute»

L'accusation propose une toute autre version: ne supportant pas d'avoir été éconduit, celui qui avait rencontré un an plus tôt Narumi Kurosaki dans une université au Japon, se serait rendu sciemment à Besançon, où elle étudiait le français, pour l'y retrouver par surprise.

Il l'aurait étouffée dans sa chambre du campus universitaire avant de se débarrasser du corps dans une forêt du Jura, non loin de Dole. Nicolas Zepeda aurait ensuite envoyé des messages aux proches de Narumi Kurosaki sur les réseaux sociaux, se faisant passer pour sa victime, le temps de regagner le Chili sans être inquiété.

Du côté des parties civiles, la famille de Narumi Kurosaki et son nouveau petit ami français, Arthur Del Piccolo, s'attendent à ce que Nicolas Zepeda propose «d'autres scénarios que celui qui l'accuse».

«Nous n'avons strictement aucun doute concernant l'implication de Zepeda parce que de nombreux éléments au dossier établissent cette implication», affirme Me Randall Schwerdorffer, avocat de M. Del Piccolo.

«Comme dans un film d'horreur»

Parmi ces éléments figurent des données de téléphonie, la géolocalisation de la voiture louée par Nicolas Zepeda lors de son séjour en France, des achats par carte bancaire dont celui d'un bidon de produit inflammable et d'allumettes ou le témoignage troublant d'un cousin auquel il avait rendu visite en Espagne avant de retourner au Chili.

Dans la nuit du 4 au 5 décembre, des «hurlements de terreur», des «cris stridents de femme», comme «dans un film d'horreur» ou comme si «quelqu'un était en train de se faire assassiner», avaient été entendus par des étudiants de la résidence universitaire de Narumi Kurosaki. Mais aucun d'entre eux n'avait alerté la police.

Puis les messages envoyés par Nicolas Zepeda aux proches de l'étudiante auraient brouillé les pistes, selon l'accusation, retardant encore le signalement de sa disparition intervenu que le 13 décembre.

Fiers de leur fille et de ses brillantes études, les parents séparés de Narumi, issue d'un milieu très modeste, attendent avant tout de ce procès que Nicolas Zepeda passe aux aveux. «Ils voudraient revenir avec le corps de leur fille» pour lui offrir des funérailles et pouvoir enfin faire leur deuil, souligne Me Sylvie Galley, leur avocate.