BélarusBélarus: la police disperse des manifestants
ATS
1.11.2020 - 16:59
La police bélarusse a dispersé dimanche des manifestants et procédé à des arrestations près d'un site emblématique des répressions staliniennes. C'est un lieu hautement symbolique pour l'opposition au président Alexandre Loukachenko, en bordure de Minsk.
Selon une journaliste de l'AFP sur place, des interpellations ont eu lieu dans un champ à proximité du site de Kourapaty, au nord-est de la capitale, où des dizaines de milliers de personnes ont été exécutées lors de la terreur stalinienne dans les années 1930 et 1940. Des fourgons pénitentiaires ont été déployés et des explosions de grenades assourdissantes ont été entendues, selon une journaliste de l'AFP.
Plus tôt dans la journée, la police avait procédé à des tirs de sommation pour disperser la foule, sans que ne soit établi le type d'arme utilisé. Selon l'ONG spécialisée Viasna, au moins 120 personnes ont été arrêtées, principalement à Minsk.
Depuis la fin des années 1980, la zone boisée de Kourapaty est devenue le principal lieu de commémoration des crimes de l'URSS au Bélarus. C'est également un endroit symbolique de l'opposition au président Loukachenko, régulièrement accusé de valoriser la période soviétique.
La dernière dispersion violente d'un rassemblement près des fosses communes de Kourapaty remonte à 1988. La police soviétique avait alors utilisé des gaz lacrymogènes contre les manifestants.
Dimanche, selon des journalistes de l'AFP, entre 20'000 et 30'000 personnes ont défilé à Minsk pour appeler au départ du président Alexandre Loukachenko. Une partie des manifestants n'a pu atteindre la zone de Kourapaty, face à l'important dispositif policier déployé. «Dégage, toi et tes flics anti-émeutes!«, scandaient des protestataires, s'adressant au président Loukachenko.
Trois mois de contestation
Depuis sa réélection contestée le 9 août, le chef de l'Etat, 66 ans dont 26 au pouvoir, fait face à un mouvement de protestation historique qui réunit chaque semaine des dizaines de milliers de manifestants, malgré les violences policières et des milliers d'arrestations. Après quasiment trois mois de contestation, la situation semble être dans une impasse face au refus de M. Loukachenko de quitter le pouvoir.
La principale opposante en exil, Svetlana Tikhanovskaïa, avait appelé cette semaine à une grève nationale pour faire plier le pouvoir. Mais le mouvement, face aux pressions, n'a pas débouché sur une paralysie de l'économie, en grande partie contrôlée par l'Etat. Il a été suivi en revanche de multiples actions de protestation d'étudiants.
«Nous sommes très fatigués. Quand on manifeste, on nous tabasse. Quand on fait la grève, on nous licencie. On expulse aussi nos enfants des universités», soupire Iakov, un manifestant de 51 ans, qui n'a pas souhaité donner son nom de famille. Cet ingénieur dit se sentir «abandonné par l'Ouest et Tikhanovskaïa», affirmant attendre de cette dernière des «actions plus décisives», notamment des sanctions économiques renforcées contre Minsk.
Jusqu'à présent, l'Union européenne a sanctionné 40 responsables bélarusses pour leur rôle dans les fraudes électorales d'août et la répression des manifestations. Les dirigeants européens se sont également entendus pour punir directement Alexandre Loukachenko.
Victoria Pavlovitch, une employée de banque venue manifester à Minsk, espère toujours que le mouvement ait «une chance de changer le pays» pour que «nos enfants ne vivent plus dans la peur».
Plusieurs changements
Cette semaine, le président Loukachenko a effectué plusieurs changements au sein de son appareil sécuritaire, nommant deux nouveaux fonctionnaires à la tête du ministère de l'Intérieur et de la police de Minsk.
Il a également ordonné aux forces de l'ordre de sévir contre ses critiques et appelé à «ne pas faire de prisonniers». Les autorités avaient prévenu auparavant qu'elles pourraient recourir à des «balles réelles» contre les manifestants.
Réfugiée en Lituanie, Mme Tikhanovskaïa a salué dimanche les participants au Bélarus d'une nouvelle «marche pacifique contre la terreur du gouvernement.»