Paysage «apocalyptique» Opération dans un hôpital de Gaza - Israël veut détruire le «dernier bastion»

ATS

15.2.2024 - 15:47

L'armée israélienne a annoncé jeudi mener une opération dans un grand hôpital assiégé du sud de la bande de Gaza. Selon elle, des otages du Hamas y auraient été retenus. Des médecins décrivent eux une situation désespérée.

Des Palestiniens inspectent les dégâts sur un bâtiment où deux otages auraient été détenus avant d'être secourus lors d'une opération des forces de sécurité israéliennes à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 12 février 2024,
Des Palestiniens inspectent les dégâts sur un bâtiment où deux otages auraient été détenus avant d'être secourus lors d'une opération des forces de sécurité israéliennes à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 12 février 2024,
AFP

Keystone-SDA

Cerné par les combats entre l'armée et le mouvement islamiste palestinien, l'hôpital Nasser de Khan Younès, le plus grand du sud de Gaza, a accueilli des milliers de civils fuyant la guerre, dont l'évacuation a commencé ces derniers jours sous les bombes.

L'armée a annoncé mener une «opération ciblée et limitée» dans l'hôpital, après avoir reçu «des renseignements crédibles» indiquant que le Hamas y avait retenu des otages «et qu'il y aurait peut-être des corps d'otages» sur place.

Après Khan Younès, une ville transformée en champ de ruines où l'armée continue à affronter les combattants du Hamas, Israël prépare une offensive terrestre dans la ville surpeuplée de Rafah, à quelques kilomètres plus au sud, devenue le dernier refuge pour des centaines de milliers de civils qui ont fui les combats.

Jeudi, des photographes de l'AFP ont vu des nuages de fumée s'élever au-dessus de Khan Younès, après de nouveaux bombardements.

Netanyahu veut détruire le «dernier bastion»

Après plus de quatre mois de guerre contre le Hamas dans le territoire palestinien assiégé, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, veut maintenant détruire le «dernier bastion» du mouvement islamiste à Rafah.

Il a annoncé une «action puissante» dans la ville, mais assuré que l'armée permettrait auparavant aux civils «de quitter les zones de combat».

Pendant que les pays médiateurs poursuivent au Caire leurs négociations en vue d'une trêve, les appels se multiplient à travers le monde face aux conséquences potentiellement dévastatrices d'une telle opération.

Après notamment l'ONU et les Etats-Unis, principal allié d'Israël qui réclame des «garanties» pour la sécurité des civils, l'Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande ont mis en garde jeudi Israël contre une opération «catastrophique» à Rafah, soulignant que les civils bloqués contre la frontière fermée avec l'Egypte n'avaient «nulle part où aller».

Paysage «apocalyptique»

Environ 1,4 million de personnes, selon l'ONU, soit plus de la moitié de la population de Gaza, sont massées à Rafah, transformée en un gigantesque campement, dans l'angoisse de l'offensive annoncée.

Rafah est en outre le principal point d'entrée de l'aide humanitaire depuis l'Egypte, contrôlée par Israël et insuffisante pour répondre aux besoins d'une population menacée par la famine et les épidémies.

Le ministère de la Santé du Hamas a annoncé jeudi un bilan de 87 morts en 24 heures dans le territoire, ajoutant que des bombardements sur l'hôpital Nasser avaient fait un mort et plusieurs blessés.

Les déplacés qui ont fui l'hôpital, répondant à un ordre d'évacuation de l'armée, se retrouvent à présent «sans endroit où aller», dans un «paysage apocalyptique» où les bombardements «font partie de la vie quotidienne», a déclaré jeudi Médecins Sans Frontières.

Une équipe de MSF continue à travailler dans l'hôpital «dans des conditions quasi impossibles», a ajouté l'ONG.

Beaucoup d'hôpitaux de la bande de Gaza ont été visés depuis le début de la guerre par l'armée qui accuse le Hamas de les utiliser comme bases.

«Nous avons peur»

«Mon mari et mon fils Mohammad sont partis mercredi avec des milliers de personnes mais je ne sais pas ce qu'ils sont devenus», a raconté à l'AFP une déplacée à l'hôpital Nasser, Jamila Zidane.

«Nous avons peur», confie cette femme de 43 ans, restée dans l'hôpital avec ses six filles: «Depuis plusieurs jours, nous n'avons plus de nourriture et nous buvons de l'eau souillée».

La guerre a aussi ravivé les tensions à la frontière nord d'Israël avec le Liban, où les échanges de tirs sont devenus quotidiens entre l'armée israélienne et le Hezbollah chiite libanais, allié du Hamas et soutenu par l'Iran.

Mercredi, Israël a lancé des frappes dans le sud du Liban qui ont fait 15 morts parmi lesquels un commandant du Hezbollah, en représailles à des tirs de roquette qui ont tué une soldate dans le nord d'Israël.

«Menace existentielle»

Les négociations en vue d'une trêve incluant de nouvelles libérations d'otages du Hamas et de Palestiniens détenus par Israël se poursuivent au Caire jusqu'à vendredi, par l'intermédiaire des pays médiateurs, Qatar, Egypte et Etats-Unis.

Selon le Washington Post, les Etats-Unis et un petit groupe de leurs alliés arabes élaborent un plan destiné à établir une paix durable entre Israël et les Palestiniens, qui inclurait une pause dans les combats, la libération des otages et un calendrier pour l'établissement à terme d'un Etat palestinien.

La mise en oeuvre de ce plan commencerait par un cessez-le-feu «d'une durée prévue d'au moins six semaines», a indiqué le quotidien américain, en citant des responsables américains et arabes qui espèrent un accord avant le 10 mars, date de début du ramadan.

Cette perspective a été dénoncée avec force par deux ministres israéliens d'extrême droite, pour qui «un Etat palestinien est une menace existentielle pour l'Etat d'Israël».

Selon Israël, 130 otages sont encore détenus à Gaza, dont 29 seraient morts, sur environ 250 personnes enlevées le 7 octobre. Une trêve d'une semaine en novembre avait permis la libération de 105 otages et de 240 Palestiniens détenus par Israël.