Le Sénat de l'Etat de l'Alabama a adopté mardi le projet de loi le plus restrictif des Etats-Unis sur l'avortement. La sévère réforme prévoit notamment de lourdes peines de prison pour les médecins pratiquant des interruptions volontaires de grossesse.
Le texte, que le Sénat contrôlé par les républicains a transmis au cabinet de la gouverneure républicaine de l'Etat Kay Ivy en vue de sa promulgation, ne prévoit pas d'exception en cas de viol ou d'inceste. Les médecins pratiquant l'avortement seront passibles de peines de prison de 10 à 99 ans, sauf en cas d'urgence vitale pour la mère ou d'«anomalie létale» du foetus.
La puissante organisation de défense des droits civiques ACLU a déjà fait savoir qu'elle saisirait la justice pour empêcher l'application de ce texte. «Ce texte punit les victimes de viol et d'inceste en les privant encore plus du droit à disposer de leur propre corps et en les obligeant à donner naissance», selon l'ACLU.
L'organisation féministe américaine National Organization for Women a qualifié la loi d'«inconstitutionnelle». Elle estime que sa mise en application «renverrait les femmes de l'Etat aux jours noirs durant lesquels les parlementaires contrôlaient leur corps, leur santé et leur vie».
Plus de 300 nouvelles règles dans 28 Etats
L'objectif avoué des promoteurs du texte est de se retrouver devant la Cour suprême, dominée depuis l'élection du président Donald Trump par des conservateurs, pour la convaincre de revenir sur sa décision emblématique de 1973, «Roe v. Wade» qui a reconnu le droit des femmes à avorter tant que le foetus n'est pas viable.
«Vous venez de violer vous-même l'Etat de l'Alabama», a déclaré Bobby Singleton, membre démocrate du Sénat, après le rejet par les sénateurs d'un amendement demandant des exceptions à l'interdiction de l'avortement. «Vous dites à ma fille: tu ne comptes pas dans l'Etat de l'Alabama... Les hommes peuvent te violer et tu auras ce bébé si tu tombes enceinte», a-t-il ajouté, la voix parfois tremblante d'émotion. Le projet de loi avait été adopté début mai par la Chambre des représentants de l'Alabama.
Plusieurs Etats conservateurs envisagent des lois anti-avortement tandis que des Etats libéraux cherchent à garantir le droit à l'interruption volontaire de grossesse en l'inscrivant dans leurs Constitutions. Depuis le début de l'année, 28 des 50 Etats américains ont mis en place plus de 300 nouvelles règles afin de limiter l'accès à l'avortement, selon l'Institut Guttmacher qui défend le droit des femmes à l'IVG.
Le Kentucky et le Mississippi ont ainsi interdit les avortements dès que les battements du coeur du foetus sont détectables, soit environ à la sixième semaine de grossesse. Des mesures comparables sont en passe d'adoption en Géorgie, Ohio, Missouri et Tennessee. Un juge a bloqué la mise en oeuvre de la loi du Kentucky, celle du Mississippi doit entrer en vigueur en juillet.
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