La Corée du Nord a tiré jeudi un missile balistique intercontinental (ICBM) dans la zone maritime économique exclusive du Japon. Elle a rompu un moratoire qu'elle observait depuis 2017, s'attirant une ferme condamnation de l'ONU.
Le président sud-coréen Moon Jae-in a confirmé, dans un communiqué, que le projectile lancé par Pyongyang en direction de la mer du Japon était un ICBM. Il s'agit «d'une rupture de la suspension des lancements de missiles balistiques intercontinentaux promise par le président Kim Jong Un à la communauté internationale», a-t-il dit.
L'armée sud-coréenne a indiqué avoir riposté en tirant «des missiles depuis le sol, la mer et les airs» vers le large de ses côtes.
Condamnations
L'ONU a condamné jeudi «avec force» ce tir et a sommé Pyongyang de cesser tout action jugée «contre-productive» et qui attise les «tensions» en Asie. Le Conseil de sécurité devrait se réunir vendredi à la demande de six pays occidentaux face à ce tir «sans ambiguïté» par la Corée du Nord, ont indiqué des diplomates à l'AFP
«Le lancement d'un missile de longue portée fait courir le risque d'une escalade des tensions dans la région», a dit le porte-parole du secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres. Le Portugais «presse» Pyongyang «de ne pas entreprendre davantage d'actions contre-productives».
Le Premier ministre japonais Fumio Kishida a dénoncé «un acte scandaleux». Le régime nord-coréen «menace la paix et la sécurité du Japon, de la région et de la communauté internationale», a-t-il déclaré depuis Bruxelles, où il se trouvait pour un sommet du G7.
M. Kishida a pu s'entretenir de cette nouvelle crise avec le président américain Joe Biden en marge du G7, selon un responsable de la Maison Blanche.
Des tests malgré l'interdiction
Condamnant «avec force» le nouveau tir, la Maison blanche a assuré que Washington prendrait «toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité du territoire américain, de la Corée du Sud et du Japon». Ce nouveau tir démontre que la Corée du Nord «continue de donner la priorité à ses armes de destruction massive», a déclaré sa porte-parole.
Les chefs de la diplomatie japonaise Yoshimasa Hayashi et américaine Antony Blinken ont «fermement condamné» ce tir, selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères de Tokyo.
Les résolutions de l'ONU interdisent à la Corée du Nord, frappée par de lourdes sanctions internationales pour ses programmes nucléaire et d'armement, de procéder à des essais de missiles balistiques.
Ce qui n'a pas empêché Pyongyang de réaliser une dizaine de tests de ce type d'arme depuis le début de l'année. Mais il ne s'agissait pas jusqu'à présent de missiles intercontinentaux, même si Washington et Séoul soupçonnent le régime nord-coréen d'avoir testé certains systèmes d'ICBM lors de ces lancements.
Pyongyang avait effectué trois lancements d'ICBM en 2017. L'engin alors testé, le Hwasong-15, était capable d'atteindre les Etats-Unis.
«Un ratage à maquiller»
«Le missile balistique a volé pendant 71 minutes et est tombé vers 15h44 (07h44 suisses) dans la zone économique exclusive, dans la mer du Japon, à environ 150 km à l'ouest de la péninsule d'Oshima» dans l'île septentrionale de Hokkaido, a déclaré le numéro deux du ministère japonais de la Défense, Makoto Oniki.
«Etant donné que le missile balistique a cette fois-ci volé à une altitude de plus de 6000 km, bien plus haut que l'ICBM Hwasong-15 qui a été lancé en novembre 2017, on pense que celui d'aujourd'hui est un nouvel ICBM», a-t-il ajouté.
Selon Séoul, un essai de missile par la Corée du Nord le 16 mars s'est soldé par un échec: le projectile a explosé au-dessus de Pyongyang peu après son lancement. Le régime a gardé le silence sur cet événement.
Pyongyang «a mené le lancement d'aujourd'hui pour maquiller ce ratage», a affirmé à l'AFP Go Myong-hyun, chercheur à l'Institut d'études politiques Asan.
«Le moment parfait»
Des analystes s'attendaient à ce que Pyongyang, qui célèbrera le 15 avril le 110e anniversaire de la naissance de Kim Il Sung, fondateur du pays, se livre à une démonstration de force pour marquer la fête la plus importante du calendrier politique nord-coréen.
Kim Jong Un a déclaré l'an dernier qu'améliorer les capacités militaires du pays était prioritaire pour le régime.
«Kim a probablement le sentiment que c'est le moment parfait pour développer des ICBM, et rappeler au monde avec insistance que le Nord, contrairement à l'Ukraine, est un pays doté de l'arme nucléaire», a expliqué à l'AFP Ahn Chan-il, expert de la Corée du Nord.
Cet essai survient alors que la Corée du Sud est en période de transition présidentielle, le chef de l'Etat sortant Moon Jae-in devant céder son fauteuil en mai au conservateur Yoon Suk-yeol, élu au début du mois et qui a promis d'adopter une ligne plus dure face aux provocations du Nord.
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