Une légende de la Première Guerre mondiale Manfred von Richthofen, le mythe du «Baron rouge»

Nico Pointner, dpa

21.4.2018

Son Fokker était rouge vif et son bilan de guerre est aussi impressionnant que sanglant: Manfred von Richthofen fut l'une des figures légendaires de la Première Guerre mondiale. Il a été abattu il y a très exactement 100 ans. Cependant, le mythe du noble chevalier du ciel comporte également quelques fissures.

Des pizzas surgelées, des concessions automobiles, des restaurants et des jeux vidéo portent son nom. Le personnage de BD Snoopy l'a dans le collimateur et Matthias Schweighöfer s'est glissé dans sa peau pour les besoins d'une grosse production allemande.

Quant aux enfants, ils peuvent reconstruire son Fokker rouge, son célèbre avion de chasse, avec des briques Lego. Durant la Première Guerre mondiale, Manfred Freiherr von Richthofen, le célèbre pilote de chasse de l'empire, était acclamé comme une pop star. Aujourd'hui, c'est un personnage culte, une marque, une légende.

Manfred von Richthofen aurait abattu près de 80 avions avec ses biplans et triplans rouge vif. Dans sa patrie, on le surnomme le «Baron rouge». Ses ennemis en revanche l'appellent le «Diable rouge», non sans un certain sentiment de crainte et de respect. Déjà de son vivant, il était présenté comme un héros chevaleresque. Les nazis se sont servis de Manfred von Richthofen à des fins de propagande.

Le mythe remis en question

Une scène qui a déjà été racontée et adaptée au cinéma à de nombreuses reprises: Manfred von Richthofen est installé dans son Fokker et pourchasse des avions ennemis. Il prend en chasse un Anglais et lui tire dessus. Lorsqu'il constate que la mitrailleuse de son adversaire est enrayée, il met fin à son attaque et contraint l'Anglais à atterrir — au sol, il le salue chaleureusement et lui propose une cigarette. Esprit sportif. Chevalerie. Générosité. Tels sont les messages véhiculés par son acte.

L'historien Joachim Castan, auteur d'une biographie complète sur Manfred von Richthofen, remet en question le mythe du noble chevalier du ciel. On ne sait pas ce qui s'est vraiment passé à l'époque. Ainsi, dans d'autres circonstances, le baron n'aurait pas hésité à tirer sur ses opposants désarmés. En réalité, seuls 33 des plus de 100 pilotes et membres d'équipage ciblés par les tirs du baron auraient survécu, précise l'historien.

Le crédo de Joachim Castan: la propagande masque sa vraie personnalité. Manfred von Richthofen était avant tout un chasseur. Il collectionnait les trophées et recherchait la gloire. Le jeune Allemand voyait ces duels aériens comme une compétition. Quand il était jeune, Manfred von Richthofen, né à Wrocław en 1892, ne jurait déjà que par la chasse. Il n'avait aucune autre passion. Même s'il avait de nombreuses admiratrices, il ne s'intéressait pas aux femmes. En 1917, quatre mois après ses premiers tirs, il s'était vu confier son propre escadron de chasseurs.

Un symbole de ralliement pour les soldats

L'escadron de chasseurs 71 de l'armée allemande, basé à Wittmund, en Frise orientale, porte le nom du célèbre chasseur. Les habitants de Wittmund sont fiers de leurs pilotes de chasse. Sur place, un «R» rouge orne les avions. C'est un symbole de ralliement pour les soldats, un symbole qui promeut des valeurs militaires comme la camaraderie et le sens du devoir, explique le Kommodore Kai Ohlemacher. De plus, avec ses tactiques, il a posé les fondements de l'aviation militaire, des bases dont on profite encore aujourd'hui.

Pour les soldats de Wittmund, Manfred von Richthofen reste un exemple. Ils voient la personne, pas le régime, déclare le lieutenant-colonel Ohlemacher. Leur attitude est en accord avec le nouveau devoir de respect des traditions de la troupe. À l'occasion du 100e anniversaire de sa mort, la ville de Wittmund lui rendra hommage en musique.

Joachim Castan reconnaît lui aussi qu'il s'agit du pilote de chasse le plus talentueux de la Première Guerre mondiale. «Il était intrépide, mais également impitoyable.» Manfred von Richthofen cherchait avant tout à atteindre son quota de tirs. «Je ne vois en lui aucune intention héroïque.» Pour Joachim Castan, on ne peut parler de guerre aérienne propre. La guerre n'est que brutalité.

Les circonstances de sa mort restent floues

Manfred von Richthofen en a d'ailleurs lui-même fait l'expérience. À l'été 1917, il avait reçu une balle dans le front pendant un combat aérien. Celle-ci l'avait paralysé et rendu aveugle — de façon temporaire. Il avait réussi à poser son appareil avant de perdre connaissance. Faisant fi de l'avis des médecins, il avait repris du service peu de temps après.

Le 21 avril 1918, le pilote de 25 ans à peine a été abattu au-dessus de la France par un mitrailleur — non pas durant un combat aérien héroïque, mais derrière des lignes ennemies. D'après plusieurs chercheurs, si le «Baron rouge» a été abattu, c'est parce que sa blessure à la tête n'avait fait que renforcer son imprudence. Il se lançait constamment dans des manœuvres périlleuses. Encore aujourd'hui, les circonstances exactes de sa mort restent floues — tout comme son mythe.

Les images du jour

Retour à la page d'accueil