Chili Feu vert des députés pour une procédure de destitution de Piñera

ATS

9.11.2021 - 12:40

Les députés chiliens ont approuvé mardi une procédure de destitution lancée contre le président Sebastian Piñera pour la vente controversée d'une compagnie minière. Cette opération, réalisée dans un paradis fiscal, a été révélée par l'enquête des Pandora Papers.

Le président chilien est mis en cause pour la vente controversée d'une compagnie minière, réalisée dans un paradis fiscal et révélée par l'enquête internationale des Pandora Papers.
Le président chilien est mis en cause pour la vente controversée d'une compagnie minière, réalisée dans un paradis fiscal et révélée par l'enquête internationale des Pandora Papers.
ATS

La Chambre des députés, contrôlée par l'opposition, a donné son feu vert par 83 voix sur 155. C'est maintenant au tour du Sénat de se prononcer par un vote des deux tiers, fort difficile à obtenir, avant les élections générales du 21 novembre où un nouveau président sera élu et le Parlement renouvelé.

M. Piñera «a agi en cherchant son bénéfice personnel et celui de sa propre famille, utilisant des informations auxquelles il avait accès grâce à ses fonctions présidentielles», a dénoncé le député socialiste Jaime Naranjo au cours d'un débat entamé lundi matin. Celui-ci s'est exprimé pendant 15 heures lisant un texte de 1300 pages et appelant à «en finir avec l'impunité».

«Je vous prie, messieurs les députés, rejetez cette accusation constitutionnelle injuste et irrecevable», avait lancé de son côté l'avocat du président, Jorge Gálvez.

Première enquête en 2017

L'opposition chilienne avait demandé le 13 octobre au Parlement la destitution du chef de l'Etat dans cette affaire. M. Piñera, un des dirigeants politiques apparaissant dans les Pandora Papers, l'enquête réalisée par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), a démenti tout conflit d'intérêt dans la vente de la compagnie minière à un ami proche.

Le président de droite, un des hommes les plus riches du Chili, clame sa «totale innocence». Il estime qu'il y a déjà eu en 2017 «une enquête approfondie du ministère public» et que c'est «une affaire close par la justice».

Le parquet a toutefois fait valoir que les faits liés à la vente et à l'achat de la société minière «n'étaient pas expressément inclus» dans la décision de non-lieu de 2017.

«Une zone unique au monde»

Selon une enquête menée par les médias chiliens CIPER et LaBot, membres de l'ICIJ, la compagnie minière Minera Dominga a été vendue à l'homme d'affaires Carlos Alberto Délano pour 152 millions de dollars, une transaction opérée aux îles Vierges britanniques.

La transaction devait être effectué en trois versements. Elle contenait une clause controversée qui subordonnait le dernier paiement à la condition «qu'une zone de protection environnementale ne soit pas établie sur la zone d'exploitation de la société minière, comme le demandent des groupes écologistes».

D'après l'enquête, le gouvernement de Sebastian Piñera n'a finalement pas protégé la zone où l'exploitation minière était prévue, si bien que le troisième paiement a bien été effectué.

Pour le député de gauche Tomas Hirsch, M. Piñera a «ainsi empêché qu'une zone unique au monde soit déclarée réserve naturelle, dans le seul but de favoriser ses intérêts personnels».

Toujours en attente

Ce projet d'exploitation à ciel ouvert de cuivre et fer dans le désert d'Atacama (nord), toujours en attente d'une décision de la Cour suprême après des recours, prévoit aussi la construction d'un port de chargement de minerais à proximité d'une réserve nationale abritant des manchots de Humboldt, une espèce menacée qui ne nichent qu'au Chili et au Pérou.



Début août, une commission d'évaluation environnementale a approuvé le projet malgré les protestations des défenseurs de l'environnement, mais elle doit encore recevoir l'aval en Conseil des ministres.

Pendant son premier mandat, M. Piñera avait annoncé l'annulation d'un projet de construction d'une centrale thermoélectrique qui devait être installée près de Minera Dominga. Plus aucune autre mesure de protection n'avait ensuite été prise.