Dans l'œil du cyclone Eva Kaili, des plateaux de télé grecs au scandale européen

ATS

11.12.2022 - 17:55

La vice-présidente du Parlement européen, Eva Kaili, est au coeur d'un retentissant scandale de corruption qui l'a menée en détention. Cette ancienne présentatrice de télévision grecque est devenue une figure controversée du parti socialiste hellénique (Pasok-Kinal).

L'élue socialiste de 44 ans a vu samedi suspendues ses délégations de vice-présidente de l'assemblée européenne.
L'élue socialiste de 44 ans a vu samedi suspendues ses délégations de vice-présidente de l'assemblée européenne.
Anadolu Agency via Getty Images

L'élue socialiste de 44 ans a vu samedi suspendues ses délégations de vice-présidente de l'assemblée européenne, moins de onze mois après son élection à ce poste, en raison de l'enquête déclenchée par le parquet belge.

L'eurodéputée à la mise soignée, aux longs cheveux blonds et au regard perçant, a été placée en détention dimanche à Bruxelles après une enquête du parquet fédéral belge pour des faits de «corruption» et de «blanchiment d'argent» en bande organisée. Des «sacs de billets» ont été retrouvés au domicile de celle qui était un temps perçue dans son pays comme une étoile montante du Pasok-Kinal.

Elue à 29 ans

Originaire de Thessalonique, la deuxième ville de Grèce, Eva Kaili est entrée en politique à 20 ans: étudiante en architecture, elle y devient en 1998 conseillère municipale. Son diplôme d'architecture en poche, elle se lance dans des études des relations internationales et européennes et suit des cours de journalisme.

Les Grecs la découvrent alors sur leur écran de télévision: elle présente les journaux sur l'une des grandes chaînes privées, Mega, de 2004 à 2007. Cette année-là, à seulement 29 ans, elle est élue au Parlement grec. Elle est alors la plus jeune députée du Pasok.

En 2014, elle est élue au Parlement européen, un mandat qu'elle conserve lors du scrutin européen de 2019. En janvier dernier, elle est élue vice-présidente du Parlement européen dès le premier tour.

Eva Kaili faisait partie de la délégation visant à développer les relations de l'Union Européenne avec la péninsule arabe. Dans ce cadre, elle s'était rendue au Qatar peu avant le début du Mondial de football.

«Aujourd'hui, la Coupe du monde de football au Qatar est une preuve concrète de la façon dont la diplomatie sportive peut aboutir à une transformation historique d'un pays dont les réformes ont inspiré le monde arabe», avait-elle déclaré à la tribune du Parlement européen le 22 novembre.

Distance avec son parti

Dans son pays natal, Eva Kaili s'est à plusieurs reprises distanciée du Pasok. Lors de l'accord entre Athènes et Skopje mettant fin à un long conflit sur l'appellation du petit pays balkanique, désormais nommé «Macédoine du Nord», elle avait twitté: «J'ai honte. C'est un dommage irréparable pour l'Histoire, la Macédoine et les Grecs».

Elle se positionnait alors sur la même ligne que la Nouvelle Démocratie, le parti conservateur grec, opposé à l'accord. Pour ce dernier, le nom de Macédoine liée à l'histoire d'Alexandre le Grand et à une région du nord de la Grèce ne pouvait être donné à un autre pays.

En 2019, elle avait également déclaré que «les allocations sont pour les fainéants», critiquant les aides sociales distribuées par la gauche radicale (Syriza) pour faire face à la crise économique qui avait mis le pays à genoux et précipité de nombreux Grecs dans la pauvreté.

«Cheval de Troie»

Le président du parti socialiste grec, Nikos Androulakis a assuré samedi que Mme Kaili «agissait comme un cheval de Troie de la Nouvelle démocratie», la droite au pouvoir. «Je l'avais informée qu'elle ne serait plus candidate avec notre parti aux prochaines élections européennes», a-t-il insisté.

M. Androulakis, lui-même eurodéputé, lui reprochait aussi d'avoir tenté de minimiser l'affaire des écoutes qui éclabousse l'actuel gouvernement conservateur.

Face à ce scandale et aux soupçons qui pèsent sur l'eurodéputée, le Pasok-Kinal l'a écartée et plusieurs élus ont demandé à ce qu'elle cède son siège au Parlement européen.

Dans cette affaire, son compagnon, l'Italien Francesco Giorgi, ex-assistant parlementaire, spécialiste des questions de droits humains et des affaires étrangères, a été lui aussi interpellé. En couple depuis cinq ans, ils ont une petite fille de deux ans.