«Si on ne bloque rien, on ne nous entend pas»: des milliers de personnes sont descendues mardi dans la rue en France pour réclamer des hausses des salaires face à l'inflation et protester contre les réquisitions de grévistes dans les raffineries.
Près de 150 points de rassemblement étaient prévus dans le pays, selon la CGT, organisatrice de cette journée de «mobilisation et grève» interprofessionnelle, avec plusieurs autres syndicats et organisations de jeunesse.
A Paris, le cortège fort de plusieurs milliers de personnes s'est élancé en début d'après-midi derrière une banderole appelant à des augmentations et au «respect du droit de grève». De nombreux secteurs ont lancé des appels: fonction publique, énergie, transports publics, routiers, agroalimentaire, commerce, etc.
Dans l'industrie pétrolière d'où est parti le conflit qui perturbe fortement depuis près de deux semaines la distribution de carburant, la grève se poursuivait mardi chez TotalEnergies, dans les équipes de raffinage et/ou de dépôt de carburants.
Peu de problèmes pour le trafic SNCF
Elle était modérément suivie dans les transports en commun parisien (RATP), avec un trafic des métros quasi normal, mais celui des bus perturbés. Du côté des trains de la SNCF, il n'y avait pas de problèmes majeurs sur le réseau, malgré des perturbations en région parisienne et un train régional sur deux.
«Globalement ça a été calme», estimait de son côté un agent d'encadrement qui gère les flux de passagers. «On a connu des situations difficiles, mais ça a été».
Réquisitions dénoncées
Outre l'"augmentation des salaires», le mouvement vise à dénoncer les réquisitions de grévistes mises en oeuvre par le gouvernement pour faciliter la distribution de carburant. Lundi, l'exécutif en a lancé de nouvelles sur les dépôts TotalEnergies de Mardyck (nord), déjà réquisitionné en fin de semaine dernière, et de Feyzin (sud-est).
«Il y aura des réquisitions autant que nécessaire», a prévenu mardi le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran. «Chaque fois que ces réquisitions ont été attaquées, nous avons gagné en justice les référés (procédures en urgence, ndlr) parce que les juges ont considéré que c'était des réquisitions qui étaient proportionnées», a souligné le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu.
Le situation sur le terrain s'est améliorée de manière «sensible», avec désormais moins près d'un quart des stations-service perturbées en France, au lieu de 30% le week-end dernier, a annoncé la Première ministre Elisabeth Borne.
«Problème de salaire»
Le gouvernement veut aussi se montrer à l'écoute des Français affectés par l'inflation. Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a estimé mardi qu'il y avait «un problème de salaires» en France et appelé une «partie du patronat à augmenter les salaires quand c'est possible».
Dans la fonction publique, des négociations sur les salaires seront ouvertes au début de l'année 2023, selon le ministre de la Fonction publique Stanislas Guerini. Les syndicats CGT, FO, FSU, Solidaires réclament l'indexation «automatique» du point d'indice sur l'inflation.
Premier syndicat de France, la CFDT a décidé de rester à distance du mouvement de grève de mardi, ne croyant pas en l'efficacité des manifestations interprofessionnelles pour obtenir des augmentations salariales dans les entreprises. Selon un sondage du cabinet Elabe, 49% des Français désapprouvent la mobilisation quand 39% y sont favorables.
Outre le sujet des salaires et des réquisitions de grévistes, d'autres ingrédients attisent la colère sociale. Comme la perspective de l'usage par le gouvernement, pour faire adopter le budget, de l'article 49.3 de la Constitution
Cette disposition permet à l'exécutif de faire voter une loi sans vote (ce sera «probablement» le cas mercredi, selon Olivier Véran). Il y a aussi le durcissement à venir des règles d'indemnisation des chômeurs ou encore la réforme des retraites attendue pour la fin de l'année.