Drame de Grande-SyntheLe site coco.gg, un «terrain de chasse pour les prédateurs»
AFP
20.4.2024
Le site de discussion coco.gg, via lequel un jeune homme aurait été victime d'un guet-apens meurtrier à Grande-Synthe (Nord), est considéré comme «un repère de prédateurs» par plusieurs associations de défense de l'enfance et de lutte contre l'homophobie.
AFP
20.04.2024, 00:09
20.04.2024, 00:10
Marc Schaller
Vendredi, deux mineurs de 14 et 15 ans ont été mis en examen pour assassinat, dans l'enquête sur l'agression mortelle de Philippe Coopman, un jeune homme de 22 ans battu à mort mardi à Grande-Synthe (Nord) lors d'un guet-apens.
Les deux mineurs ont affirmé en garde à vue avoir «fixé un rendez-vous» à la victime sur un parking, à l'arrière d'une supérette, «via un site internet de rencontre dénommé Cocoland en se faisant passer pour une jeune fille mineure».
Cocoland, plus connu sous le nom de Coco.gg depuis qu’il est hébergé sur l’île de Guernesey, se présente comme un «site de chat sans inscription». Il suffit de donner son genre, son âge, son code postal et de se créer un pseudo, sans aucun contrôle.
Sur la colonne de gauche de la page d'accueil, des thèmes comme «cuisine», «cinéma», «60 et +», mais aussi d'autres plus sexuels comme «femmes infidel» (sic) voire très crus tels «trav salope», ou à connotation potentiellement pédophile tel «lycéenne». Sur la colonne de droite, des membres, avec leur pseudo, âge et ville.
«Pédocriminels, violeurs, homophobes»
L'association SOS Homophobie avait demandé sa fermeture après le guet-apens dont avait été victime à Marseille début octobre un homosexuel.
«Il n'y a aucun filtre pour s'inscrire. C’est un repaire de prédateurs. C'est honteux que ce site soit accessible» à tous, a dénoncé vendredi auprès de l'AFP Véronique Godet, co-présidente de SOS Homophobie.
Le site coco.gg est également dans la ligne de mire des associations de protection de l'enfance, tel Innocence en danger, qui avait elle aussi demandé sa fermeture, en lançant une pétition qui a recueilli plus de 5.000 signatures.
Pour elle, coco.gg est «un site d'une accessibilité inimaginable qui regorge d'agresseurs en tout genre: pédocriminels, violeurs, homophobes, etc.»
Il «est associé à des affaires policières ou judiciaires depuis quasiment aussi longtemps qu'il existe. Il est connu pour son absence de modération qui laisse proliférer les pires dérives», affirmait sa pétition.
Dominique P., accusé d'avoir drogué sa femme avant de la livrer à plusieurs dizaines d'hommes, et qui sera jugé à partir de septembre à Avignon, utilisait ainsi ce chat, selon une source judiciaire.
«Agir en toute impunité»
«C'est un terrain de chasse pour les prédateurs», a aussi pointé Sophie Antoine, responsable juridique d'ACPE (Agir contre la prostitution des enfants), interrogée par l'AFP.
«Coco est devenu une forme de symbole», mais «ce n'est malheureusement qu'un exemple d'une situation qui existe sur énormément d'autres réseaux sociaux et formes de chat, y compris ceux paraissant innocents, comme des jeux» vidéo, note-t-elle.
Et le souci, souligne-t-elle, c'est que «les sites se présentent comme des interfaces qui ne sont pas responsables du contenu», ce qui «permet à des prédateurs d'agir en toute impunité».
Selon Le Monde, coco.gg appartient à une société immatriculée en Bulgarie. Il a auparavant été possédé par plusieurs autres sociétés, avec un propriétaire qui reste «en réalité identique»: un «discret ingénieur» installé dans le Var.