Tournant en 2035 La route reste semée d'embûches pour la voiture électrique en Europe

Relax

12.4.2024 - 09:03

(AFP) – Maillon important du plan climat européen, la voiture électrique est engagée sur un chemin qui reste jonché de nids de poule à une décennie d'un jalon crucial.

Moins de 30% des Européens se disent prêts à acheter un véhicule électrique, selon l'ACEA, et plus de la moitié excluent de dépenser plus de 35.000 euros pour une voiture, un niveau de prix où les modèles électriques sont rares.
Moins de 30% des Européens se disent prêts à acheter un véhicule électrique, selon l'ACEA, et plus de la moitié excluent de dépenser plus de 35.000 euros pour une voiture, un niveau de prix où les modèles électriques sont rares.
Kikujiarm / Getty Images

Alors que la vente de voitures thermiques neuves sera interdite à compter de 2035 au sein de l'UE, celle de véhicules rechargeables «zéro émission» cale ces derniers mois sur le Vieux Continent.

Depuis le début de l'année, la part de marché de l'électrique a reculé, à 12% ou moins contre 14,6% l'an dernier, plombée notamment par l'Allemagne, le principal marché européen, qui a brutalement mis fin à ses aides à l'achat fin 2023.

Secrétaire générale de l'Association des constructeurs européens d'automobiles (ACEA), Sigrid de Vries évoque son «inquiétude».

Moins de 30% des Européens se disent prêts à acheter un véhicule électrique, selon l'ACEA, et plus de la moitié excluent de dépenser plus de 35.000 euros pour une voiture, un niveau de prix où les modèles électriques sont rares.

«L'échéance 2035, c'est vraiment demain, surtout lorsqu'on parle de cycles de production. Nous n'avons que dix ans pour passer de 15% (de véhicules propres) à 100%», soulignait Mme de Vries lors d'une conférence sur la voiture électrique la semaine dernière à Lillestrøm, près d'Oslo.

Premier mode de déplacement des Européens, l'automobile représente environ 15% des émissions de CO2 du continent, et sa décarbonation est donc essentielle pour permettre à Bruxelles de respecter ses engagements climatiques.

Pays hôte de la conférence --et gros producteur d'hydrocarbures--, la Norvège, qui n'est pas membre de l'UE, fait figure de modèle. Grâce à des taxes très favorables, l'électrique, tiré par le constructeur Tesla, y a représenté 90% des nouvelles immatriculations au premier trimestre, le royaume s'étant fixé l'objectif d'atteindre 100% dès 2025.

Des constructeurs comme Volkswagen et Volvo ont déjà cessé d'y commercialiser leurs modèles thermiques. 

Ventes en «dents de scie»

Ailleurs, l'électrification est plus poussive. 

Le Royaume-Uni a décalé de cinq ans l'interdiction de la vente de voitures thermiques neuves, désormais prévue en 2035, et beaucoup jugent cette échéance irréaliste pour le continent.

Les oscillations des ventes ne préoccupent pas Nissan, un des premiers constructeurs traditionnels à s'être diversifié dans les voitures rechargeables, avec sa Leaf.

«C'est en dents de scie et ça sera toujours comme ça», explique à l'AFP son vice-président régional électrification et services connectés, Guillaume Pelletreau. 

«Il y a eu un départ de vague de l'électrification extrêmement fort dans les deux dernières années et aujourd'hui on commence à normaliser un peu le processus. On voit nettement la tendance à la hausse malgré tout».

Volkswagen, Stellantis ou Renault comptent lancer des modèles électriques moins chers dans les prochains mois, mais s'appuient aussi sur leurs modèles hybrides pour pousser leurs ventes.

En France, une forte subvention de l'Etat aux ménages les plus modestes a permis de faire exploser les ventes pendant quelques semaines.

Parmi les freins évoqués par les professionnels: la difficulté à déployer les infrastructures adéquates rapidement et partout. Dans l'UE, plus de la moitié des points de recharge sont aujourd'hui concentrés dans deux pays, l'Allemagne et les Pays-Bas, relève l'ACEA.

En Espagne --où l'on ne remplace sa voiture que tous les 14 ans--, 65% des automobilistes se garent dans la rue, ce qui complique la recharge à domicile, souligne Isabel Gorgoso, directrice «nouvelles mobilités» du groupe énergétique Cepsa.

«L'Espagne, c'est la Norvège il y a dix ans», affirme-t-elle.

Autres griefs, l'empilement des réglementations --jusqu'à neuf par an-- au niveau européen et l'inconsistance des politiques nationales qui pourrait être encore exacerbée par la montée des mouvements populistes, généralement climato-sceptiques.

«Avec les élections européennes à haut risque qui approchent», prévient Mme de Vries, «ce qui se passera dans les prochains mois pourrait vraiment déterminer le destin de l'industrie automobile européenne».