Syndrome du bébé secouéUn père autiste bientôt exécuté malgré de sérieux doutes sur sa culpabilité
AFP
17.10.2024
Deux hommes sont en instance d'exécution jeudi dans le sud des Etats-Unis, dont un, atteint d'autisme, pour la mort en 2002 de sa fille, attribué au syndrome du bébé secoué, malgré les sérieux doutes apparus depuis sur ce diagnostic.
AFP
17.10.2024, 20:12
17.10.2024, 20:30
Marc Schaller
Seul un sursis de la Cour suprême des Etats-Unis ou du gouverneur républicain du Texas, Greg Abbott, peuvent encore arrêter l'exécution jeudi soir au pénitencier de Huntsville de Robert Roberson, 57 ans, condamné pour la mort de sa fille, Nikki.
Derrick Dearman, 36 ans, condamné pour avoir tué en 2016 cinq personnes à coups de hache et par balles, doit pour sa part être exécuté au pénitencier d'Atmore, en Alabama.
Si ces deux exécutions sont réalisées, cela portera le total à 21 aux Etats-Unis depuis le début de l'année, toutes par injection létale à l'exception de deux en Alabama par inhalation d'azote, une méthode que l'ONU a comparée à une forme de «torture».
Son indifférence avait pesé lourd dans sa condamnation
Les défenseurs de Robert Roberson font valoir que le diagnostic du syndrome du bébé secoué, établi en 2002 à l'hôpital où il avait amené sa fille aux urgences dans état critique, était erroné.
De plus, son autisme, finalement diagnostiqué officiellement en 2018 et interprété à l'époque comme une indifférence à la situation, a pesé lourd dans sa condamnation, selon eux.
«Il n'y a pas eu de crime, seulement la mort tragique de causes naturelles d'une petite fille», affirment les avocates de Robert Roberson dans leur recours devant la Cour suprême.
Elles s'appuient notamment sur des analyses médicales récentes imputant de la mort de Nikki à une grave pneumonie, non détectée à l'époque, aggravée par la prescription de médicaments inadaptés, comme en attestent dans une lettre 34 médecins.
«Nous cherchions un coupable, nous lui avons collé cette étiquette»
L'ancien policier Brian Wharton, chargé du dossier à l'époque et qui défend depuis des années l'annulation de la condamnation, a de nouveau regretté mardi que l'enquête se soit concentrée sur la piste du syndrome du bébé secoué «à l'exclusion de toutes les autres possibilités».
«Nous cherchions un coupable, nous lui avons collé cette étiquette et nous l'avons fait tenir sur une pseudo base scientifique», a-t-il reconnu.
Les partisans de Robert Roberson invoquent également une décision de la cour d'appel du Texas qui la semaine dernière dans une affaire similaire a annulé une condamnation de 2000 sur la base du syndrome du bébé secoué, considérant que l'analyse scientifique avait évolué depuis, et ordonné un nouveau procès, avec l'accord de l'accusation.
Il s'agirait de la première exécution aux Etats-Unis d'une personne condamnée sur cette base, selon ses partisans.
«Le plus étonnant dans le cas de Robert», c'est qu'il n'y a «pas de crime», s'est indigné en septembre lors d'une conférence de presse en ligne l'auteur de polars à succès John Grisham, ancien avocat et militant de la lutte contre les erreurs judiciaires.
Mais le condamné a épuisé tous ses recours devant la justice du Texas, dont la commission des grâces a rejeté mercredi à l'unanimité les demandes de commutation de sa peine et de sursis à son exécution de 180 jours.
Le gouverneur républicain ne pourrait en conséquence lui accorder qu'un sursis de 30 jours.
La demande de clémence en faveur de Robert Roberson est soutenue par 86 élus de la Chambre des représentants du Texas, dont plus d'un tiers de républicains.