Guerre au SoudanLe chef de l'armée en Egypte, des dizaines de morts au Darfour
ATS
29.8.2023 - 19:11
Le chef de l'armée soudanaise, le général Abdel Fattah al-Burhane, était en visite mardi chez son grand allié et voisin égyptien, à l'occasion de son premier voyage à l'étranger en quatre mois de guerre. Celle-ci a de nouveau tué des dizaines de civils.
29.08.2023, 19:11
29.08.2023, 19:18
ATS
Au moins 39 personnes, en majorité des femmes et des enfants, ont péri mardi à Nyala, chef-lieu du Darfour-Sud (ouest), tuées par des roquettes tombées sur leurs maisons lors de combats entre l'armée et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), selon un médecin et des témoins.
En Egypte, le président Abdel Fattah al-Sissi a accueilli le général Burhane à sa descente d'avion à El-Alamein, sur la côte nord. Au terme de leurs échanges, M. Sissi a «confirmé la position ferme de l'Egypte aux côtés du Soudan et son soutien à sa sécurité, sa stabilité et son intégrité territoriale», selon la presse d'Etat.
En embarquant dans un avion à Port-Soudan, sur la mer Rouge, le chef de facto de l'Etat soudanais était apparu pour la première fois en costume civil depuis le début du conflit le 15 avril.
Tentative d'affirmer son autorité
Il semble vouloir affirmer son autorité en tant que président du Conseil de souveraineté, plus haute autorité du Soudan depuis le putsch qu'il a mené en 2021 avec le général Mohamed Hamdane Daglo, le chef des FSR et désormais son grand ennemi.
Les FSR «se sont rendues coupables de crimes de guerre», a accusé le général Burhane affirmant que «l'armée cherche à mettre fin à la guerre et à reprendre la transition démocratique», dans une interview à une chaîne de télévision égyptienne.
Il en a profité pour remercier Le Caire «du soutien et l'accueil» réservés aux 280'000 Soudanais ayant trouvé refuge en Egypte depuis le début de la guerre malgré le durcissement des formalités d'entrée début juin.
Familles tuées
Depuis le 15 avril, la guerre entre l'armée et les FSR a fait au moins 5000 morts, un bilan très sous-estimé en raison du chaos général. Mardi au Darfour, «cinq familles entières ont été tuées en une journée et d'autres ont perdu trois ou quatre des leurs» à Nyala, selon le militant des droits humains Gouja Ahmed.
Sur les réseaux sociaux, des images que l'AFP n'a pas pu authentifier dans l'immédiat montrent des dizaines de corps alignés puis des hommes les mettant en terre dans une immense fosse.
Depuis le 11 août, plus de 50'000 personnes ont dû fuir Nyala, deuxième ville la plus peuplée du Soudan en raison de la violence des combats, selon l'ONU.
Fief des FSR, le Darfour est probablement la région où les combats sont les plus meurtriers et des centaines de milliers de Darfouris ont fui au Tchad voisin. Dans certaines villes, assure l'ONU, des civils armés et des combattants tribaux se sont jetés dans la bataille désormais menée sur des bases ethniques.
Rumeurs de négociations
L'ONU recense plus de 4,6 millions de déplacés et réfugiés depuis le début du conflit au Soudan.
En visite au Soudan du Sud voisin, le Haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés (HCR), Filippo Grandi, a alerté mardi sur le sort des 240'000 Sud-soudanais réfugiés au Soudan et désormais revenus dans leur pays «déjà en proie à une terrible catastrophe humanitaire».
Alors que les raids aériens et les combats ne faiblissent pas, au Darfour et à Khartoum principalement, les rumeurs sur des négociations entre les généraux Burhane et Daglo se multiplient.
La récente sortie, pour la première fois en quatre mois, du général Burhane de son QG à Khartoum assiégé par les FSR alimentait notamment les espoirs d'une sortie de crise négociée, même s'il a appelé lundi à se «concentrer sur la guerre» plutôt que sur «les discussions» face à des «mercenaires».
Le Caire soutient l'armée
Au début du conflit, Ryad et Washington avaient joué les médiateurs mais les nombreuses trêves annoncées n'ont que très peu duré. L'Egypte, elle, a réuni en juillet les six autres pays voisins du Soudan pour obtenir un soutien internationale face à l'arrivée des réfugiés.
Des parties étrangères sont impliquées dans le conflit, selon les experts. D'un côté, Le Caire et Ankara soutiennent l'armée, de l'autre, les Emirats arabes unis et les mercenaires russes de Wagner appuient les FSR.
Le général Burhane pourrait se rendre en Arabie saoudite, assurent des commentateurs locaux. «L'Arabie s'oppose à la position des Emirats, tout comme MM. Sissi et Burhane», décrypte pour l'AFP Magdi el-Gizouli, chercheur au Rift Valley Institute.