Grève dans les raffineries La mobilisation commence à se fissurer

ATS

19.10.2022 - 23:12

Après trois semaines de blocages, la mobilisation des grévistes français de TotalEnergies a commencé à faiblir avec la levée du mouvement dans plusieurs raffineries mercredi, sans lever l'incertitude sur l'approvisionnement en carburant à l'approche des vacances scolaires.

Des employés de TotalEnergies et Esso ExxonMobil lançant des fumigènes lors d'une manifestation organisée par le syndicat CGT devant la raffinerie de TotalEnergies à La Mede, Château Neuf les Martigues, le 11 octobre 2022.
Des employés de TotalEnergies et Esso ExxonMobil lançant des fumigènes lors d'une manifestation organisée par le syndicat CGT devant la raffinerie de TotalEnergies à La Mede, Château Neuf les Martigues, le 11 octobre 2022.
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Keystone-SDA

La grève a été suspendue à la raffinerie de Donges, dans l'ouest du pays, ainsi que sur deux autres sites pétroliers dans le Nord et les Bouches-du-Rhône, selon le syndicat CGT. Mais le mouvement a été reconduit dans deux autres sites du groupe, en Normandie et dans le Rhône.

«Ils ne lâchent rien. Si eux, ils arrivent à faire quelque chose, ça va donner un grand signal dans toute la France», a lancé l'actrice Corinne Masiero, originaire du nord de la France, venue soutenir les grévistes, interprétant avec des camarades comédiens une saynète fustigeant le capitalisme et les multinationales. «On espère que la direction sera attentive aux revendications des grévistes pour pouvoir sortir du conflit», a déclaré à l'AFP Benjamin Tange, de la CGT.

Négociations sur l'emploi et les investissements

Ce syndicat est à l'origine de ce mouvement de grève, initié le 27 septembre, pour demander des hausses de salaires, sur fond de forte inflation et de super profits réalisés par TotalEnergies, avec la flambée des cours liée notamment à la guerre en Ukraine.

La CGT a annoncé avoir proposé mercredi matin un «protocole de sortie de fin de conflit» à la direction de TotalEnergies. Une proposition qui selon le syndicat a été rejetée par la direction, ce que TotalEnergies, interrogé par l'AFP, n'a pas confirmé.

Cette proposition demandait «des négociations sur l'emploi et les investissements», «des négociations locales sur les problématiques spécifiques remontées par les grévistes», ainsi que des «garanties sur l'absence de répression vis-à-vis des grévistes», a expliqué à l'AFP Eric Sellini, coordinateur national de la CGT pour TotalEnergies.

Pression sur le gouvernement

En attendant, la reconduction du mouvement dans certaines raffineries et dépôts de carburant du groupe jette de nouvelles incertitudes sur la résorption des pénuries d'essence à quelques jours des vacances de la Toussaint.

Face aux pénuries de carburant, des Français ont commencé à annuler leurs séjours, au risque de remettre en cause la très belle arrière-saison espérée par le secteur du tourisme.

Au total, 20,3% des stations-service, contre près d'un tiers le week-end dernier, étaient encore en manque d'essence ou de diesel mercredi, avec des situations plus tendues dans certaines régions, selon le ministère de la Transition énergétique.

«La situation continue à s'améliorer nettement»

«La situation continue à s'améliorer nettement», a souligné la Première ministre Elisabeth Borne. «Je sais que la situation est encore difficile pour beaucoup de nos compatriotes, mais la dynamique est là et je veux une nouvelle fois appeler les salariés grévistes à reprendre le travail», a-t-elle ajouté.

A quelques jours des premiers départs, la pression monte plus que jamais sur le gouvernement. S'adressant aux Français, la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher a assuré mettre «tout en oeuvre pour qu'ils puissent partir en vacances tranquillement».

Pour accélérer la cadence, le gouvernement a rouvert les vannes de sites bloqués à l'aide de réquisitions de salariés, la dernière visant de nouveau le site de TotalEnergies à Feyzin mercredi.

Alors que mardi le PDG de TotalEnergies Patrick Pouyanné, «fatigué» de s'entendre dire que son salaire a été augmenté de 52% l'an passé, avait pris les réseaux sociaux à témoin pour expliquer que sa rémunération était «constante depuis 2017» et «moins élevée» que celle des «autres majors» européennes et américaines, le gouvernement l'a exhorté mercredi plutôt à travailler «d'arrache-pied» pour résoudre le conflit social dans son groupe.