Guerre au Proche-Orient Frappes sur Gaza, Israël commence à préparer son après-guerre

ATS

5.1.2024 - 08:40

Israël continue vendredi de bombarder la bande de Gaza, dont le futur «après» la guerre fait l'objet pour la première fois d'un plan, lequel ne prévoit ni le Hamas, ni une administration israélienne pour gérer ce territoire ravagé par des frappes incessantes.

Un convoi de troupes israéliennes se déplace dans la bande de Gaza, vu depuis le sud d'Israël, jeudi 4 janvier 2024. (AP Photo/Ariel Schalit)
Un convoi de troupes israéliennes se déplace dans la bande de Gaza, vu depuis le sud d'Israël, jeudi 4 janvier 2024. (AP Photo/Ariel Schalit)
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Quelques heures avant le départ du secrétaire d'Etat américain Antony Blinken pour le Moyen-Orient dans l'espoir d'éviter une expansion du conflit entre Israël et le Hamas après une semaine à haute tension, le ministre israélien de la Défense Yoav Gallant a dévoilé son premier plan au sujet de l'après-guerre à Gaza.

Selon le plan, qui doit toutefois recevoir l'aval du gouvernement divisé sur ce sujet épineux, les opérations à Gaza «vont se poursuivre» jusqu'au «retour des otages», au «démantèlement des capacités militaires et de gouvernance du Hamas» et «l'élimination des menaces militaires», a soutenu M. Gallant.

Après quoi s'amorcera une nouvelle phase, celle du «jour d'après» la guerre. Or cette semaine, le ministre israélien de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir avait appelé à un retour de colons juifs à Gaza après la guerre, et à «encourager» la population palestinienne à émigrer.

Mais «il n'y aura pas de présence civile israélienne dans la bande de Gaza après l'atteinte des objectifs de la guerre», a déclaré jeudi soir M. Gallant, en précisant que l'armée israélienne garderait toutefois «sa liberté d'action» à Gaza pour y juguler toute «menace» éventuelle.

«Les habitants de Gaza sont Palestiniens. Par conséquent des entités palestiniennes seront en charge (de la gestion) à la condition qu'il n'y ait aucune action hostile ou menace contre l'Etat d'Israël», souligne le plan sans dire précisément qui, des Palestiniens, devraient administrer ce territoire d'environ 2,3 millions d'habitants ravagé par les bombardements.

«Des enfants»

Avant l'après, il y a le pendant. Et dans la nuit de jeudi à vendredi, les forces israéliennes ont multiplié à nouveau les frappes dans le sud et le centre de la bande de Gaza, où des témoins ont d'ailleurs fait état d'intenses combats.

Des raids aériens et des tirs d'artillerie israéliens ont touché jeudi Khan Younès, grande ville du sud de la bande de Gaza devenue l'épicentre des opérations, selon un journaliste de l'AFP.

A la morgue de l'hôpital local Nasser, Baha Abou Hatab, en pleurs, était penché au-dessus des corps de ses neveux. «Ils ont été évacués dans un champ agricole, où ils ont construit une tente pour se protéger du froid, mais les frappes aériennes israéliennes les ont touchés pendant qu'ils dormaient. Pourquoi? Parce que ce sont des enfants? Parce qu'ils menacent Israël et les Etats-Unis?», a-t-il sangloté.

Depuis le début des hostilités, 22'438 personnes, majoritairement des femmes, adolescents et enfants, ont été tuées dans la bande de Gaza, soit désormais près de 1% de la population du territoire, selon le dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas jeudi.

Israël a juré de «détruire» le Hamas après son attaque inédite sur le sol israélien le 7 octobre, qui a fait environ 1.140 morts, essentiellement des civils, selon un décompte de l'AFP à partir de données officielles israéliennes. Environ 250 personnes ont été enlevées et emmenées à Gaza, dont une centaine ont été libérées lors d'une trêve fin novembre.

L'armée israélienne a annoncé jeudi soir que trois Israéliens portés disparus depuis le 7 octobre sont retenus en otage à Gaza, portant à 132 le nombre de personnes toujours aux mains du mouvement, classé organisation terroriste par les Etats-Unis, Israël et l'Union européenne.

Le retour de Blinken

Les craintes de voir cette guerre embraser le Moyen-Orient se sont encore accrues après l'élimination mardi à Beyrouth du numéro deux du Hamas, Saleh al-Arouri, tué par une frappe aérienne attribuée à Israël.

«L'ennemi pense qu'avec l'assassinat de Saleh al-Arouri, il peut vaincre la résistance et imposer ses conditions (...) mais il a échoué, et ne pourra jamais pousser le Hamas à abandonner ses revendications, sa vision et sa stratégie», a assuré, dans un discours retransmis à la foule, le chef du Hamas, Ismaïl Haniyeh.

Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah libanais, mouvement islamiste proche de l'Iran et allié du Hamas, a mis en garde Israël contre toute nouvelle escalade après la mort de Saleh al-Arouri.

En Israël, le chef d'état-major de l'armée, Herzi Halevi, a indiqué que ses troupes étaient en état d'alerte à la frontière avec le Liban, théâtre quasi-quotidien d'échanges de tirs depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas.

Et alors que plusieurs chancelleries se sont inquiétées d'un risque d'escalade de ce conflit notamment en Iran, où une attaque revendiquée par le groupe jihadiste Etat islamique (EI) a fait 84 morts mercredi près de la tombe de Qassem Soleimani, ex-architecte des opérations iraniennes au Moyen-Orient.

En mer Rouge, les rebelles Houthis, soutenus par l'Iran, multiplient les attaques pour freiner le trafic maritime en «soutien» à Gaza, tandis que les tensions se multiplient en Syrie et en Irak, où des bases américaines sont prises pour cible.

Antony Blinken doit quitter jeudi soir Washington pour sa quatrième tournée au Moyen-Orient depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas, où il entend plaider pour une aide accrue en direction de la bande de Gaza et des moyens d'éviter l'embrasement dans un contexte régional à cran.

Après la Turquie, il se rendra en Israël, en Cisjordanie occupée, en Jordanie, au Qatar, aux Emirats arabes unis, en Arabie saoudite et en Egypte. Avant le départ, son porte-parole avait déjà prévenu: «Nous ne nous attendons pas à ce que toutes les conversations de ce voyage soient faciles».