Marine Le Pen «estomaquée»Le RN gêné par un dérapage d'un de ses députés
AFP
28.6.2024 - 17:44
La stratégie de dédiabolisation de l'extrême droite française, donnée favorite du premier tour des élections législatives dimanche, est mise à mal par le dérapage d'un de ses députés, qui a attaqué une ancienne ministre de gauche sur sa double nationalité franco-marocaine.
AFP
28.06.2024, 17:44
28.06.2024, 19:42
ATS
L'impossible normalisation? Le Rassemblement national (RN) doit d'ores et déjà faire face aux controverses à répétition quant au passif sulfureux de certains de ses candidats sur les réseaux sociaux, des propos «racistes, antisémites et homophobes» dénoncés par le premier ministre Gabriel Attal.
Cette fois, c'est un député sortant – que des membres du RN présentaient comme un potentiel futur ministre de l'Education nationale – qui plonge son camp dans la tourmente.
La nomination de cette «Franco-marocaine» fut une «erreur»
Sur la chaîne BFMTV, Roger Chudeau s'en est pris jeudi à l'ancienne ministre socialiste de l'Education nationale Najat Vallaud-Belkacem. La nomination de cette «Franco-marocaine» fut une «erreur» et «pas une bonne chose pour la République», a-t-il lancé.
Plus généralement, ce candidat à sa réélection aux législatives, dont le second tour aura lieu le 7 juillet, pense «que les postes ministériels doivent être détenus par des Franco-français», pour éviter un «problème de double loyauté».
Double nationalité: pour Roger Chudeau (RN), le fait que Najat Vallaud-Belkacem a été ministre "n'était pas une bonne chose pour la République" pic.twitter.com/2pqxlbLq9k
Vendredi matin, M. Chudeau a annulé une interview sur Sud Radio, d'après cette station, et les cadres de son parti ont pris leurs distances avec ses propos, jusqu'à Marine Le Pen elle-même.
«Je suis un peu estomaquée que notre collègue Roger Chudeau puisse exprimer un avis personnel qui est totalement contraire au projet du Rassemblement national», a-t-elle dit.
«On ne peut pas» lui «retirer l'investiture à deux jours» du premier tour mais «je pense que le président du parti ne laissera pas les choses en l'état», a-t-elle assuré, tandis que le RN est déjà confronté à une polémique sur sa proposition d'exclure les binationaux des postes «extrêmement sensibles» au sein de l'Etat, comme dans les secteurs du nucléaire, de la défense et du renseignement.
La suppression de la double nationalité figurait dans le programme de Marine Le Pen en 2017, avant qu'elle ne la retire à l'approche de la présidentielle suivante, celle de 2022. «Je me suis rendu compte que les binationaux ressentaient» cela «comme une forme de suspicion» et «je trouvais ça profondément injuste», a-t-elle lancé vendredi.
Marine Le Pen sur la binationalité : «L'amour pour son pays ne dépend pas du fait d'avoir ou de ne pas avoir une double nationalité» #LaGrandeInterviewpic.twitter.com/E0zlTbDRnf
Au cours d'un débat télévisé mardi, Gabriel Attal a accusé le président du RN Jordan Bardella d'hypocrisie et d'avoir une représentante franco-russe, Tamara Volokhova, à des fonctions sensibles au sein du Parlement européen, en contradiction avec la proposition de son parti.
«Infamant et ridicule» pour Macron
Najat Vallaud-Belkacem a pour sa part «remercié» M. Chudeau de «ce bel aperçu de ce que donnerait le RN au pouvoir: incompétence, racisme et mensonge».
Le parti montre son «vrai visage», celui d'"un racisme décomplexé», a réagi de son côté la présidente de la chambre basse du Parlement français Yaël Braun-Pivet.
Ces propos sont «infamants et ridicules», «on doit s'indigner de ces choses-là», a renchéri le chef de l'Etat, Emmanuel Macron.
«Le président de la République et d'autres (...) «utilisent ça» de façon «électorale», a répondu le député RN Jean-Philippe Tanguy sur BFMTV, tout en regrettant les propos «pas fondés» de Roger Chudeau.
Centaine d'exemples
Plus largement, le camp présidentiel a recensé dans une «carte de la honte» interactive les propos controversés de plus de cent candidats RN aux législatives.
Parmi eux, Françoise Billaud avait relayé sur Facebook une image suggérant de soutenir «l'hétérosexualité pendant qu'elle est encore légale» et René Lioret a fustigé les «racailles africaines» sur les réseaux sociaux.
Quant à Agnès Pageard, elle a relayé un message dénonçant «le degré de connivence au sommet de l'Etat» entre plusieurs personnalités juives.
Et vendredi midi, Maïtey Pouget, candidate RN en Corrèze (centre) face à l'ancien président socialiste François Hollande, a estimé sur la chaîne de télévision LCI que la France commençait «à être envahie» par l'immigration mais pas «à cette heure-là» car «ils dorment».
Double allégeance
Le thème de la «double allégeance» des binationaux a régulièrement été mis en avant par l'extrême droite en France, en particulier par Jean-Marie Le Pen (le fondateur du Front national devenu ensuite le RN) qui en 1989 avait interrogé le secrétaire d'Etat Lionel Stoléru, de confession juive, sur une supposée «double nationalité» qu'il n'avait pas.
Mais il faut remonter aux années 1930 pour retrouver la mise en place de restrictions pour les personnes naturalisées.
Après la Deuxième Guerre mondiale, ces lois ont pour la plupart disparu.
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