Venezuela Caracas hausse le ton contre l'opposition

ATS

10.5.2019 - 23:46

Edgar Zambrano est notamment accusé de haute trahison et de conspiration pour sa participation «active» à l'appel au soulèvement contre le président Nicolas Maduro lancé par Juan Guaido (archives).
Edgar Zambrano est notamment accusé de haute trahison et de conspiration pour sa participation «active» à l'appel au soulèvement contre le président Nicolas Maduro lancé par Juan Guaido (archives).
Source: KEYSTONE/EPA EFE/RAYNER PENA

Le vice-président de l'Assemblée nationale vénézuélienne arrêté mercredi pour sa participation au soulèvement raté du 30 avril, a annoncé la Cour suprême vendredi. Edgar Zambrano a été placé en détention provisoire dans une prison militaire de Caracas.

Un tribunal «compétent en matière de terrorisme» a décidé son placement dans la prison de la police militaire du Fort-Tiuna, le principal complexe militaire de la capitale vénézuélienne, a ajouté la plus haute instance judiciaire du pays dans un communiqué.

Son avocate Lilia Camejo s'est immédiatement insurgée contre cette mesure. Elle a dit ne pas comprendre pourquoi son client avait été transféré dans une prison «de la police militaire, alors qu'il s'agit d'un civil». «Depuis son arrestation, les droits du député (Edgar Zambrano) ont été violés. Nous n'avons pas eu accès à son dossier et nous n'avons pas pu être désignés comme ses avocats», a-t-elle expliqué à la presse.

«Haute trahison» et «complot»

Edgar Zambrano est le cas le plus emblématique des 10 parlementaires d'opposition que le pouvoir cherche à punir pour leur participation «active» au soulèvement manqué du 30 avril auquel avait appelé Juan Guaido, qui est reconnu président par intérim par une cinquantaine de pays. Ils sont notamment accusés de «haute trahison» et de «complot».

Des 10 députés incriminés, trois se sont réfugiés dans des résidences diplomatiques à Caracas. Un quatrième, Luis Florido, a annoncé dans une vidéo diffusée sur Twitter vendredi qu'il avait fui en Colombie pour se mettre «à l'abri d'un régime prêt à emprisonner des députés».

Le transfert d'Edgar Zambrano est aussi symptomatique du haussement de ton du gouvernement à l'égard de l'Assemblée nationale, 10 jours après la tentative de soulèvement. L'Assemblée nationale est la seule institution contrôlée par l'opposition. Mais depuis trois ans, l'exécutif ne respecte plus aucune de ses décisions, lui préférant l'Assemblée constituante, composée uniquement de fidèles du pouvoir chaviste.

«Statu quo»

Samedi, Juan Guaido va tenter de reprendre la main avec un appel à manifester dans tout le pays. A Caracas, ses partisans sont appelés à se rassembler dans le quartier de Las Mercedes. Ce nouvel appel à battre le pavé, le premier depuis le soulèvement manqué du 30 avril, devrait donner une indication sur le degré d'adhésion des anti-Maduro, plus de trois mois et demi après que l'opposant de 35 ans s'est proclamé président par intérim.

Le gouvernement socialiste, qui se réclame de l'héritage politique d'Hugo Chavez (1999-2013), qualifie ses efforts pour déloger Nicolas Maduro du pouvoir de tentative de «coup d'Etat» soutenue par l'administration du président américain Donald Trump.

«Il est probable que le statu quo se poursuive», estime dans une note Moises Rendon, du Center for Strategic and International Studies à Washington. Selon lui, Nicolas Maduro risque d'être «plus isolé que jamais aux plans diplomatique et économique», mais «les pressions externes et internes n'ont pas suffi à le convaincre, lui et son entourage, de négocier sa sortie».

Sanctions américaines

Le gouvernement vénézuélien a, entre autres, le soutien de la Russie, de l'Iran et de Cuba, son plus proche allié dans la région. Face à ce bloc, «l'empire» américain que Nicolas Maduro n'a de cesse de railler a pris de nombreuses sanctions à son encontre et de hauts responsables civils et militaires. La plus significative est un embargo sur le pétrole vénézuélien, poumon économique du pays.

Au nombre des contempteurs du président vénézuélien se trouve également son homologue brésilien d'extrême droite Jair Bolsonaro. En février, Caracas avait fermé sa frontière avec son grand voisin, au moment où l'opposition tentait de faire entrer de l'aide humanitaire.

Vendredi, le vice-président vénézuélien chargé de l'Economie Tareck El Aissami a annoncé la réouverture de la frontière, ainsi que celle avec Aruba, une île néerlandaise située face aux côtes vénézuéliennes. Dans la journée, le Brésil a indiqué que la réouverture de la frontière était effective. Les frontières avec la Colombie et les autres îles néerlandaises (Bonaire et Curaçao) restent en revanche fermées.

Appel à la rébellion

Dans une vidéo diffusée le 30 avril Juan Guaido avait appelé à la rébellion, flanqué d'un groupe de soldats qui avaient tourné le dos au président vénézuélien pour le rallier. La tentative avait fait long feu: au bout de quelques heures, 25 militaires avaient demandé l'asile à l'ambassade du Brésil et l'opposant Leopoldo Lopez, qui apparaissait aussi dans la vidéo, s'était réfugié dans celle d'Espagne. Le soir de l'appel au soulèvement, Nicolas Maduro affirmait avoir déjoué cette «escarmouche putschiste» et annonçait que les «traîtres» seraient punis.

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