«Pas touche à nos corps!»Des milliers d'Américains défendent le droit d'avorter
ATS
14.5.2022 - 21:23
«Pas touche à nos corps!»: des dizaines de milliers de personnes ont manifesté samedi aux Etats-Unis pour défendre le droit à l'avortement, menacé par la Cour suprême. Celle-ci semble prête à revenir en arrière, 50 ans après sa décision historique de protéger l'IVG.
Keystone-SDA
14.05.2022, 21:23
14.05.2022, 21:35
ATS
Quelque 450 cortèges sont organisés à travers le pays, dont des grandes marches à Washington, New York, Chicago, Austin et Los Angeles. «Personne n'a le droit de prendre une décision concernant le corps de quelqu'un d'autre», a expliqué à l'AFP Hanna Williamson, une manifestante de 20 ans à Washington. «Je me bats pour les droits de tout le monde».
Dans la foule, les manifestants tenaient des pancartes roses avec écrit «Pas touche à nos corps», d'autres clamaient «La Cour suprême veut tuer les femmes», «Faites avorter la Cour» et une grande banderole «Nos corps, nos avortements» était placée en avant du cortège.
Viesha Floyd, 31 ans, affirme manifester «pour les femmes des générations à venir». «Quand il s'agit des femmes, mêlez-vous de vos affaires», dit-elle à l'adresse des membres du Congrès qui s'opposent à une loi fédérale protégeant l'IVG. «Laissez-nous prendre cette décision, que ce soit notre choix», ajoute-t-elle.
Dans la capitale, le défilé de plusieurs milliers de personnes doit se terminer devant le bâtiment de la Cour suprême. A New York, le cortège de quelque 3000 personnes était mené par les sénateurs démocrates Chuck Schumer et Kirsten Gillibrand, ainsi que la procureure de la ville Letitia James. Le maire Eric Adams était également dans la foule.
Colère
Ils étaient 5000 à Houston, au Texas, selon les organisateurs et un millier à Louisville, dans le Kentucky, un Etat conservateur du Sud où seulement deux cliniques de l'organisation Planned Parenthood pratiquent des avortements. Plusieurs milliers de personnes manifestaient aussi à Los Angeles.
Même s'il est soutenu par une majorité de la population, selon de récents sondages, le droit à l'avortement est un sujet de société très clivant depuis l'arrêt historique «Roe v. Wade» de janvier 1973, qui protège le droit des Américaines à interrompre leur grossesse.
La Cour suprême, désormais résolument ancrée dans le conservatisme, est dans la tourmente depuis début mai et la révélation par le site d'informations Politico d'un projet d'arrêt qui, s'il est adopté tel quel, accordera aux Etats américains le droit d'interdire ou d'autoriser les IVG.
Elle doit rendre sa décision d'ici fin juin sur une loi du Mississippi limitant les délais légaux pour avorter. Ces délais sont déjà restreints dans 23 Etats et une vingtaine d'Etats conservateurs ont déjà promis de le rendre illégal, certains même en cas de viol ou d'inceste.
Cela forcerait les femmes à voyager plusieurs milliers de kilomètres pour se faire avorter. Depuis les révélations de Politico, des manifestants crient chaque soir leur colère devant le temple américain du droit, imposant bâtiment de marbre blanc désormais protégé par un grillage.
«Mon corps, mon choix»
D'autres protestent aux cris de «mon corps, mon choix» devant le domicile de juges conservateurs de la Cour dans les banlieues cossues de la capitale. Si l'arrêt est annulé, «cela va être horrible» a prédit à l'AFP Linda Coffee, qui représentait à l'époque Jane Roe, et qui aujourd'hui fustige une «minorité très bruyante» d'opposants à l'avortement.
Les élus démocrates au Congrès ont promis de protéger le droit à l'avortement dans les Etats où ils sont majoritaires. «Nous n'arrêterons pas de nous battre jusqu'à ce que tout le monde, et je dis bien tout le monde, ait accès à des avortements sûrs et légaux, quels que soient ses revenus, son code postal ou son origine ethnique», a affirmé vendredi l'élue Barbara Lee, qui a par le passé évoqué publiquement son propre avortement clandestin.
La Chambre des représentants a voté à l'automne dernier une loi garantissant l'accès à l'avortement dans tout le pays mais ce texte est bloqué au Sénat, où les démocrates ne disposent pas de la majorité suffisante.
Le soutien vient aussi du monde économique, qui a longtemps évité ce sujet. De plus en plus de jeunes dirigeants d'entreprises prennent position pour le droit à l'avortement. La secrétaire au Trésor, Janet Yellen, a également mis en garde contre les conséquences «très néfastes sur l'économie» si le «droit des femmes à décider quand, et si, elles veulent avoir des enfants» était remis en cause.