France L'initiatrice du #MeToo français condamnée

ATS

25.9.2019 - 21:18

L'avocat de la journaliste, Francis Szpiner, a indiqué qu'il entendait faire appel, dénonçant lors d'un point presse une décision «hors du temps», «une régression».
L'avocat de la journaliste, Francis Szpiner, a indiqué qu'il entendait faire appel, dénonçant lors d'un point presse une décision «hors du temps», «une régression».
Source: KEYSTONE/EPA/YOAN VALAT

L'initiatrice du #MeToo français, qui avait lancé le mot-dièse #balancetonporc, emblématique de la libération de la parole des femmes dénonçant agressions et harcèlements sexuels, a été condamnée mercredi. Pour avoir diffamé l'homme qu'elle accusait de harcèlement.

Le tribunal de Paris a condamné Sandra Muller pour diffamation à 15'000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral, selon la décision consultée par l'AFP. Le tribunal a estimé que qualifier le plaignant de harceleur était diffamatoire et condamnable.

La journaliste de la Lettre de l'audiovisuel, l'une des «briseuses de silence» désignées par le magazine Time comme «Personnalités de l'année» 2017, a également été condamnée à verser au plaignant 5000 euros au titre des frais de justice, à retirer le tweet litigieux et à publier des communiqués judiciaires sur son compte Twitter et dans deux organes de presse.

Appel prévu

Son avocat Francis Szpiner a indiqué qu'il entendait faire appel, dénonçant lors d'un point presse une décision «hors du temps», «une régression».

Le plaignant, Eric Brion, «accueille la décision avec une certaine forme de soulagement, il a toujours répété qu'il n'a jamais harcelé Sandra Muller», a réagi son avocat Nicolas Bénoit.

Soirée cannoise de 2012

Le 13 octobre 2017, Sandra Muller tweetait le message suivant: «#balancetonporc !! toi aussi raconte en donnant le nom et les détails un harcèlent (sic) sexuel que tu as connu dans ton boulot. Je vous attends».

Message suivi quatre heures plus tard par un second tweet: «+Tu as des gros seins. Tu es mon type de femme. Je vais te faire jouir toute la nuit+ Eric Brion ex patron de Equidia #balancetonporc».

Ces propos, retweetés plus de 2500 fois, avaient été tenus à une soirée cannoise de 2012, en marge du Marché international des programmes de télévision où ils se trouvaient tous deux pour le travail.

Mot-dièse devenu viral

La parole de milliers de femmes dénonçant harcèlement ou agressions sexuelles s'était libérée sous ce mot-dièse #balancetonporc, rapidement devenu viral en France, et sous son équivalent en anglais #MeToo (#MoiAussi) lancé par l'actrice Alyssa Milano.

M. Brion, consultant et ancien directeur général de la chaîne de télévision Equidia, avait attaqué Sandra Muller en diffamation pour le tweet le visant nommément.

Lors de l'audience devant la 17e chambre civile du tribunal de Paris, le 29 mai dernier, Mme Muller avait défendu la libération de la parole initiée par #balancetonporc, tandis qu'Eric Brion et ses avocats avaient dénoncé une forme de «délation».

Délit constitué

Le tribunal a souligné que la question des «violences sous toutes leurs formes infligées aux femmes par des hommes constitue à l'évidence un sujet d'intérêt général». Pour autant, les juges ont estimé qu'en imputant à Eric Brion de l'avoir harcelée sexuellement, Sandra Muller a tenu des propos diffamatoires.

Le délit de harcèlement étant constitué par «une répétition ou une pression grave», ce qui n'était pas le cas. Elle ne peut pas non plus bénéficier de l'excuse de «bonne foi», n'ayant apporté ni «base factuelle suffisante» ni preuve de la vérité de ses accusations.

Se disant «victime de Sandra Muller», Eric Brion a déclaré mercredi sur RTL avoir eu sa vie «complètement ruinée». «J'ai passé des heures et des heures à regarder le plafond chez moi ... C'est une mort sociale, on n'est plus invité nulle part, le téléphone ne sonne plus», a-t-il dit.

«La justice a décidé de me punir. On va se battre, pour que la justice ouvre les yeux», a quand à elle déclaré à la presse Sandra Muller, au cabinet de son avocat Francis Szpiner.

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