Etats-Unis«C’est inimaginable...» - Trump et sa diplomatie de l'ombre
AFP
18.4.2024
Il reçoit dans son palais de Mar-a-Lago quand il n'est pas au tribunal ou en campagne, consulte et mène une diplomatie discrète tout en s'attaquant avec véhémence à la politique étrangère de Joe Biden.
AFP
18.04.2024, 11:15
18.04.2024, 14:39
Gregoire Galley
A moins de sept mois de l'élection de novembre, Donald Trump distille les petites phrases, et dénonce la «grande faiblesse» des Etats-Unis sous son adversaire démocrate, incapable par exemple d'avoir dissuadé l'Iran de mener une attaque massive contre Israël.
«La faiblesse dont nous faisons preuve, c'est inimaginable (...) Cette attaque n'aurait pas du avoir lieu», et «ne se serait pas produite si nous étions aux commandes», a-t-il affirmé au soir de l'attaque samedi lors d'un meeting de campagne.
L'ancien président de 77 ans use aussi de son emprise sur le parti républicain pour peser sur la diplomatie américaine, comme à propos de l'Ukraine ou ses partisans au Congrès bloquent depuis des mois le vote de fonds supplémentaires destinés à Kiev.
En coulisses, Donald Trump, assuré d'être le candidat républicain face à Joe Biden, s'active et joue aux hôtes dans sa luxueuse résidence en Floride ou dans son gratte-ciel à New York.
Il a rencontré mercredi le président polonais Andrzej Duda, lors d'un dîner à la Trump Tower. «Il a fait un fantastique travail, c'est mon ami et nous avons passé quatre belles années ensemble. On devrait peut-être recommencer», a lancé l'ancien président dans une vidéo postée dans la foulée sur son réseau Truth Social.
Il a aussi reçu la semaine dernière l'ancien Premier ministre et chef de la diplomatie britannique, David Cameron, lequel l'avait qualifié un jour de «misogyne et xénophobe».
S'il n'est pas inhabituel que des dignitaires étrangers voient le candidat de l'opposition d'un autre pays, dans le cas de Donald Trump cela prend une toute autre saveur.
Les Européens s'inquiètent notamment que, s'il était élu en novembre, il tournerait le dos à l'Europe et à l'Otan, revenant en arrière sur le multilatéralisme et l'atlantisme affichés de Joe Biden, comme lors de son premier mandat.
David Cameron s'était montré peu loquace sur la teneur de leur entretien, évoquant le caractère «privé» de la réunion, mais les deux hommes ont parlé de «l'avenir de l'Otan».
Donald Trump a provoqué un tollé en disant qu'il encouragerait le président russe Vladimir Poutine à «faire ce qu'il veut» si un pays membre de l'Otan ne respectait pas ses engagements financiers envers l'alliance dominée par les Etats-Unis.
En mars, Donald Trump a reçu le dirigeant nationaliste hongrois Viktor Orban, seul dirigeant dans l'Union européenne à avoir maintenu des liens étroits avec le Kremlin malgré l'invasion russe de l'Ukraine. Il avait, dans un entretien avec la chaîne CNBC, salué en lui un «homme fort».
Le New York Times a, par ailleurs, rapporté que M. Trump se serait récemment entretenu par téléphone avec le dirigeant de facto de l'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane.
Des fidèles de Trump sont aussi à la manoeuvre, tel Richard Grenell, que la presse américaine cite comme possible secrétaire d'Etat dans une deuxième administration Trump.
Décrit comme son «émissaire», M. Grenell a effectué une discrète tournée au Guatemala en janvier dernier où il aurait, selon le Washington Post, rencontré des groupes conservateurs opposés à l'investiture du président Bernardo Arévalo, élu sur un programme anti-corruption.
Il s'est également rendu en Serbie où il est proche du président Aleksandar Vucic. L'équipe de campagne de Donald Trump n'a pas répondu aux sollicitations de l'AFP à cet égard.
Richard Grenell, farouche défenseur de Donald Trump, est un ancien ambassadeur des Etats-Unis en Allemagne, qui avait suscité à l'époque de nombreuses crispations dans ce pays, et ex-directeur par intérim du Renseignement américain. Il a aussi été l'émissaire de l'ancien président pour le Kosovo et la Serbie.
M. Grenell est partenaire de Jared Kushner, gendre et ancien conseiller de Donald Trump, dans un projet d'investissement dans l'immobilier de luxe en Serbie et en Albanie.
S'exprimant devant la grand-messe des conservateurs américains, le CPAC, en février dernier, il avait plaidé en faveur d'une politique étrangère qui «trouve les moyens d'accroître les échanges commerciaux qui nous rendront plus sûrs», Donald Trump se faisant le champion de l'"Amérique d'abord".
«Pour éviter la guerre, il vaut mieux avoir un fils de... comme diplomate», avait-il également lancé, alors que les partisans de Trump font valoir qu'il n'y avait pas de guerres sous son mandat entre 2017 et 2021.
Le premier mandat de Trump avait été marqué par sa rupture avec des accords multilatéraux comme sur le climat ou le nucléaire iranien, la lutte anti-migrants avec le «mur» au Mexique, l'imposition de tarifs douaniers tous azimuts et de singulières rencontres dont avec le leader nord-coréen Kim Jong Un.
A défaut de programme, ça se résume un peu à dire: «+cela ne se serait pas passé sous ma garde, et si j'étais président, je résoudrais les choses immédiatement+», souligne Brian Finucane, de l'International Crisis Group à Washington. «Mais ça reste léger en détails», ajoute l'expert.
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