Les manifestants irakiens refluaient vers la place Tahrir, scandant sous les tirs «Par notre âme et par notre sang, nous nous sacrifions pour toi, Irak», selon des vidéos tournées en direct ou mises en ligne par des protestataires.
Depuis le 1er octobre, le premier mouvement de contestation spontané de l'histoire récente de l'Irak a été marqué par près de 440 morts et 20'000 blessés, selon un bilan compilé par l'AFP à partir de sources médicales et policières.
Au moins 12 manifestants tués à Bagdad
Les manifestants irakiens refluaient vers la place Tahrir, scandant sous les tirs «Par notre âme et par notre sang, nous nous sacrifions pour toi, Irak», selon des vidéos tournées en direct ou mises en ligne par des protestataires.
Depuis le 1er octobre, le premier mouvement de contestation spontané de l'histoire récente de l'Irak a été marqué par près de 440 morts et 20'000 blessés, selon un bilan compilé par l'AFP à partir de sources médicales et policières.
Après quelques jours d'accalmie, la violence a de nouveau explosé vendredi en Irak. Au moins douze manifestants ont été tués à Bagdad, au moment où Washington dénonçait «l'ingérence» de Téhéran dans ce pays et imposait des sanctions à des miliciens pro-iraniens.
Ces nouveaux décès portent à 440 le nombre de morts – essentiellement des manifestants – depuis le lancement début octobre d'un vaste mouvement spontané de contestation contre le pouvoir. Quelque 20'000 personnes ont également été blessées.
Depuis que les partisans des paramilitaires pro-Iran se sont livrés à une démonstration de force sur la place Tahrir de Bagdad jeudi, les manifestants disaient redouter une nouvelle flambée de violence. Celle-ci s'est produite vendredi soir, quand des hommes armés à bord de pick-ups ont débarqué aux abords d'un immense parking de plusieurs étages que les manifestants occupaient depuis des semaines près de Bagdad, ont raconté des protestataires.
Le bilan est pour le moment établi à douze morts et des dizaines de blessés, selon des sources médicales qui précisent qu'il pourrait encore grimper.
Tirs dans le noir
Tirant des salves de balles réelles, parfois dans le noir le plus total au gré des coupures d'électricité fréquentes en Irak, ces hommes armés sont parvenus à déloger les manifestants du parking, ont rapporté des manifestants et des médecins qui ont également dit avoir soigné des protestataires blessés à coup de couteaux.
Sous les tentes transformées en hôpitaux de campagne de la place Tahrir, des ambulances amenaient des manifestants blessés. Des médecins tentaient de sauver des jeunes hommes dont le sang s'écoulaient de leur bras ou de leur jambe perforée par les balles, ont rapporté des témoins.
Quant au parking, proche de la place Tahrir, épicentre de la contestation contre le pouvoir et son parrain iranien, il était en feu, un incendie provoqué par des assaillants «non identifiés», selon la télévision d'Etat.
Les manifestants, eux, refluaient vers Tahrir, scandant sous les tirs «Par notre âme et par notre sang, nous nous sacrifions pour toi, Irak», selon des vidéos tournées en direct ou mises en ligne par des protestataires.
Quel candidat ?
La journée avait pourtant été calme sur Tahrir où d'importants rassemblements se sont tenus, rejoints par des dignitaires religieux venus des sanctuaires chiites du pays.
Peu avant, le grand ayatollah Ali Sistani, plus haute autorité religieuse chiite d'Irak, avait pris ses distances avec une classe politique conspuée par la rue depuis le 1er octobre et appelé à rejeter «les ingérences étrangères» dans le choix du prochain chef de gouvernement.
Le dignitaire de 89 ans qui passe pour avoir fait et défait tous les Premiers ministres depuis le renversement du dictateur Saddam Hussein après l'invasion américaine du pays en 2003, a également indiqué qu'il ne jouait «aucun rôle» dans les négociations en vue de la désignation du prochain.
Depuis plusieurs jours, les partis politiques tentent de faire émerger un candidat acceptable par tous dans le pays. Sous l'égide de deux émissaires de Téhéran – le général Qassem Soleimani et le dignitaire chiite en charge du dossier irakien au Hezbollah libanais, Mohammed Kaoutharani.
Sanctions américaines
En soirée, les Etats-Unis ont dénoncé une «grave violation de la souveraineté irakienne» et une «ingérence» iranienne, alors qu'ils dévoilaient une nouvelle liste de dirigeants irakiens visés par des sanctions.
«Le peuple irakien veut récupérer son pays. Il demande des réformes authentiques et veut des dirigeants dignes de confiance, qui feront passer les intérêts nationaux irakiens en priorité», a déclaré le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo dans un communiqué.
Les sanctions de Washington visent trois chefs de factions du Hachd al-Chaabi, une coalition de paramilitaires pro-Iran désormais intégrée à l'Etat, pour «violations graves des droits humains».
Il s'agit de Qaïs al-Khazali, chef d' Assaïb Ahl al-Haq, l'une des plus importantes factions pro-Iran du Hachd, «bête noire» des Américains et déjà sous le coup de sanctions, ainsi que de Laith al-Khazali et Hussein al-Lami, chef de la puissante sécurité du Hachd qui regroupe les unités d'élite de la coalition.
Le dernier homme, le sulfureux politicien sunnite Khamis al-Khanjar, est, lui, sanctionné pour «corruption», un mal endémique en Irak qui a déjà coûté au pays – l'un des plus riches en pétrole du monde – l'équivalent de deux fois son PIB.
Système à bout de souffle
«Que les voleurs dégagent!«, c'est ce que répètent à l'envi les manifestants depuis plus de deux mois. Seize ans après la chute de Saddam Hussein, ils estiment que le système mis en place par les Américains et désormais sous la mainmise des Iraniens est à bout de souffle. Ils ne veulent rien de moins qu'une nouvelle Constitution et une classe politique entièrement renouvelée.
Les manifestants conspuent le pouvoir dans l'un des pays les plus corrompus au monde, et dénoncent le chômage qui touche un jeune sur quatre, la pauvreté endémique et les ingérences étrangères, tout particulièrement celles de l'Iran.
Ils ont obtenu une première victoire avec la démission le 1er décembre d'Adel Abdel Mahdi qui gère les affaires courantes jusqu'à la désignation de son remplaçant par le président Barham Saleh à qui il reste une dizaine de jours pour le faire.
Retour à la page d'accueil