Proche-OrientIsraël étend ses opérations, l'OMS veut évacuer l'hôpital al-Chifa
ATS
19.11.2023 - 06:43
L'hôpital al-Chifa, le plus grand de la bande de Gaza visé par des raids israéliens, est devenu une «zone de mort», a dénoncé l'Organisation mondiale de la Santé. Elle a demandé son évacuation, au moment où l'armée israélienne étend ses opérations.
Keystone-SDA
19.11.2023, 06:43
19.11.2023, 08:24
ATS
Le mouvement islamiste palestinien Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza depuis 2007, a affirmé samedi que des frappes israéliennes sur le camp de réfugiés de Jabaliya, géré par l'ONU dans le nord du territoire, avaient fait plus de 80 morts, dont au moins 50 dans une école qui héberge des déplacés.
Des images diffusées sur les réseaux sociaux authentifiées par l'AFP montrent des corps, certains couverts de sang, dans les étages de l'école al-Fakhoura du camp de Jabaliya, visée par une frappe selon le ministère de la Santé du Hamas, où des matelas avaient été installés sous des tables.
Interrogée à propos de cette frappe, l'armée israélienne a indiqué à l'AFP avoir «reçu des rapports sur un incident dans la région de Jabaliya», ajoutant qu'il était «en cours d'examen». La seconde frappe, qui a touché une maison de Jabaliya, a tué 32 membres d'une même famille, dont 19 enfants, selon le ministère de la Santé du Hamas.
«Nous recevons des images effroyables de nombreux morts et blessés encore une fois dans une école de l'Unrwa qui abritait des milliers de déplacés», a écrit sur X (ex-Twitter) le patron de cette agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens, Philippe Lazzarini, exigeant que «ces attaques» cessent.
Extension des opérations
Alors que la guerre entre dans son 44e jour dimanche, l'armée israélienne «continue à étendre ses opérations dans de nouveaux quartiers de la bande de Gaza», a-t-elle annoncé, indiquant avoir mené samedi des opérations dans les zones de Jabaliya et de Zaytoun, dans le nord du territoire.
Des centaines de personnes qui avaient trouvé refuge dans l'hôpital al-Chifa, le plus grand de Gaza, ont quitté les lieux samedi après en avoir reçu l'ordre par l'armée israélienne, selon le directeur de l'établissement et un journaliste de l'AFP sur place. L'armée a nié avoir ordonné l'évacuation, assurant seulement avoir «répondu à une requête» du directeur de l'hôpital al-Chifa.
Bloqué pendant vingt jours à al-Chifa, Rami Charab est arrivé samedi dans le centre de la bande de Gaza, après des heures de marche. «A huit heures du matin», se rappelle le jeune homme de 24 ans, les haut-parleurs ont résonné. Un soldat israélien ordonnait l'évacuation de l'hôpital «sous une heure sous peine de nous bombarder».
Sur la route Salaheddine traversant le territoire du nord au sud, que Rami Charab a empruntée en partant, une cohorte de Palestiniens avance lentement. Un homme porte à bras-le-corps sa fille handicapée. L'organisation Médecins sans frontières (MSF) a annoncé qu'un membre de la famille d'un de ses employés avait été tué et un autre blessé lors de l'attaque d'un convoi qui évacuait 137 personnes d'al-Chifa. MSF n'a pas précisé l'origine des tirs.
«Zone de mort»
L'hôpital al-Chifa est devenu une «zone de mort» où la situation est «désespérée» en raison du manque d'eau, d'électricité, de médicaments, de nourriture et de matériel médical, a affirmé samedi soir l'Organisation mondiale de la santé (OMS), qui y a effectué une mission d'une durée d'une heure samedi.
Selon l'OMS, l'immense complexe hospitalier hébergeait encore samedi 25 soignants et 291 patients, dont 32 bébés dans un état critique, 22 patients sous dialyse et deux en soins intensifs. De nombreux blessés souffrent d'infections graves en raison du manque d'antibiotiques et des mauvaises conditions d'hygiène, a rapporté l'organisation.
«L'OMS et ses partenaires élaborent d'urgence des plans pour l'évacuation immédiate des patients restants, du personnel et de leurs familles» vers d'autres hôpitaux de Gaza, a ajouté l'OMS. Selon l'armée israélienne, qui a lancé mercredi matin un raid sur l'hôpital, ce dernier abrite un repaire du Hamas installé notamment dans un réseau de tunnels. Le mouvement islamiste dément.
La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque du Hamas sur le sol israélien dans laquelle 1200 personnes ont été tuées, selon les autorités israéliennes, en grande majorité des civils. En représailles, Israël a juré d'"anéantir» le mouvement islamiste, qui a pris le pouvoir à Gaza en 2007. L'armée pilonne sans relâche le petit territoire palestinien et a lancé une opération terrestre le 27 octobre.
Samedi soir, le gouvernement du Hamas a annoncé que 12'300 Palestiniens avaient été tués dans les bombardements israéliens depuis le 7 octobre, dont plus de 5000 enfants. Les combats entre Israël et le Hamas, classé organisation terroriste par les Etats-Unis, l'Union européenne et Israël, se concentrent dans le nord du territoire, notamment dans la ville de Gaza, transformée en champ de ruines.
Plus des deux tiers des 2,4 millions d'habitants de la bande de Gaza ont été déplacés par la guerre, selon l'ONU. La plupart ont fui vers le sud en emportant le minimum et tentent de survivre dans le froid qui s'installe. Mais des frappes ont également lieu dans le sud de la bande de Gaza. Dans la nuit de vendredi à samedi, un bombardement a ainsi fait 26 morts dans la ville de Khan Younès, d'après le directeur de l'hôpital Nasser.
Marche pour les otages
Depuis le 9 octobre, le territoire est soumis à un «siège complet» par Israël, qui a coupé les livraisons de nourriture, d'eau, d'électricité et de médicaments. En Israël, les proches de quelque 240 personnes enlevées le jour de l'attaque du Hamas sont arrivés samedi à Jérusalem après plusieurs jours de marche pour maintenir la pression sur leur gouvernement et réclamer la libération des otages.
«Ramenez-les à la maison, maintenant. Tous», ont clamé au milieu d'une marée de drapeaux israéliens les manifestants partis mardi de Tel-Aviv. La Maison Blanche a affirmé samedi «continuer à travailler dur» pour parvenir à un accord entre Israël et le Hamas sur les otages.
«Nous ne sommes pas encore parvenus à un accord, mais nous continuons à travailler dur» en ce sens, a écrit sur X (ex-Twitter) la porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, Adrienne Watson, démentant une information du Washington Post selon qui un accord prévoyant des libérations d'otages contre une pause de cinq jours dans les combats avait été conclu entre les belligérants.
Dans une tribune publiée par le même quotidien, le président américain Joe Biden a par ailleurs menacé d'interdire de visa aux Etats-Unis les colons «extrémistes qui attaquent des civils en Cisjordanie». «La violence extrémiste contre les Palestiniens de Cisjordanie doit cesser et ceux qui commettent ces violences doivent rendre des comptes», a-t-il écrit.