Politique internationale L'UE veut être un «partenaire fort»

ATS

26.2.2021 - 18:21

Confrontés au désengagement américain et à de nouvelles menaces, les dirigeants européens ont décidé vendredi de renforcer l'autonomie d'action de l'UE. Ils entendent ainsi lui permettre de s'affirmer comme un «partenaire fort» pour l'Otan et les Etats-Unis.

Le président Charles Michel lors de la conférence du 26 février. 
Le président Charles Michel lors de la conférence du 26 février. 
KEYSTONE

«La complémentarité est la clé», a insisté le président du Conseil européen, Charles Michel, à l'issue d'une visioconférence de près de trois heures avec les dirigeants des 27 et le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg. «Nous voulons renforcer la capacité de l'UE d'agir de manière autonome, avec le souhait d'être un partenaire fiable pour l'Otan et les Etats-Unis», a-t-il expliqué.

«Un partenariat fort requiert des partenaires forts», a ajouté M. Michel. Le nouveau secrétaire d'Etat américain, Antony Blinken, avait utilisé la même formule lors de son premier entretien en visioconférence lundi avec les ministres des Affaires étrangères de l'UE.

Craintes face à la Russie

«Nous devons affronter les mêmes menaces et ni l'Europe, ni les Etats-Unis ne peuvent le faire seuls», a pour sa part reconnu Jens Stoltenberg. «Mais cette capacité pour l'UE d'agir de manière autonome inquiète les pays membres en première ligne face à la Russie, car ils appréhendent un désengagement européen vis-à-vis de l'Otan», confie un haut fonctionnaire européen.

Les dirigeants polonais, lituanien et letton ont renouvelé leurs préoccupations pendant le débat, mais «personne n'a contesté le besoin d'agir de manière autonome», a assuré à l'AFP un des participants.

Nouvelles menaces

Le président français Emmanuel Macron a insisté sur la nécessité pour l'Europe «d'anticiper les nouvelles formes de menaces, cyber, maritimes, spatiales, aériennes». Le risque est aussi terroriste. «Le niveau de la menace est aujourd'hui le plus élevé jamais constaté depuis la guerre froide et il ne vient pas que de la Russie», explique un diplomate européen de haut rang.

L'eurodéputé français Arnaud Danjean (PPE, droite), spécialiste des questions de défense, déplore le «faux débat» créé autour de l'autonomie de défense de l'UE. «Tout le monde sait que le coeur de l'Otan, c'est son rôle sur le front Est, face à la Russie», soutient-il.

Selon lui, c'est sur le flanc Sud qu'il faut «une vraie autonomie européenne», car l'Otan s'y retrouve régulièrement «paralysée» par la Turquie, qui s'est notamment opposée à une opération en Libye.

«La Turquie est un membre important de l'Otan, mais nous (les pays de l'UE) avons des difficultés avec ses comportements», a souligné Charles Michel. L'Etat des relations entre Bruxelles et Ankara sera évalué à la fin mars et «nous prendrons de décisions ensemble», a-t-il précisé.

Dépendances

L'UE doit faire front uni pour identifier ses moyens et surtout ses dépendances: elles sont énormes, soutient Arnaud Danjean, citant les drones, les missiles, les composants, les capteurs, le géo-positionnement pour les armes téléguidées.

«Nous devons réduire nos dépendances, diversifier nos approvisionnements et cela ne vaut pas seulement pour les capacités militaires», a insisté la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.

Bruxelles a récemment fourni un cadre avec son plan d'action pour les synergies entre les industries civiles, spatiale et de défense. Le budget européen prévoit un budget annuel d'un milliard d'euros pendant sept ans pour financer le Fonds européen de Défense.

La «facilité de Paix» va permettre de fournir des armements aux partenaires de l'UE et peut désormais entraîner et équiper des forces militaires en Afrique.

«L'UE a identité les menaces et ses moyens. Elle doit maintenant passer aux actes», a commenté le diplomate. Elle doit renforcer sa capacité à mener des missions militaires de manière autonome, développer une autonomie technologique, être en mesure d'agir contre les cyber-attaques et être présente dans l'espace et dans toutes les mers pour défendre la liberté de navigation de ses navires.

«Les Européens ont les moyens d'agir. Il leur faut la volonté politique. Hélas, elle n'est pas encore au rendez-vous», a-t-il déploré.

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