Qui a peur de la pénurie? Tant d'énergie dépensée... à craindre d'en manquer 

Valérie Passello

31.8.2022

Depuis des mois, le conflit en Ukraine et les sanctions qui en découlent font craindre que Poutine vienne à nous couper les vivres gaziers. La possibilité d'une pénurie d'énergie affole tout le monde. À l'orée de l'hiver, les bougies se vendent presque aussi bien que les rouleaux de papier de toilette dans une époque pas si éloignée. Beaucoup d'agitation pour pas grand-chose? Opinion.

Cet hiver, dans le pire des cas, l'électricité pourrait être coupée «pendant quelques heures», selon la Confédération. (image d'illustration)
Cet hiver, dans le pire des cas, l'électricité pourrait être coupée «pendant quelques heures», selon la Confédération. (image d'illustration)
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Valérie Passello

31.8.2022

31 décembre 1999. La panique tous azimuts. Cela faisait bien une année que tout le monde parlait du «bug de l'an 2000». Par une impardonnable erreur d'anticipation dans le joyeux univers du codage, les ordinateurs n'étaient pas conçus pour faire le saut d'un siècle à l'autre. Après 99, on allait bêtement revenir à 0. 

Pendant les mois qui ont précédé, les experts se sont perdus en conjectures, élaborant toutes sortes de scénarios catastrophe. La menace que notre monde informatisé s'écroule était palpable. Tout pouvait s'arrêter à minuit. Une gigantesque panne mondiale. 

Et à minuit? Rien. Pas davantage de bug à minuit une. Ce que l'on peut qualifier, avec le recul, de foin international, n'a servi qu'à nourrir les thèses apocalyptiques. 

22 ans plus tard, à l'instar des ordinateurs de l'époque, voilà notre trouillomètre qui retombe à 0. Quelque soit le journal ouvert, le site d'info consulté ou la chaîne de télévision branchée, on ne parle plus que de la pénurie d'électricité hivernale. Enfin, la potentielle pénurie. 

Il est vrai qu'en matière d'énergie, la Suisse dépend beaucoup de l'étranger. Il est vrai aussi qu'en cas de défaut d'approvisionnement, il va falloir prendre des mesures. D'accord.

Mais, si j'ai bien compris les messages de la Confédération et le nombre incalculable d'articles à ce sujet, le risque le plus important, pour moi, petite citoyenne, c'est de me retrouver, de temps à autre, «sans électricité pendant quatre heures». Et «en dernier recours», quand toutes les autres solutions auront été explorées. 

Comme l'écureuil accumule les noisettes en prévision de la saison froide, le bon citoyen suisse passe donc, la peur au ventre, tout le temps qui lui reste avant l'hiver à faire des réserves. Génératrices, batteries, chauffages d'appoint et bien sûr bougies, s'arrachent.

Tout ceci pour des coupures d'électricité de quelques heures, qui «ne sont pas exclues». Un cauchemar pour nous, habitants d'un pays où ne jamais manquer de rien est la règle.

Notre cauchemar, il ferait peut-être doucement rigoler Nelson, qui vit à Buenos Aires et qui a appris à se passer de courant pendant des jours entiers, par 40°C à l'ombre. Peut-être qu'Aminata, de Ouagadougou, lèverait les yeux au ciel en pensant à notre cauchemar, elle dont le restaurant n'est alimenté en électricité que quelques heures par jour. 

Mais revenons à nos nombrils. Plutôt que de dépenser toute notre énergie à craindre d'en manquer, essayons déjà d'apprendre à l'économiser. Arrêtons de mettre tous nos joules dans le grand panier de l'alarmisme et relativisons. 

D'une part, il ne se passera peut-être rien du tout. D'autre part, regarder les étoiles plutôt que la télé, vous verrez, ça recharge vos batteries...