Etats-Unis «On doit dire que trop, c'est trop» - L’ancien médecin en chef s’indigne

AFP

1.4.2024

L'ancien médecin en chef des Etats-Unis, Jerome Adams, a été contraint de payer près de 5.000 dollars pour une hospitalisation liée à une simple déshydratation, une facture salée qui illustre les problèmes de nombreux Américains pour payer leurs frais médicaux.

Jerome Adams avait été médecin en chef des Etats-Unis sous la présidence de Donald Trump.
Jerome Adams avait été médecin en chef des Etats-Unis sous la présidence de Donald Trump.
imago images/ZUMA Wire

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Aujourd'hui, le médecin en chef des Etats-Unis sous Donald Trump (2017-2021) appelle à une réforme du système de santé, demandant une plus grande transparence des coûts et une procédure d'arbitrage indépendante. Il se fait ainsi le porte-parole des 100 millions d'Américains criblés de dettes médicales.

Le taux de citoyens américains non assurés a diminué ces dernières années, mais le Commonwealth Fund, une fondation privée, estime tout de même que 43% des adultes en âge de travailler sont «sous-assurés», ce qui limite leur accès aux soins et les place potentiellement au bord d'un gouffre financier.

Le cas de Jerome Adams est représentatif des coûts exorbitants pour des soins médicaux dans le pays: le médecin, après une randonnée, a eu des vertiges et des étourdissement. Ses collègues, avec qui il était, lui ont conseillé de se faire examiner et ils ont appelé une ambulance.

Faillite

«J'ai été mis sous perfusion pendant le trajet. Lorsque je suis arrivé, il était clair qu'il s'agissait d'une déshydratation», a-t-il déclaré lors d'une interview depuis Indianapolis, au nord des Etats-Unis, où il travaille.

Suivant les conseils des médecins, il reste la nuit sur place. Deux mois plus tard, il reçoit une facture de 4.800 dollars, soit le reste à sa charge après déduction de ce que son assurance a couvert. Cette facture est suivie de lettres menaçant un recours à une agence de recouvrement.

Pour M. Adams, cette situation est bien trop courante dans un pays où 66% des faillites personnelles sont directement liées aux frais médicaux.

En tant que médecin noir qui a défendu la justice raciale dans le domaine de la santé -- à la fois comme médecin en chef de Donald Trump et, auparavant, comme chef du département de santé de l'Indiana -- Jerome Adams se considère bien placé pour combattre ces factures salées.

«Je ne me plains pas pour moi personnellement, car je vais m'en sortir, mais j'ai une voix» qui peut porter, insiste-t-il. Depuis, il s'est employé à publier des messages sur X (ex-Twitter), où il compte quelque 90.000 abonnés, sur d'autres cas. Comme celui d'une mère de quadruplés prématurés à qui l'on réclame une facture de 4 millions de dollars.

Alors que des progressistes comme le sénateur Bernie Sanders proposent de supprimer complètement les assurances maladie privées, M. Adams trouve que ce n'est pas réaliste.

Transparence

Il préconise plutôt une série de réformes visant à réguler le marché, comme l'a fait la loi connue sous le nom d'Obamacare, dans les années 2010.

Il pousse aussi pour plus de transparence: «Il n'y a pas de marché sans transparence et sans responsabilité. Aujourd'hui, si je me rends chez un concessionnaire automobile, il doit me dire combien coûte la voiture.»

Selon lui, il faudrait mettre aussi en place une procédure d'arbitrage car les patients aujourd'hui n'ont, dans la majorité des hôpitaux, aucun recours pour contester leurs factures.

L'Obamacare a permis à des dizaines de millions d'Américains d'être couverts, en partie en incitant les employeurs à proposer à leurs salariés des offres de couverture santé qui leur coûtent moins cher.

Ceux qui en bénéficient peuvent cotiser sur des comptes non imposables, mais si un problème de santé survient en début d'année, il se peut qu'ils n'aient pas suffisamment de fonds de côté. Dans ce cas-là, une loi devrait être adoptée pour obliger les assureurs à verser une part plus importante, considère M. Adams.

L'ancien médecin en chef a grandi avec un asthme sévère et a dû se rendre à de nombreuses reprises à l'hôpital quand il était enfant, parce que ses parents ne pouvaient pas payer ses médicaments.

«Il y a beaucoup de bonnes et de mauvaises choses» dans le système de santé américain, a-t-il déclaré. «Mais nous devons nous demander à quel moment, même dans un système capitaliste, on doit dire que trop, c'est trop.»