Allemagne Allemagne: Russe condamné à perpétuité pour un meurtre sur ordre présumé de Moscou

ATS

15.12.2021 - 13:45

Keystone-SDA

Un Russe a été condamné mercredi à Berlin à la réclusion à perpétuité pour le meurtre d'un opposant tchétchène sur ordre présumé de Moscou. Cela dans un contexte de tensions diplomatiques entre l'Allemagne et la Russie.

L'ancienne chancelière Angela Merkel avait veillé à ne pas rompre le dialogue avec Moscou, partenaire économique important.
Les premières déclarations de son successeur Olaf Scholz sont ainsi particulièrement scrutées.
L'ancienne chancelière Angela Merkel avait veillé à ne pas rompre le dialogue avec Moscou, partenaire économique important. Les premières déclarations de son successeur Olaf Scholz sont ainsi particulièrement scrutées.
ATS

La Cour de Berlin, qui le jugeait depuis octobre 2020, a reconnu cet homme, désigné sous le nom de Vadim Krasikov, coupable d'avoir tué par balles un Géorgien issu de la minorité tchétchène dans un parc de Berlin, le 23 août 2019. Les juges l'ont également privé de la possibilité de demander une libération conditionnelle au bout de 15 ans.

Le Géorgien Tornike Kavtarachvili, 40 ans, avait été abattu de trois balles, en pleine journée, au coeur de la capitale allemande, une affaire qui a empoisonné les relations déjà tendues entre l'Allemagne et la Russie.

Main de Moscou clairement identifiée

Moscou a toujours nié toute implication, mais la justice allemande a clairement désigné les autorités russes. «L'accusé a été commandant d'une unité spéciale des services secrets russes FSB», a affirmé le procureur Lars Malkies lors de son réquisitoire le 7 décembre.

«Il a liquidé un opposant politique par représailles», a-t-il ajouté, évoquant «un attentat à l'évidence préparé de longue date» et exécuté «de sang froid».

Ancien dirigeant séparatiste tchétchène

Ancien dirigeant séparatiste tchétchène, le Géorgien avait combattu contre les forces russes entre 2000 et 2004. Il vivait depuis 2016 avec sa famille en Allemagne où il avait demandé l'asile.

Les faits se sont déroulés à l'heure du déjeuner : le meurtrier, se déplaçant à vélo, s'était approché par derrière de sa victime et avait tiré deux fois avec un silencieux, avant de l'achever par une balle à bout portant dans la tête, selon le procureur. Il avait été interpellé peu après les faits près des lieux du forfait, un prolongement du grand parc de Tiergarten.

Durant tout son procès, l'accusé a réfuté l'identité que lui prête le Parquet, disant ne «connaître personne» répondant au nom de Krasikov. Par la voix de son avocat Robert Unger, il a affirmé s'appeler Vadim Sokolov, 50 ans, «russe, célibataire et ingénieur en construction».

Tatouages révélateurs

Durant le procès, plusieurs indices sont venus renforcer la conviction du parquet sur l'identité de l'accusé, comme une photo privée de Krasikov avec deux tatouages identiques à ceux du suspect.

Si le Kremlin a toujours farouchement nié être derrière cet assassinat, le président Vladimir Poutine avait qualifié la victime de «combattant très cruel et sanguinaire». Il a assuré avoir demandé son extradition, ce que Berlin a démenti.

Kremlin fidèle à sa ligne

Fin 2019, l'Allemagne a expulsé deux diplomates russes pour protester contre leur manque de coopération, mesure à laquelle Moscou a répliqué en renvoyant à son tour deux diplomates allemands.

Ce meurtre, l'empoisonnement de l'opposant au Kremlin Alexei Navalny, soigné à l'été 2020 dans la capitale allemande avant son emprisonnement en Russie, tout comme celui de l'ex-espion russe Sergueï Skripal au Royaume-Uni en 2018, ont fait peser de lourdes suspicions sur le rôle des services de sécurité russes dans des opérations violentes.

Mais l'implication de Moscou n'a jusqu'ici jamais été prouvée dans ces dossiers et le Kremlin a toujours systématiquement nié la moindre responsabilité.

Cyberattaque du Bundestag

Ces affaires se sont ajoutées à une série de tensions diplomatiques entre Berlin et Moscou, depuis la cyberattaque du Bundestag en 2015 attribuée à la Russie.

Deux semaines avant les élections législatives allemandes du 26 septembre, la justice a par ailleurs ouvert une enquête pour cyberespionnage de députés, derrière lequel Berlin soupçonne la main du Kremlin.

A cela s'ajoute de nombreuses divergences sur le plan géopolitique, comme la situation en Syrie, l'annexion de la Crimée et le conflit armé dans l'Est de l'Ukraine.

Déclarations de Scholz scrutées

Pragmatique, l'ancienne chancelière Angela Merkel avait toutefois veillé à ne pas rompre le dialogue avec Moscou, partenaire économique important.

Les premières déclarations de son successeur Olaf Scholz sont ainsi particulièrement scrutées. Depuis son arrivée à la chancellerie, la semaine dernière, le dirigeant social-démocrate a averti que Moscou s'exposait à des «conséquences» en cas d'escalade en Ukraine.

Sa ministre des Affaires étrangères écologiste, Annalena Baerbock, a précisé les menaces en affirmant que le nouveau gazoduc germano-russe controversé Nord Stream 2 ne serait pas autorisé à fonctionner si les tensions avec Kiev s'aggravent.