Britanniques et Européens semblaient encore très loin d'un accord sur leur relation post-Brexit après un troisième cycle de négociation jugé «très décevant» et sans progrès majeur cette semaine. La période de transition est prévue jusqu'à fin 2020.
«Au moment ou je vous parle, je ne suis pas optimiste (...) J'ai invité le Royaume-Uni à changer de tactique s'ils veulent vraiment un accord avec nous», a lancé vendredi le négociateur en chef de l'UE, Michel Barnier, lors d'une conférence de presse à Bruxelles.
«Il y a encore aujourd'hui, pour tout vous dire, une réelle incompréhension» avec Londres, a ajouté le Français. «Nous sommes prêts à toutes les options», y compris au «no deal» (l'absence d'accord, ndlr), a-t-il prévenu.
Au même moment, son homologue britannique David Frost fustigeait le «peu de progrès» accomplis et réclamait lui aussi «un changement d'approche» de Bruxelles avant le prochain cycle de discussions le 1er juin. «Il est difficile de comprendre pourquoi l'UE insiste sur une approche idéologique qui rend plus difficile la conclusion d'un accord», a-t-il déclaré.
Echanges «parfois un peu virils»
Une source proche des discussions a évoqué des échanges «fermes, parfois un peu virils» cette semaine, contrairement aux rounds précédents. «Le ton s'est haussé un peu plus», abonde une source européenne, qui qualifie la semaine de «frustrante».
«On fait du sur place et le temps passe», faute de «vision commune sur ce qu'on est en train d'essayer de faire», explique-t-elle. Les précédents échanges, fin avril, s'étaient déjà achevés sur un constat d'échec, laissant planer une forte incertitude sur la capacité de Londres et Bruxelles à s'entendre, comme prévu, d'ici la fin de l'année.
Les Britanniques, qui ont formellement quitté l'UE le 31 janvier, sont entrés, jusqu'à la fin de l'année, dans une période de transition, pendant laquelle ils continuent d'appliquer les normes de l'UE. Les négociateurs doivent théoriquement décider en juin s'ils prolongent ou non cette période, afin de se laisser plus de temps pour négocier.
«Aveuglement»
Mais Londres rejette catégoriquement cette idée, même si l'épidémie de coronavirus a chamboulé le calendrier des discussions, ainsi que leur forme: exclusivement par visioconférence.
«Ils ont l'air convaincus qu'on peut faire sans (extension), donc on va faire sans. Mais c'est un peu une aberration», commente la source européenne, pour qui les Britanniques font preuve d'une «mauvaise foi couplée avec un aveuglement économique».
«Nous ne voulons pas (d'extension). Nous ne l'accepterions pas si on nous le proposait», a encore affirmé vendredi une source britannique proche des discussions.
L'UE pour un projet ambitieux
Autre point de discorde: la forme de l'accord. Les Européens réclament un accord large et ambitieux sur l'ensemble de la relation, quand le Royaume-Uni ne demande rien de plus qu'un accord classique de libre-échange – du même type que celui conclu par l'UE avec le Canada -, autour duquel pourraient être négociés plusieurs petits textes sectoriels.
Pour David Frost, tout cela pourrait d'ailleurs «être conclu sans difficultés majeures dans le temps disponible». Mais l'UE n'accepterait un accord commercial avec le Royaume-Uni que s'il était assorti de garanties en matière de concurrence au niveau social, environnemental ou fiscal (le «level playing field», ndlr). Bruxelles veut éviter à tout prix qu'une économie dérégulée ne surgisse à sa porte.
Progrès sur la pêche
Cette demande européenne constitue même, selon David Frost, «le principal obstacle» à un accord, car Londres n'entend pas être lié à l'avenir «au droit ou aux normes de l'UE». Sur ce point crucial du «level playing field», «ce fut un round de divergence sans aucun progrès», a tranché Michel Barnier, pour qui les Britanniques réclament «les bénéfices d'un Etat membre, sans les obligations».
«Seul point positif» souligné par le Français, la question ultra-sensible de la pêche, sur laquelle les négociateurs ont commencé «une discussion». Leur objectif est de s'entendre avant juillet.
Le Royaume-Uni a transmis cette semaine un texte résumant sa position: une renégociation annuelle des quotas de pêche dans ses eaux, ce que l'UE rejette pour l'instant.
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