BirmanieIls brandissent des oeufs de Pâques contre la junte
ATS
4.4.2021 - 14:40
Les opposants au coup d'Etat en Birmanie ont défié dimanche le régime militaire avec des oeufs de Pâques anti-junte. Dans son traditionnel message pascal, le pape François a exprimé sa «proximité» avec la jeunesse du pays et ses aspirations démocratiques.
04.04.2021, 14:40
04.04.2021, 14:57
ATS
Plus de 550 civils, dont des femmes et des enfants, ont été tués par les forces de sécurité depuis le putsch du 1er février qui a renversé le gouvernement civil d'Aung San Suu Kyi, d'après l'Association d'assistance aux prisonniers politiques (AAPP). Le bilan pourrait être beaucoup plus lourd: quelque 2700 personnes ont été arrêtées.
Malgré cela, la mobilisation pro-démocratie se poursuit, avec des dizaines de milliers de salariés en grève et des secteurs entiers de l'économie paralysés. Dimanche, le mouvement de désobéissance civile a trouvé une nouvelle parade: diffuser des photos d'oeufs sur les réseaux sociaux décorés de messages contre le régime: «Sauvez la Birmanie», «Nous voulons la démocratie».
Dans son traditionnel message de Pâques, le pape François a exprimé sa «proximité (...) avec les jeunes birmans qui s'engagent pour la démocratie en faisant entendre pacifiquement leur voix». «Jésus est ressuscité: Alléluia, la Birmanie ressuscitera», a twetté Charles Bo, premier cardinal du pays très majoritairement bouddhiste.
Quatre civils sont encore tombés sous les balles samedi et un homme de 30 ans a été abattu dimanche dans l'Etat Kachin, à l'extrême-nord de la Birmanie. La junte a assuré dans un média d'Etat que les forces de sécurité «faisaient preuve de la plus grande retenue».
Total reste
Face à la dégradation de la situation, des ONG internationales et locales ont appelé Total, présent en Birmanie depuis 1992, à quitter le pays. La société va maintenir sa production de gaz qui «alimente en électricité une population nombreuse à Rangoun», la capitale économique, a fait savoir son PDG Patrick Pouyanné.
Total a versé environ 230 millions de dollars aux autorités birmanes en 2019 et 176 en 2020, sous forme de taxes et de «droits à la production», d'après ses documents financiers. Bloquer nos paiements exposerait «les responsables de notre filiale au risque d'être arrêtés et emprisonnés», a estimé Patrick Pouyanné.
L'électricien EDF a lui jeté l'éponge mi-mars, suspendant un projet de 1,5 milliard de dollars pour la construction d'un barrage hydroélectrique.
Internet coupé
Les généraux birmans font la sourde oreille aux condamnations et sanctions occidentales. Ils ont coupé l'accès à internet pour une grande majorité de la population, ordonnant la suspension des données mobiles et des connexions sans fil.
Ils resserrent aussi leur étau judiciaire sur Aung San Suu Kyi, accusée notamment de corruption et d'avoir violé une loi sur les secrets d'Etat datant de l'époque coloniale. Si elle est reconnue coupable, l'ex-dirigeante de 75 ans risque d'être bannie de la vie politique et encourt de longues années de prison.
Des mandats d'arrêt ont été émis contre 40 célébrités birmanes – chanteurs, mannequins, influenceurs sur les réseaux sociaux. Ces personnes sont accusées d'avoir diffusé des informations susceptibles de provoquer des mutineries dans les forces armées.
Soutien de factions ethniques
Le bain de sang contre les civils a provoqué la colère de nombreuses factions ethniques rebelles du pays. Dix de ces factions ont apporté samedi leur soutien à la mobilisation démocratique et vont «réexaminer» le cessez-le-feu signé avec les militaires à partir de 2015, d'après le chef de l'une d'entre elles.
Une autre, la puissante Union KNU, a condamné des raids aériens de l'armée dans le sud-est du pays qui ont fait, selon elle, plus de 12'000 déplacés, exhortant la multitude de minorités ethniques du pays (plus de 130) à s'unir contre la junte. D'autres rébellions avaient déjà menacé de reprendre les armes.
L'émissaire de l'ONU pour la Birmanie, Christine Schraner Burgener, a mis en garde contre un risque «sans précédent» de «guerre civile».