Méfaits de la pornographie en ligne Il est urgent de protéger les enfants

ATS

31.1.2023 - 13:08

Pour près de la moitié des jeunes en Angleterre, les filles «s'attendent» à ce que les rapports sexuels impliquent de la violence: un rapport alerte mardi sur les conséquences édifiantes de la pornographie et appelle les entreprises technologiques à une action urgente.

Un enfant sur dix a déjà vu de la pornographie à l'âge de neuf ans en Angleterre (image d'illustration).
Un enfant sur dix a déjà vu de la pornographie à l'âge de neuf ans en Angleterre (image d'illustration).
ATS

«Permettez-moi d'être claire», prévient la commissaire à l'enfance Rachel de Souza dans ses conclusions. «Les contenus pour adultes auxquels les parents ont pu avoir accès dans leur jeunesse pourraient être considérés comme ‹pittoresques› par rapport au monde actuel de la pornographie en ligne».

«Les représentations d'avilissement, de coercition sexuelle, d'agression et d'exploitation sont monnaie courante et visent de manière disproportionnée les adolescentes», alerte-t-elle, se disant «profondément préoccupée par la normalisation de la violence sexuelle dans la pornographie en ligne».

Très tôt

Le bureau de la commissaire, un organisme public chargé de protéger les droits des enfants, dresse un premier constat: la consommation de pornographie est répandue parmi les jeunes et commence très tôt.

Un enfant sur 10 a vu de la pornographie à l'âge de neuf ans, selon l'enquête réalisée en Angleterre auprès de 1000 jeunes entre novembre et janvier. La moitié des adolescents de 13 ans ont été exposés à de la pornographie.

Avant l'âge de 18 ans, près de huit jeunes sur 10 ont vu de la pornographie violente impliquant des actes sexuels coercitifs, dégradants ou douloureux, la plupart du temps contre des femmes.

Selon ce rapport, «les utilisateurs fréquents de pornographie sont plus susceptibles de se livrer à des actes sexuels physiquement agressifs».

Un jeune sur 2 subit un acte sexuel violent

A ce sujet, 47% des personnes interrogées estiment que les filles «s'attendent» à ce que les rapports sexuels impliquent une agression physique. Et 42% pensent que la plupart des filles «apprécient» les actes d'agression sexuelle.

Près d'un jeune sur deux âgé de 18 à 21 ans a subi un acte sexuel violent, surtout les filles.

Insultes sexistes, images et vidéos

En 2021 déjà, un déluge de témoignages d'adolescents sur un site internet créé par une jeune femme, Sara Soma, avait alerté sur l'ampleur du harcèlement sexuel dans les écoles britanniques.

Une enquête des services d'inspection académique commandée dans la foulée avait révélé qu'environ neuf filles sur 10 disaient subir des insultes sexistes et recevoir des images ou des vidéos à caractère sexuel.

Elle alertait sur la facilité d'accès à la pornographie, dont le rapport de Rachel de Souza détaille les conséquences.

«Je n'oublierai jamais la fille qui m'a raconté son premier baiser avec son petit ami, âgé de 12 ans, qui l'a étranglée. Il l'avait vu dans des films pornographiques et trouvait cela normal», rapporte la commissaire, dont le rapport insiste sur «le besoin urgent de protéger les enfants».

Projet de loi

Le Parlement doit débattre dans les prochains jours du projet de loi sur la sécurité en ligne. Ce projet impose d'importantes exigences de vérification de l'âge (mesures techniques pour établir l'âge d'une personne) sur les plateformes afin d'empêcher les moins de 18 ans d'accéder à du contenu pour adultes.

Car avec les réseaux sociaux, la pornographie n'a jamais été aussi facilement accessible et ne s'est jamais autant imposée aux jeunes. Près de 40% des jeunes de 16 à 21 ans ont dit qu'ils étaient accidentellement tombés sur de la pornographie sur internet. Mais la moitié des personnes interrogées (58% des garçons et 42% des filles, âgés de 16 à 21 ans) ont déclaré avoir elles-mêmes recherché de la pornographie en ligne.

Twitter

D'après cette enquête, c'est sur Twitter (41%) que les jeunes ont le plus vu de pornographie. Viennent ensuite les sites spécialisés (37%), Instagram (33%), Snapchat (32%) et les moteurs de recherche (30%).

«Les parents ne peuvent pas stopper cette marée sur les réseaux sociaux», a souligné Rachel de Souza sur la BBC. «Ce sont les entreprises technologiques qui doivent passer à l'action (...) Franchement, ces entreprises qui pèsent plusieurs milliards devraient avoir une boussole morale».

Elles peuvent «retirer ces images», ou «s'assurer de l'âge» des personnes allant sur leur site, martèle la Commissaire. «Cela nuit à notre société et au bonheur des enfants. Cela doit cesser».