Manque de soignantsLes hôpitaux allemands sont sous haute tension
ATS
19.11.2021 - 07:39
Faute de places disponibles dans son service de soins intensifs, le personnel de l'hôpital bavarois de Freising a dû prendre une décision inédite depuis le début de la pandémie en Allemagne: transférer un patient atteint du Covid-19 dans un établissement du nord de l'Italie.
Keystone-SDA
19.11.2021, 07:39
19.11.2021, 07:40
ATS
En 18 mois de pandémie, les hôpitaux allemands ont régulièrement été sollicités pour prendre en charge des malades de pays européens débordés. Mais avec la nouvelle vague de Covid-19 qui déferle depuis octobre, c'est la première économie d'Europe qui se demande désormais combien de temps son système de santé va tenir.
«La semaine dernière, nous avons dû transférer un patient à Merano, parce que nous n'avions plus de capacité d'accueil et les hôpitaux bavarois environnants étaient également complets», a expliqué à l'AFP Thomas Marx, directeur médical de l'hôpital de Freising, une ville de 50'000 habitants.
Avec un taux d'incidence de 550 infections pour 100'000 habitants sur sept jours, la Bavière est l'une des régions les plus touchées par ce rebond de l'épidémie. «Nous sommes aux limites de nos capacités», s'inquiète le docteur Marx, 43 ans.
Tous non vaccinés
Son service de soins intensifs compte actuellement 13 patients, «trois au-dessus de notre capacité habituelle», précise le médecin. Cinq sont atteints du Covid-19, tous non vaccinés.
Au niveau national, le nombre de malades du Covid-19 en soins intensifs reste inférieur au pic atteint à la fin 2020, mais les hôpitaux sont plus vulnérables en raison d'un manque criant de personnel soignant. «Il n'existe pas de seuil unique à partir duquel nous pourrions dire: 'Maintenant, tout le système de santé va s'effondrer'», selon Gerald Gass, président de l'association allemande des hôpitaux.
Mais il y a déjà des «signes avant-coureurs», a-t-il déclaré cette semaine au quotidien Handelsblatt, citant les tensions dans les hôpitaux de Bavière et de Thüringe, une autre région particulièrement touchée. «Cette situation s'aggrave avec chaque nouveau cas de Covid-10 en soins intensifs», a-t-il ajouté.
Personnel épuisé
À l'hôpital de Freising, le docteur Marx décrit «une grosse incompréhension» des soignants devant une dégradation de la situation, qui était, selon lui, «prévisible et aurait pu être évitée». Avec un taux de vaccination de 67,7%, l'Allemagne fait figure de mauvaise élève parmi les pays de l'ouest de l'Europe.
Le Parlement doit adopter vendredi en urgence un projet de loi rétablissant des restrictions pour tenter d'enrayer la hausse des nouvelles infections quotidiennes, entre 30'000 et 50'000 cette semaine. Le plan prévoit un retour massif au télétravail et la nécessité d'un certificat sanitaire pour emprunter les transports publics.
Le texte préparé par la coalition gouvernementale, qui succèdera bientôt à la majorité d'Angela Merkel, doit permettre aux Länder de prendre des mesures visant les personnes non vaccinées. Plusieurs régions, y compris Berlin, leur interdisent déjà l'accès aux événements culturels, sportifs voire aux restaurants.
Si la situation est cette fois-ci beaucoup plus délicate dans les hôpitaux allemands, c'est qu'ils disposent de «4000 lits de soins intensifs de moins qu'il y a un an en raison du personnel soignant épuisé qui a quitté son emploi ou réduit son temps de travail», explique Gernot Marx, président de l'association allemande de médecine intensive (DIVI).
«Catastrophe»
Une pénurie que vit au quotidien le docteur Niklas Schneider, chef du service de soins intensifs de la clinique Munich Schwabing: «Nous avons beaucoup moins de soignants que lors des premières vagues».
Comme à Freising, son service de soins intensifs est au maximum de son occupation. Le docteur Schneider a des mots forts, parlant d'une situation de «catastrophe».
Selon le magazine Spiegel, seul un quart des 1300 unités de soins intensifs est en mesure de fonctionner à pleine capacité, du fait du manque de soignants. «L'équipe tient bon, mais nous sommes incroyablement frustrés», regrette M. Schneider. «Frustrés parce qu'au final, nous sommes le dernier recours pour tout ce qui ne fonctionne pas dans la société dans son ensemble».