Le Tribunal de Nyon (VD) n'a pas sanctionné mardi une mère qui s'était endormie sur son nourrisson et l'avait asphyxié. Les juges ont estimé que cette femme, qui s'était massivement enivrée avant le drame, n'était pas responsable de ses actes.
Keystone-SDA, gsi, ats
19.07.2022, 15:41
19.07.2022, 16:17
ATS
La tragédie s'était nouée une matinée de juillet 2020 dans un appartement à Prangins. Il faut même parler de double tragédie, sachant qu'un autre bébé de cette femme était mort en 2018 dans des circonstances similaires.
Si la procédure pénale avait été classée en 2018 – les causes du décès n'avaient pas pu être clairement établies -, le second drame a bel et bien été porté au Tribunal correctionnel de La Côte à Nyon.
A l'issue de ce procès, les juges ont conclu à l'irresponsabilité de l'accusée. Cette Anglaise de 39 ans souffre de troubles de la personnalité, avec des traits «borderline», qui se traduisaient entre autres par une consommation excessive d'alcool.
«Au vu de sa pathologie, il ne lui était pas possible de résister», a relevé la présidente du Tribunal Patricia Cornaz. «Ses conflits internes devenaient si insupportables qu'ils devaient être évacués», notamment par une pratique de «binge drinking», a-t-elle ajouté, se référant aux rapports des experts psychiatriques. «Elle ne se rendait même plus compte qu'elle mettait ses enfants en danger», a poursuivi la magistrate.
Traitement imposé
Du point de vue juridique, si les conditions sont réunies pour conclure à un homicide par négligence, l'accusée doit néanmoins être libérée de ce chef de prévention au motif de son «irresponsabilité», a conclu à la Cour.
Les juges ont toutefois ordonné que la mère continue son traitement ambulatoire, à la fois psychiatrique, addictologique et psychothérapeutique. Celui-ci devra se poursuivre «aussi longtemps que nécessaire» afin de minimiser les risques de récidive.
La semaine dernière lors de son audition, la prévenue avait vanté les mérites de ce traitement, expliquant notamment qu'elle n'avait plus bu une goutte d'alcool depuis octobre 2020.
«J'ai compris et accepté que je n'avais aucun contrôle sur l'alcool», avait-elle déclaré aux juges. Elle avait aussi affirmé avoir saisi la nature de ses troubles psychiques et l'importance d'un suivi.
«Deux morts sur la conscience»
Tant l'avocat de la prévenue que le procureur ont dit leur «satisfaction» à l'issue de ce jugement. Tous deux avaient également conclu, à l'instar du Tribunal, que l'accusée devait être déclarée irresponsable de ses actes.
«Elle est certes acquittée pénalement, mais elle devra vivre avec deux décès sur la conscience», a remarqué le procureur Jean-Marie Ruede. Comme lors de son réquisitoire, il a souligné «le gâchis» de cette affaire, regrettant que cette femme n'ait pas été mieux suivie après le premier drame de 2018.
Le représentant du Ministère public s'est également réjoui qu'un traitement ait été imposé, contrairement à ce que souhaitait la défense. Cela doit éviter «une certaine banalisation» qui, avec le temps, pourrait survenir chez la mère.