Mulhouse Mulhouse: marche blanche en mémoire d'une victime de harcèlement

ATS

24.10.2021 - 19:25

Avec les téléphones et les réseaux sociaux, le harcèlement se poursuit "jusqu'à la maison", déplore une enseignante (image d'illustration).
Avec les téléphones et les réseaux sociaux, le harcèlement se poursuit "jusqu'à la maison", déplore une enseignante (image d'illustration).
ATS

Quelque 1400 personnes submergées par l'émotion ont défilé dimanche dans le centre-ville de Mulhouse pour rendre un dernier hommage à Dinah. Cette lycéenne de 14 ans s'est suicidée, victime de harcèlement scolaire selon ses proches.

24.10.2021 - 19:25

«Dinah était une personne intelligente, elle aimait la vie, elle voulait être présidente de la République, elle voulait faire du droit, elle voulait faire tellement de choses», a déclaré sa mère Samira. «Elle aurait été tellement heureuse de voir tout ce monde», a-t-elle poursuivi, «elle qui se sentait tellement seule».

L'adolescente, dernière et la seule fille d'une fratrie de trois enfants, a été retrouvée pendue, au domicile familial de Kingersheim (Haut-Rhin), dans la nuit du 4 au 5 octobre. Selon ses parents, elle était victime d'un harcèlement opéré par des jeunes filles côtoyées au collège à qui elle avait fait part de son homosexualité.

Harcelée durant deux ans

«Ma fille a été harcelée pendant deux ans, et pendant deux ans on a fait des pieds et des mains pour que ça s'arrête, mais elles l'ont poursuivie jusqu'à la maison, jusqu'aux réseaux sociaux», a souligné sa mère, originaire du Maroc.

La jeune métisse subissait des insultes «racistes ou à caractère homophobe», a précisé à l'AFP son père, d'origine réunionnaise. «Dans sa classe, il y avait deux élèves qui la soutenaient, les autres la descendaient».

Selon Samira, qui a reproché au corps enseignant d'avoir «fermé les yeux» sur le drame, sa fille avait reçu des messages comme «ne t'inquiète pas tu vas bientôt mourir», après une première tentative de suicide en mars. «Je vous en supplie», a imploré la mère devant la foule, «ceux qui ont des enfants, parlez-leur, dites-leur de ne pas harceler, dites-leur que c'est grave».

Réseaux sociaux

Le cortège s'est ensuite ébranlé en direction du lycée que fréquentait l'adolescente. Des fleurs et des bougies ont été déposées devant l'établissement par un cortège ouvert par une large banderole proclamant: «Dinah, à tout jamais dans nos coeurs».

De nombreux participants à la marche étaient venus en famille. Certains ont scandé «justice pour Dinah», «les mots blessent, les mots tuent», ou encore «plus jamais ça».

«En milieu scolaire, nous sommes de plus en plus confrontés à ce type de situation. C'est souvent pour des broutilles au départ et ensuite ça prend de l'ampleur, surtout à cause des réseaux sociaux», a témoigné Fatimah Aguilar, enseignante dans un lycée et mère de quatre enfants.

Enseignants «démunis»

«En tant qu'enseignants, nous sommes formés, mais on reste quand même démunis parce que c'est un travail de fond qu'il faut mener avec les familles. Il faut que les parents se rendent compte qu'avec le téléphone, ça continue à la maison», a-t-elle observé.

Dans la foule, des dizaines de collégiens et de lycéens étaient également venus exprimer leur soutien et témoigner d'un phénomène encore trop souvent «banalisé». Selon la Mutuelle Assurance de l'Education (MAE), 700'000 des 12 millions d'élèves français pourraient être victimes de harcèlement.

Interrogée par l'AFP, la procureure de la République de Mulhouse, Edwige Roux-Morizot, a indiqué qu'une enquête pour «recherche des causes de la mort» avait été ouverte. Elle doit permettre «de comprendre les raisons du geste de cette adolescente». «Dans l'immédiat», le harcèlement est «une hypothèse», a-t-elle insisté.

ATS