Tribunal fédéralPlainte pénale ne veut pas dire contrainte
ATS
2.10.2018 - 12:03
Le Tribunal fédéral a admis le recours d'un garagiste genevois, condamné parce qu'il avait porté plainte contre un ancien employé qui faisait valoir diverses prétentions. Selon les circonstances, une telle plainte ne relève pas nécessairement de la contrainte.
Administrateur d'une société de location de voitures, le recourant avait été condamné à 45 jours-amendes avec sursis pour tentative de contrainte. Il lui était reproché d'avoir porté plainte contre un ancien employé qui réclamait quelque 82'000 francs à titre d'indemnité de licenciement et de paiement de ses heures supplémentaires.
La plainte pour violation de domicile et vol reposait sur le fait que l'employé avait accepté que des jeunes de son quartier tournent un clip dans le garage où étaient stationnées les voitures de luxe de l'agence. La vidéo avait été ensuite postée sur Youtube.
Plainte sur plainte
La justice genevoise n'était pas entrée en matière sur cette plainte, estimant que la violation de domicile n'était pas réalisée et le vol d'usage était de peu d'importance. L'ex-employé avait alors déposé plainte à son tour contre son patron pour tentative de containte.
Dans un arrêt publié mardi, le Tribunal fédéral rappelle que la contrainte implique l'usage de la violence ou la menace d'un dommage sérieux afin d'obliger une personne à faire ou à ne pas faire un acte. Le moyen de contrainte doit être de nature à impressionner une personne dont la sensibilité se situe dans la moyenne.
Pour que la contrainte soit contraire au droit, elle doit en outre être illicite, soit par le moyen utilisé, soit parce qu'il est disproportionné par rapport au but visé. Ainsi, menacer d'une plainte pénale pour une infraction qui ne repose pas sur des soupçons sérieux est inadmissible.
Démarche licite
Dans le cas présent, la justice genevoise avait considéré que le recourant avait menacé son ancien collaborateur d'un dommage sérieux - la plainte - afin de le forcer à renoncer aux prétentions découlant du droit du travail. Le Tribunal fédéral relève plutôt que le patron avait des motifs sérieux de tenir son employé pour responsable du tournage du clip puisque des connaissances de celui-ci figuraient sur la vidéo.
Dans ces conditions, la menace, puis le dépôt de la plainte, étaient des démarches licites. Même si le Ministère public a décidé par la suite de ne pas entrer en matière. L'évocation d'une plainte dans le cadre des discussions visant à régler le différend entre les deux protagonistes n'était pas de nature à intimider l'employé puisqu'il était représenté par un avocat.
Cette menace ne peut donc pas être considérée comme un moyen de pression abusif, estime le Tribunal fédéral. La cause est renvoyée à la justice genevoise pour nouvelle décision. (arrêt 6B_415/2018 du 20 septembre 2018)
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