Feu à Glacier 3000 «Cet incendie va rester très longtemps dans nos têtes»

Valérie Passello

22.9.2022

Lundi 19 septembre à 4h45, l'alarme est donnée: le restaurant Botta brûle au sommet de Glacier 3000. Un sinistre totalement hors du commun pour les services du feu. Pilote de l'opération pour le SDIS Alpin des Diablerets, le capitaine Patrick Frutig raconte. 

Feu à Glacier 3000, le récit

Feu à Glacier 3000, le récit

Lundi 19 septembre à 4h45, l'alarme est donnée: le restaurant Botta brûle au sommet de Glacier 3000. Un sinistre totalement hors du commun pour les services du feu. Pilote de l'opération pour le SDIS Alpin des Diablerets, le capitaine Patrick Frutig raconte.

22.09.2022

Valérie Passello

22.9.2022

Du haut de sa trentaine d'années d'engagement en tant que sapeur-pompier volontaire, Patrick Frutig, capitaine du Service de défense contre l'incendie et de secours (SDIS) des Diablerets, reconnaît: «Dans une vie de pompier, un événement pareil, ça sort largement du lot».   

Et en effet, l'incendie d'un restaurant perché à 3000 mètres d'altitude n'a rien d'anodin. «Toutes les interventions sont différentes. Mais tant pour l'accès au site que pour l'acheminement du personnel et du matériel, la situation en altitude changeait la donne par rapport à des interventions en plaine, par exemple», explique le soldat du feu.

Mais les cours donnés régulièrement aux pompiers par l'ECA sur la gestion de gros événements ainsi que l'expérience du capitaine et de son équipe ont permis de venir à bout du sinistre sans aucun blessé à déplorer.

Le bal des hélicos

Vers 4h45 ce matin-là, Patrick Frutig reçoit une alerte. Le temps de prendre un maximum d'informations auprès de la centrale du 118, sa première mission est de constater qu'un sinistre a bien lieu au sommet. Et pour monter là-haut, pas le choix: le site n'est accessible que par les airs.  

«J'y suis allé avec un hélicoptère de reconnaissance de la Rega, afin de mettre en place les premières mesures», indique le capitaine. Un chef de secteur est d'abord déposé au glacier avant l'arrivée des premiers hommes. Dès 6h15, les soldats du feu arrivent eux aussi en hélico, à raison de trois à quatre personnes par appareil.

Et le chef de l'opération relève une difficulté supplémentaire: «Vu la configuration du terrain, les sapeurs-pompiers ne pouvaient pas être déposés directement sur le lieu du sinistre, mais 200 mètres en-dessous du restaurant. Ils devaient ensuite monter à pied, avec du matériel sur le dos.»  

Il faut aussi obtenir davantage de renseignements sur le bâtiment et les risques potentiels, comme le danger d'écroulement de la structure par exemple. Patrick Frutig interdit donc aux membres de son équipe, dans un premier temps, de pénétrer dans le restaurant: «Il y a eu différentes évaluations et des contacts avec des ingénieurs, poursuit-il. Ces derniers nous ont expliqué à quoi il fallait faire attention. Aux bruits par exemple, pouvant annoncer un effondrement». 

Bacs à eau, tuyaux, lances-incendie et moto-pompes sont amenés au sommet pour permettre aux pompiers de se mettre au travail et d'avoir suffisamment de pression pour asperger le feu. Les membres de l'équipe s'engouffrent dans le bâtiment, équipés d'appareils respiratoires. L'eau, elle, arrive aussi du ciel: les hélicoptères vont s'approvisionner au lac Retaud, près du Col du Pillon. 

Pas choqués, mais «impressionnés»

L'intervention dure toute la journée, jusqu'à la nuit. Les hommes de Patrick Frutig font un tournus, «parce que c'est pénible et plus encore à cette altitude», note-t-il. Un travail de longue haleine, qui a pu paraître interminable aux observateurs externes.

Mais le responsable tempère: «Il est normal que l'opération prenne du temps au vu de l'éloignement du sinistre. Il n'y avait plus de feu à la fin de la journée. C'était un énorme travail d'équipe et à titre personnel, je suis satisfait du résultat.»

Les sapeurs-pompiers du SDIS Alpin ayant pris part à l'extinction du feu se retrouveront pour un débriefing. Non qu'ils aient été choqués par l'intervention comme cela peut se produire certaines fois, mais plutôt par rapport au caractère extraordinaire de ce qu'ils ont vécu. Ce sera aussi l'occasion de revenir sur certains points du processus, dans une optique de constante amélioration.

«Nous avons tous été impressionnés, c'était tellement spécial. Cet incendie va rester très longtemps dans nos têtes», conclut Patrick Frutig.